Le carburant hydrogène présente notamment comme atout la possibilité d’alimenter sur de longues distances des moyens de transport lourds comme les trains, les camions, les bus et même les navires. Ce qui est presque impossible pour les moteurs électriques fonctionnant avec des batteries dont le poids devient écrasant pour assurer une autonomie importante à des engins de plusieurs dizaines, centaines ou milliers de tonnes. L’autonomie théorique des prototypes de camions lourds électriques ne dépasse pas 200 kilomètres et leurs temps de recharge sont importants. Il faudrait 10 tonnes de batteries pour assurer une autonomie de 1.000 kilomètres à un camion.
En revanche, le camion à hydrogène semble promis à un bel avenir. C’est le pari que fait la Suisse. Ce pays va ainsi jouer en Europe un rôle de pionnier. Il doit lancer dans les prochaines semaines la construction d’une unité de production «propre» d’hydrogène. Elle servira à alimenter une flotte de camions à pile à combustible construits par le sud-coréen Hyundai. Ces engins circuleront en Suisse et dans l’Europe limitrophe. Si le projet est une réussite, il devrait servir de modèle et s’exporter notamment aux Etats-Unis.
L’hydrogène sera produit par électrolyse à Gösgen à partir d’une centrale hydroélectrique qui fournira de l’électricité renouvelable. Le carburant ainsi produit alimentera d’ici 2025 une flotte de 1.600 camions (des engins de 18 tonnes passant à 34 tonnes avec une remorque). Dès la fin de l’année 2019, une cinquantaine de camions électriques fonctionnant avec des piles à hydrogène commenceront à circuler.
Une flotte de 1.600 camions
Les camions fabriqués par Hyunday auront une autonomie plutôt restreinte de 400 kilomètres grâce à 8 réservoirs d’une capacité de 33 kg stockés sous pression (350 bars), mais suffisante pour un pays comme la Suisse. Par ailleurs, contrairement à la motorisation électrique par batteries, la recharge des réservoirs d’hydrogène se fera en quelques minutes. Les camions embarqueront deux piles à hydrogène mises en parallèle pour une puissance de 350 kW.
Le maitre d’oeuvre du projet est une association baptisée H2 Energy qui réunit à la fois les principaux groupes pétroliers présents en Suisse (Avia, Shell, Tamoil), des entreprises du transport, de la logistique, de l’industrie et de la grande distribution (Coop, Migros). H2 Energy a signé un partenariat avec Hyundai pour la création d’une coentreprise. Baptisée «Hyundai Hydrogen Mobility», elle a pour mission de louer aux entreprises les 1.600 camions alimentés à l’hydrogène que le constructeur coréen s’apprête à produire.
Le pari de H2 Energy repose notamment sur l’augmentation progressive en Suisse de l’écotaxe sur les poids lourds fonctionnant au gazole. Cette taxe incite fortement les entreprises suisses du transport à se tourner vers des énergies alternatives. L’hydrogène semble pour les camions lourds la plus prometteuse.
Hyundai est avec les constructeurs japonais Toyota et Honda l’un des pionniers de la voiture à hydrogène. Il a mis sur le marché européen dès 2015 le crossover ix35 FCEV remplacé très récemment par le NEXO. Aux Etats-Unis, le groupe Nikola Motors a présenté un projet de camion à hydrogène, le Nikola One, ayant une autonomie théorique comprise entre 1.300 et 1.900 kilomètres…
Mais l’information la plus importante dans le monde de l’hydrogène est la décision de la Chine de se doter d’une filière d’hydrogène complète allant de la production au stockage et à la distribution du carburant et à la fabrication des véhicules, bus, camions et voitures particulières. L’ambition chinoise est de créer une «économie de l’hydrogène» en investissant des milliards de dollars et en cessant dans le même temps de subventionner la voiture particulière électrique à batteries.
Enfin, l’Allemagne s’est lancée elle résolument dans le train à hydrogène dont des prototypes circulent déjà. Le groupe français Alstom a remporté en mai un marché pour la fourniture de 27 trains régionaux à hydrogène au Land de Hesse.