Ce n’est un secret pour personne, la production énergétique est sensible aux aléas climatiques. Si les regards sont braqués tous les étés sur les problématiques de sécheresses, de remplissage des barrages et de refroidissement des réacteurs nucléaires, les tempêtes ne sont pas non plus un aléa à prendre à la légère. Le risque de submersion existe comme prouve l’exemple de la centrale du Blayais en 1999. Un incident qui n’a eu aucune conséquence mais est depuis souvent instrumentalisé par certains militants anti-nucléaires.
Une autre faiblesse manifeste quand la météorologie devient extrême touche l’ensemble de la production électrique : le réseau de distribution. Et c’est ce qu’il s’est passé au cours des dernières semaines quand la tempête Ciaran a frappé de plein fouet la Bretagne et la Normandie.
Déconnecter les réacteurs du réseau endommagé pour éviter tout incident
Si le fonctionnement des centrales normandes est resté nominal, les lignes haute-tension permettant d’évacuer l’électricité produite se sont-elles retrouvées impactées. Ainsi, les deux réacteurs en service de la centrale de Flamanville (voir la photographie ci-dessus) ont été déconnectés du réseau dans la nuit à la suite à des incidents sur les lignes de RTE (Réseau de transport d’électricité). Le troisième réacteur, le fameux EPR, est toujours en construction et devrait entrer en service l’an prochain.
Dans ses circonstances, la procédure normale consiste en un îlotage. S’il fabrique de l’électricité, un réacteur nucléaire nécessite dans le même une alimentation électrique. Ces systèmes de refroidissement et de fonctionnement consomment une quantité non négligeable d’énergie. Or, dans le cas de Flamanville, la rupture de la ligne électrique a entraîné l’impossibilité d’évacuer l’électricité produite mais aussi l’incapacité de fournir l’électricité nécessaire au bon fonctionnement – en toute sûreté – du réacteur.
Les tests de procédure des îlotages frôlent les 100% de réussite
Un îlotage consiste alors à utiliser l’électricité créée par le réacteur pour subvenir à ses propres besoins, et uniquement ceux-ci. Cette procédure complexe nécessite donc de réduire très rapidement la puissance de fonctionnement de l’unité et de la « brancher » en circuit fermée.
Bien que s’entraînant régulièrement à cette éventualité, les équipes des centrales n’en restent pas moins soumis à un certain nombre d’aléas de mise en œuvre. En cas d’échec, cela oblige à activer d’autres mesures comme l’allumage des diesels de secours afin d’alimenter les circuits du réacteur.
Le taux de réussite aux tests d’îlotage en France frôle malgré tout les 100%. Preuve d’une formation intransigeante entretenue par des exercices réguliers afin de conserver un haut niveau de compétence au sein des équipes de pilotage des tranches.
Fausses rumeurs d’échec des procédures
Cette compétence n’empêche pas l’éventualité d’un échec. Et dès le lendemain du passage de Ciaran certains, par militantisme, ont fait courir le bruit d’un échec des procédures sur les deux réacteurs normands. Ce qui était faux. Les équipes de Flamanville ont réussies leur îlotage sur les deux tranches opérationnelles.
Depuis, si l’une a pu être reconnectée au réseau, l’autre est toujours hors-ligne. Attendant que d’autres équipes – celles de RTE – aient achevé leur travail de réparation des autoroutes électriques de 400.000 volts nécessaires au transfert de l’électricité qui sort des turbines de la centrale.
Un événement qui nous rappelle que si les aléas climatiques ont un impact assez faible sur la production énergétique, ceux-ci doivent être pris en compte sans relâchement pour assurer la résilience du système électrique.
Philippe Thomazo