Même Tesla ne gagne toujours pas d’argent avec les voitures électriques

28 avril 2021

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : Tesla_Motors_Cybertruck
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Même Tesla ne gagne toujours pas d’argent avec les voitures électriques

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Pour les constructeurs automobiles, la transition rapide vers l'électrique est une fuite en avant. Aucun d'entre eux ne gagne de l'agent en vendant un véhicule 100% électrique et aucun d'entre eux n'est capable de rentabiliser les dizaines de milliards d'investissements réalisés. Même le précurseur, l'Américain Tesla, qui ne commercialise que du haut de gamme, ne dégage pas de profits avec la vente de ces véhicules. Il gagne de l'argent en vendant des crédits carbone à d'autres constructeurs automobiles et en spéculant sur le Bitcoin.

Le pari de la transition rapide de l’industrie automobile vers les véhicules électriques à batteries est une sorte de quitte ou double. Les centaines de milliards d’euros d’investissements et la transformation radicale des usines et des technologies utilisées doivent encore déboucher sur la création d’un modèle économique viable. C’est loin aujourd’hui d’être le cas. Aucun constructeur automobile ne gagne de l’argent en vendant des véhicules 100% électriques. Même pas Tesla, le précurseur et le modèle, qui pourtant ne commercialise que du haut de gamme. Même avec les hybrides, l’équation économique est difficile. Selon un constructeur allemand, qui s’est confié au magazine Wheels, le coût de fabrication d’une voiture hybride rechargeable est le double d’un modèle conventionnel avec une motorisation à combustion interne.

Selon une étude du cabinet Alix Partners, l’ensemble des constructeurs automobiles aura investi 225 milliards d’euros d’ici 2023 pour produire des véhicules électriques. Des investissements qu’il est aujourd’hui impossible de rentabiliser… La situation est totalement inédite. Car elle n’est pas la conséquence d’un besoin créé par les constructeurs, à l’exception de Tesla, ou d’une demande venue des consommateurs, mais d’une contrainte imposée par les gouvernements, notamment européens, qui ne laissent pas d’autres choix à leur industrie automobile que de se tourner vers l’électrique (ou toute autre forme de mobilité sans émission), sans quoi les amendes s’accumuleront.

Sans vente de crédits carbone et sans spéculation sur le Bitcoin, Tesla perd de l’argent

Les constructeurs traditionnels financent ainsi aujourd’hui les pertes liées à leurs voitures électriques par les profits réalisés avec la vente de voitures à moteur thermique. C’est un modèle qui ne peut pas perdurer longtemps. Et personne ne sait aujourd’hui comment sortir de cette impasse économique. Même pas Tesla qui ne fabrique pourtant que des véhicules électriques commercialisés à plus de 40.000 euros.

Au début de la semaine, Tesla a rendu public ses comptes pour le premier trimestre. Le constructeur a annoncé un profit  de 438 millions de dollars pour un chiffre d’affaires en forte progression de 10,39 milliards. Mais en fait, les profits ne proviennent pas de la commercialisation des véhicules, mais de la vente de crédits carbone à d’autres constructeurs pour 518 millions de dollars et de gains de 101 millions de dollars sur l’achat et la vente de Bitcoin. Dans ce dernier cas, on peut même parler de coup financier. Tesla a acheté pour 1,5 milliard de dollars de Bitcoin et annoncé que la société accepterait cette monnaie virtuelle en paiement de ses voitures. Cela a fait monter les cours du Bitcoin que Tesla a revendu en partie.

Sans les 619 millions de dollars de profits provenant des crédits carbone et des Bitcoin, Tesla aurait perdu 181 millions de dollars au premier trimestre. Le constructeur américain perd près de 1.000 dollars par voiture vendue. Si Tesla a enregistré sept trimestres consécutifs de profits, ce qui est une performance, ils n’ont jamais été réalisés par la vente de véhicules, mais par celle de crédits carbone. Une source qui va se tarir. Comme tous les constructeurs automobiles aujourd’hui sont lancés dans la motorisation électrique, le marché des crédits carbone va disparaître progressivement.

Fuite en avant

La fuite en avant de l’industrie automobile est illustrée par le classement des entreprises les plus endettées au monde publié l’an dernier par le groupe financier Janus Henderson. Il en ressort que la société la plus endettée au monde à la fin de l’année 2019 avec 192 milliards de dollars est… Volkswagen. Daimler Benz est quatrième (151 milliards), Toyota cinquième (138 milliards), Ford septième (122 milliards) et BMW huitième (114 milliards).

La situation de l’industrie automobile mondiale a été parfaitement décrite il y a déjà plusieurs mois par le magazine Forbes. Il montrait qu’elle fait face à une «menace existentielle». Pour l’auteur de l’article, Ashwini Choudhary, membre du Forbes Technology Council, «très peu de constructeurs automobiles vont survivre aux Etats-Unis comme en Europe». Il considère qu’ils doivent devenir maintenant avant tout des groupes technologiques et électroniques, même si c’est loin d’être le cœur de leur métier et de leurs compétences.

Et ils doivent se transformer tout en continuant à être performants dans le domaine des véhicules à moteur thermique «qui restent un élément essentiel de la mobilité et dont les ventes financent le développement des motorisations électriques et des voitures autonomes… Seules les sociétés qui s’adapteront rapidement à ce nouvel univers survivront». Il faut espérer que parmi les survivants, il y ait des constructeurs français ou présents en France.

L’année 2020 a été la pire depuis des décennies pour l’industrie automobile française. Le niveau de production a baissé de 40% pour revenir à celui des années 1960. Une situation plus dégradée que celle de l’Allemagne, de l’Espagne ou du Royaume-Uni. Ce n’est pas pour rien si le gouvernement français doit annoncer dans les prochaines semaines un nouveau plan de soutien à l’industrie automobile. Une situation absurde puisque d’un côté, la France est le pays qui taxe le plus l’automobile en Europe et de l’autre, se trouve obligé de soutenir une industrie contrainte de délocaliser sa production pour rester compétitive.

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