Savoir ce qu’il faut faire, savoir le faire et le faire savoir

2 décembre 2021

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Savoir ce qu’il faut faire, savoir le faire et le faire savoir

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La principauté de Monaco démontre que le chemin à suivre pour mener la transition n’est ni mystérieux, ni caché, ni insurmontable. Nous savons où nous devons aller. Il faut substituer progressivement d’autres sources d’énergie aux carburants fossiles et consommer plus efficacement l’énergie. Il faut le faire avec de la méthode, de la volonté et de l’humilité.

Le principal problème avec la transition énergétique tient à la difficulté de comprendre, d’abord, et de mesurer, ensuite, l’ampleur des transformations à effectuer. Il ne se règle pas malheureusement en répétant en boucle sur tous les tons que les progrès ne sont pas suffisamment rapides et les décisions douloureuses tardent à être prises. Il ne se règle pas en espérant que la technologie puisse par miracle permettre d’éliminer les gaz à effet de serre de l’atmosphère ou en pariant sur les failles des modèles mathématiques climatiques. Il ne se règle pas, enfin, en cassant la vieille économie sans avoir au moins commencé à construire la nouvelle.

La transition est une tâche titanesque, sans précédent par son échelle et sa nature dans l’histoire même de l’humanité. Il n’y a en fait jamais eu jusqu’à aujourd’hui de réelle transition énergétique. L’humanité a empilé depuis deux siècles et demi les sources d’énergie toujours plus puissantes et plus intensives, mais sans renoncer aux précédentes. On utilise encore presque partout dans le monde du bois pour se chauffer et pour faire cuire des aliments.

Une stratégie, innover, impliquer

Pour avoir une chance de réussir, la transition nécessite la maîtrise de trois éléments. D’abord, se faire une idée, la plus précise possible, des transformations à mener à l’échelle des métropoles, des territoires, des pays, des continents. Définir des priorités et une stratégie, même si cette dernière est forcément amenée à évoluer au fil du temps. Ensuite, il faut intégrer au processus l’impérieuse nécessité d’innover et de développer de nouvelles technologies. L’arsenal à notre disposition aujourd’hui est à la fois insuffisant et incomplet. Les éoliennes, les panneaux solaires et les véhicules électriques sont seulement une partie, une petite partie, de la solution. L’hydrogène décarboné et la capture du CO2 ne sont pour le moment que des technologies embryonnaires. Enfin, il faut chercher en permanence à expliquer, à convaincre et à impliquer. La transition ne se fera pas contre ou en dépit des populations. Le meilleur moyen de les associer est de leur permettre de comprendre et surtout de voir les progrès effectués.

Surmonter méthodiquement une série de petits problèmes

Pour résumer, il faut savoir, au mieux, ce qu’on doit et ce qu’on peut faire. Il faut le faire. Et il faut le faire savoir. Et il faut y ajouter deux ingrédients indispensables : de l’humilité et de la méthode. Quand un problème est trop complexe et difficile pour être appréhendé dans toute sa dimension, il faut tout simplement faire comme le font les scientifiques, le diviser en plusieurs petits problèmes à surmonter méthodiquement les uns après les autres. Peu de pays au monde ont été capables jusqu’à aujourd’hui de construire une stratégie de transition crédible combinant l’ensemble de ses aspects et de commencer à obtenir des résultats. La principauté de Monaco en est un des rares exemples. Même si évidemment tout n’est pas parfait et si évidemment, compte tenu des spécificités uniques de cette cité-État, elle ne peut pas être un modèle. Mais elle peut être un exemple. Car elle s’est dotée d’une stratégie efficace de décarbonation dans trois domaines : les bâtiments, les déchets et les transports. Car elle innove dans des technologies aussi variées que la thalassothermie, la transformation des déchets en source d’énergie ou même l’autopartage. Parce que sa communication à l’intérieur de ses frontières est méthodique et permanente auprès de la population comme des décideurs. Enfin, parce que le rôle international que Monaco joue en faveur de la protection de l’environnement et plus particulièrement des océans est devenu un élément même de l’identité de la principauté et de ses citoyens.

La principauté a compris que c’est une question rationnelle

Monaco semble avoir compris une chose, que lutter contre le changement climatique, c’est-à-dire réduire les émissions de gaz à effet de serre, est une question rationnelle. Nous savons où nous devons aller. Il faut substituer progressivement et méthodiquement d’autres sources d’énergie aux carburants fossiles et consommer plus efficacement l’énergie. Le chemin à suivre n’est ni mystérieux, ni caché, ni insurmontable. Il est indiqué aussi bien par l’Agence internationale de l’énergie (AIE) que par le World Economic Forum ou de multiples équipes de recherche comme par exemple celle de l’université d’Oxford dirigée par l’économiste et prix Nobel Joseph Stiglitz. Mener la transition signifie avant tout changer des systèmes. « La croissance économique couplée à la décarbonisation n’est pas seulement réaliste, elle a déjà eu lieu. Les données publiées montrent que les émissions de CO2 liées à l’énergie ont cessé de progresser l’an dernier même si la croissance mondiale a atteint près de 3% », écrivait l’AIE juste avant la pandémie qui a en partie faussée les statistiques. La même agence souligne aussi que l’impulsion ne peut venir que des États.

Ces analyses montrent que les gouvernements dirigent de fait, directement et indirectement (par la réglementation, les subventions, la fiscalité), 70% des investissements énergétiques dans le monde. L’AIE met en avant cinq priorités qui sont exactement celles de la principauté de Monaco : réduire les émissions des infrastructures et équipements existants ; renforcer et soutenir les filières des technologies innovantes ; développer et améliorer les infrastructures qui permettent le développement de technologies innovantes : augmenter le soutien à la recherche, au développement et à la fabrication de prototypes et enfin, renforcer la coopération technologique internationale.

Éric Leser

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