<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> TotalEnergies fait son entrée dans le nucléaire

5 février 2024

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TotalEnergies fait son entrée dans le nucléaire

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Le groupe TotalEnergies a entrepris depuis plusieurs années une diversification impressionnante. Il ne lâche pas le pétrole et le gaz et d’ailleurs multiplie les investissements en Afrique, en Amérique latine et au Moyen-Orient, mais il est aussi engagé dans les renouvelables et maintenant dans le nucléaire, y compris en France. Une rupture.

Le groupe TotalEnergies, géant français de l’énergie, a annoncé le mois dernier son intention d’investir dans le nucléaire en France. Cette décision marque une évolution notable pour la compagnie pétrolière qui pendant longtemps n’est pas venue sur les chasses gardées d’EDF et d’Areva. Mais ce n’est plus le cas. Le groupe a annoncé qu’il souhaitait investir 10 milliards d’euros dans le nucléaire d’ici à 2030 et entend devenir un acteur qui compte dans cette industrie en France et en Europe.

Première étape, une alliance avec EDF. Le PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné a fait savoir qu’il souhaitait signer des contrats d’approvisionnement en électricité de 15 ou 20 ans avec EDF pour « aider à financer » de nouveaux réacteurs nucléaires.  Et cela pourrait se traduire par des prises de participation directement au capital d’une ou plusieurs centrales nucléaires.

En fait, les velléités de Total dans le nucléaire ne datent pas d’hier. En 2006, le groupe avait créé une filiale, Total Nuclear, afin de développer des projets nucléaires à l’étranger. Était notamment visée la construction de la centrale de Barakah aux Emirats Arabes Unis, un contrat finalement emporté par le coréen Kepco.

En 2012, Total a eu des velléités nucléaires en France même. Il a ainsi participé à l’appel d’offres pour la construction du réacteur de Penly 3, en Normandie. Mais le groupe a finalement renoncé à ce projet en 2017, en raison de la grande incertitude politique qui régnait alors autour du nucléaire en France. Il faudra encore attendre cinq ans pour qu’Emmanuel Macron fasse son virage à 180 degrés et devienne soudain un adepte de cette source d’énergie.

Un virage stratégique

La décision de TotalEnergies d’investir dans le nucléaire en France marque une véritable rupture. Elle s’explique pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la guerre en Ukraine a renforcé la nécessité pour l’Europe de réduire sa dépendance aux énergies fossiles. Le nucléaire est une source d’énergie décarbonée revenue à la mode dont la contribution à la transition énergétique est considérée comme essentielle.

Le gouvernement français a annoncé son intention de lancer la construction d’un nombre conséquent de réacteurs nucléaires en France, entre 6 et 14, ce qui signifie la reconstruction d’une filière et pour des décennies. Cela créé une forte incitation à investir dans le nucléaire avec des garanties de commandes et de marchés.

Enfin, TotalEnergies prépare l’après fossiles, pas pour demain, mais pour après-demain. Son chiffre d’affaires et plus encore ses bénéfices sont encore très majoritairement assurés par le pétrole et le gaz, mais l’énergéticien n’a pas le choix. Il a lancé des investissements importants dans les renouvelables et se lance maintenant dans le nucléaire.

Un signal important pour l’industrie

Total entend investir dans la construction de nouveaux réacteurs, dans la maintenance et la modernisation des centrales existantes, et dans le développement de nouvelles technologies.

Et la décision de Total d’investir dans le nucléaire est un signal important pour cette industrie en France. Elle montre que le secteur attire de nouveaux investisseurs. Maintenant les négociations à venir sur le volume et le prix de l’électricité qui sera acheté par TotalEnergies à EDF s’annoncent compliquées et les risques non négligeables. Il y a d’abord une question de concurrence. Tous les industriels grands consommateurs d’électricité n’ont pas les moyens de TotalEnergies. Ensuite, le risque pour EDF en cas de dérapage en terme de calendrier et de coût des chantiers, comme avec tous les EPR de Flamanville en France, d’Olkiluoto en Finlande, d’Hinkley Point au Royaume-Uni et même de Taishan en Chine, est considérable. Le groupe public de verrait alors contraint de fournir de l’électricité à un tarif inférieur à ses coûts de revient. EDF va devoir apprendre à maîtriser les risques industriels. En est-il capable ?

Philippe Thomazo

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