<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Le système énergétique iranien est en piteux état

29 janvier 2025

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Le système énergétique iranien est en piteux état

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Une vague de froid en Iran a contraint à la fin de l'année dernière et il y a encore quelques jours les services publics, les écoles, les usines et les commerces à fermer, faute d’énergie suffisante pour chauffer les bâtiments. Du fait du manque de gaz, qui représente 70% de la consommation énergétique du pays, le gouvernement est confronté à un dilemme : soit couper l'approvisionnement en gaz des habitations, soit cesser d'alimenter les centrales thermiques qui produisent de l'électricité. Le pays qui possède les deuxième plus importantes réserves de gaz au monde est incapable de les exploiter pour satisfaire ses propres besoins. Et d'après le ministre iranien de l'énergie la situation de pénurie devrait encore empirer dans les prochains mois...

L’Iran est l’un des pays dont le sous-sol est le plus riche en hydrocarbures avec des réserves parmi les plus importantes du monde de gaz (2ème) comme de pétrole (4ème). Cela ne l’empêche pas, à l’image du Venezuela, qui possède les plus grandes réserves de pétrole au monde, de s’enfoncer dans une profonde crise énergétique. Elle a été particulièrement aigüe quand le pays a du faire face à la fin de 2024 et il y a encore quelques jours à une chute brutale des températures. En fait, la République islamique d’Iran se trouve aujourd’hui dans une situation de pénurie permanente de gaz naturel comme d’électricité. Une situation qui à en croire le ministre iranien de l’énergie, Abbas Ali-Abadi, ne peut qu’empirer dans les prochains mois. La pénurie d’énergie est évaluée à 20.000 mégawatts et selon Abbas Ali-Abadi : « ce chiffre atteindra 25.000 mégawatts au cours de l’été prochain. Si Dieu le veut, ce ne sera pas le cas ! ». Quand on s’en remet à Dieu en matière d’énergie, ce n’est pas bon signe…

Selon l’agence Bloomberg, les coupures d’électricité quotidiennes coûtent à l’économie 250 millions de dollars par jour d’après les estimations de la Chambre iranienne du commerce, de l’industrie, des mines et de l’agriculture. Environ 40% de la capacité de production d’acier est inutilisée, l’approvisionnement en gaz naturel d’au moins une douzaine d’usines pétrochimiques est suspendu et les flux de gaz vers le secteur du ciment ont été réduits de 80%, rapporte l’agence de presse gouvernementale Islamic Republic News Agency.

Cela est d’autant plus incompréhensible quand le pays est sur le plan énergétique béni des Dieux. Mais faut-il encore consacrer les ressources humaines et financières nécessaires à l’exploitation de ses ressources. Les dirigeants de la République islamique ont choisi d’investir dans la fabrication de l’arme nucléaire, dans les missiles et l’équipement en armes de leurs affidés (Hamas, Hezbollah, Houthis, la Syrie de Bashar el Assad…), plutôt que dans les infrastructures énergétiques. L’Iran aurait besoin aujourd’hui de 45 milliards de dollars d’investissements pour résoudre son déficit énergétique chronique et au-delà ses graves problèmes de pollution de l’air. Un chiffre avancé  le 1er janvier dernier par le ministre iranien du pétrole, Mohsen Paknejad.

Vague de froid et pénurie de gaz

La pollution atmosphérique, déjà importante tout au long de l’année, devient encore plus problématique en hiver quand les centrales électriques brûlent du mazout lourd de mauvaise qualité pour compenser le manque de gaz. En décembre dernier et encore à la mi-janvier, une vague de froid a mis en évidence l’ampleur des difficultés rencontrées par le pays pour répondre à la demande d’énergie et plus particulièrement de chauffage. A tel point que les cours dans les écoles et les universités ont été suspendus et les bureaux des services gouvernementaux ont été fermés en décembre comme à la mi-janvier pour économiser l’énergie tout comme bon nombre d’usines et de centres commerciaux. Il y a eu également des coupures de courant plusieurs heures par jour. Le président, Massoud Pezeshkian a même appelé la population à baisser les thermostats de 2 degrés Celsius pour limiter la pénurie.

Couper le chauffage ou ne plus alimenter les centrales électriques

Selon les autorités, le déficit de gaz dont le pays a besoin pour se chauffer et produire de l’électricité s’élève à environ 350 millions de mètres cubes par jour. Le gaz naturel représente environ 70% de la consommation d’énergie du pays. Et 90% des foyers iraniens utilisent le gaz pour se chauffer et cuisiner. Le gouvernement s’est ainsi retrouvé confronté à un dilemme : soit couper l’approvisionnement en gaz des habitations, soit cesser d’alimenter les centrales thermiques qui produisent de l’électricité. Le choix a été fait de maintenir coûte que coûte un minimum de chauffage dans les habitations. Du coup, à la fin de l’année dernière 17 centrales électriques étaient à l’arrêt et les autres n’étaient que partiellement opérationnelles.

Infrastructures obsolètes et sabotages

« La situation est mauvaise en raison des températures très froides, en particulier à Téhéran et dans les provinces du nord, mais elle est aussi exacerbée par la tendance structurelle à une consommation effrénée au cours des deux ou trois dernières années, sans augmentation de la production », explique Gregory Brew, spécialiste de l’Iran et de l’énergie de l’Eurasia Group. En Iran, les subventions énergétiques sont massives et comme les factures sont peu élevées, cela favorise la surconsommation et le gaspillage. A cela s’ajoute une mauvaise gestion et des infrastructures obsolètes qui expliquent l’incapacité de l’Iran à répondre à la demande croissante de gaz. Le gaspillage serait endémique, notamment dans l’industrie.

Les sanctions internationales ont aussi un impact tout comme les choix de la République islamique d’Iran qui préfère consacrer des milliards de dollars au développement de ses moyens militaires plutôt qu’a la modernisation de ses infrastructures énergétiques. Les principales réserves de gaz de l’Iran se trouvent dans le sud, le sud-ouest et au large des côtes, et le pays n’a pas le réseau de gazoducs pour transporter suffisamment de gaz vers le nord.

Enfin, la crise énergétique a été amplifiée par le fait qu’en février 2024, deux gazoducs importants ont été sabotés, par des opposants au régime ou par Israël. En conséquence, le gouvernement a dû puiser dès le début de l’année dernière dans les réserves de gaz d’urgence afin d’éviter toute interruption de service pour des millions de personnes.

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