<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Recharger sa voiture électrique sur une borne rapide d’autoroute peut coûter vraiment cher

28 août 2024

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Recharger sa voiture électrique sur une borne rapide d’autoroute peut coûter vraiment cher

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Le véhicule 100% électrique n’est pas vraiment adapté à un parcours rapide (autoroute) sur longue distance (plusieurs centaines de kilomètres). Cela est évidemment tout à fait faisable, mais demande une planification assez précise du déplacement et des étapes de recharge. Il faut aussi savoir que le coût de l’électricité à une borne rapide n’a rien à voir avec celui à la maison. C'est notamment ce que dénonce dans son rapport annuel l'Autorité de régulation des transports (ART).

Faire des centaines de kilomètres avec un véhicule 100% électrique peut parfois se transformer en parcours du combattant. La consommation sur autoroute à haute vitesse ou en montagne augmente fortement. Il faut trouver des bornes de recharge, si possible puissantes et rapides. Il faut qu’elles soient libres, qu’elles ne soient pas en panne et qu’elles ne nécessitent pas des cartes de paiement exotiques. En fait, les infrastructures existantes restent encore assez nettement insuffisantes et parfois peu pratiques. Et puis, il y a les tarifs de recharge…

Plus coûteux qu’avec un véhicule essence

Dans son rapport annuel, l’Autorité de régulation des transports (ART) dénonce une situation qui rend les trajets autoroutiers en véhicule électrique souvent plus coûteux qu’avec une voiture à moteur à combustion interne. Avec une consommation de l’ordre de 25 kWh aux 100 km, le tarif de rechargement à une borne sur une aire d’autoroute était compris  en 2022 entre 10 à 25 euros pour 100 km tandis que le prix moyen pour une voiture à essence était alors autour de 13 euros pour la même distance. Aujourd’hui, selon TotalEnergies, le coût de la recharge sur autoroute se monte en moyenne, toujours pour 100 kilomètres, à 19,75 euros. L’ART reconnait que ces tarifs sont un « frein à l’électrification du parc automobile ».

Il y a en tout environ 14.000 bornes de recharge ultra-rapides (plus de 150 kilowatts) sur les grands axes et aux abords des villes, selon le baromètre du ministère de la Transition écologique et de l’Association nationale pour le développement de la mobilité électrique (Avere). Toujours selon l’Avere, le coût moyen d’une recharge ultra-rapide était de 21,35 euros au premier semestre (pour 40 kWh). Un tarif qui a augmenté de pas moins de 6,77% au cours des six premiers mois de 2024. Maintenant, certains opérateurs facturent encore au kWh et à la minute et le coût moyen atteint alors 26,40 euros, toujours pour 40kWh. Le coût d’une même recharge ultra-rapide peut tout de même baisser à 17 euros en moyenne pour les utilisateurs réguliers, munis d’une carte spécifique ou d’un abonnement. Mais comme c’est la loi de la jungle, même avec un abonnement le prix du kWh peut aller du simple au double, selon les bornes, les opérateurs (TotalEnergies, Engie, Ionity) et les fournisseurs de cartes et d’abonnements (ChargeMap, Plugsurfing).

Dans un avis paru en juin, l’Autorité de la concurrence dénonce aussi « un déficit informationnel des consommateurs » sur les tarifs de recharge, avant de recharger mais même après l’avoir fait, « pour connaître le prix effectivement payé ».

Au moins trois fois plus cher

Une situation chaotique illustrée par Le Parisien qui a pris un exemple concret pour montrer ce que peut coûter la recharge de son véhicule 100% électrique à une famille qui rentre de vacances et parcourt 1.000 kilomètre pour rejoindre son domicile du Havre. La famille doit donc s’arrêter à trois reprises. Pour recharger sa voiture, et si elle trouve des bornes rapides, il lui faut environ 25 minutes. Le journal prend comme modèle les bornes d’Engie de l’aire sud de Morainvilliers (Yvelines) sur l’A13. Si le père de famille reconnaît que la rapidité de la charge facilite le voyage, « il me faut 36 heures chez moi » concède-t-il, le prix n’est pas le même. Pour recharger sa batterie, il payera 60 centimes le kWh (ce qui est dans la moyenne de ce qui existe sur les autoroutes sans abonnement) contre 19 centimes à son domicile. Au total, la facture énergétique des 1 000 kilomètres se monte à environ 80 euros. « En moyenne, avec un diesel, vous êtes à 100 euros les 1 000 km. Les bienfaits de l’électrique se voient tout de suite un peu moins », reconnait ledit conducteur.

Difficile de rentabiliser une station de bornes rapides

L’automobiliste espère qu’avec la démocratisation de l’électrique, le prix des recharges sur les aires d’autoroutes baissera. C’est loin d’être assuré, si le parc de véhicules électriques augmente plus vite que la disponibilité des bornes rapides le long des voies rapides. Une question d’offre et de demande. Une question aussi de perception de la voiture électrique qui est considérée généralement aujourd’hui comme un véhicule pour les ménages aisés. Selon l’ART, les concessionnaires de stations d’autoroute perçoivent une commission de 18% sur les recettes des bornes de recharges contre seulement 4,2% en moyenne pour les autres biens qu’ils vendent. L’installation et l’exploitation des bornes de recharge électrique sont soumises à des contrats de sous-concessions passés entre une société d’autoroute (telle que Vinci autoroute, APRR ou Sanef) et une entreprise spécialisée comme TotalEnergie, Engie Vianeo ou Electra.

Il faut dire que le chiffre d’affaires d’une borne n’a rien à voir avec celui d’une pompe à carburant qui permet de faire un plein en quelques minutes et est rarement en panne. En outre, installer une station de charge rapide est coûteux et met du temps à devenir rentable. L’équation économique est compliquée. Les chiffres publics montrent, par exemple, que l’installation d’une seule borne Ionity, Fastned ou TotalEnergies coûte entre 100 000 et 250 000 euros. Dans le dernier rapport trimestriel de Fastned, il est indiqué que l’installation d’une borne lui coûte 95 000 euros, une somme à laquelle il faut ajouter 25 000 euros pour le raccordement au réseau électrique. Installer une aire dans une stations comprenant entre 4 et 10 bornes peut coûter jusqu’à 2,5 millions d’euros. Avant que les opérateurs ne commencent à gagner de l’argent, il va falloir plusieurs années et en recharger des véhicules… Et pas seulement pendant les périodes de vacances estivales. Voilà pourquoi Ionity qui avait mis en place un tarif d’appel en proposant pendant plusieurs mois une charge forfaitaire à 8 euros quelle que soit la quantité d’électricité consommée est passé ensuite à une facturation à la minute puis maintenant à la quantité d’énergie utilisée.

Des stations peu fréquentées en dehors des périodes estivales et de vacances

Il faut aussi espérer pour les propriétaires de stations de recharge que les ventes de véhicules électriques continuent à progresser rapidement et les automobilistes ne soient pas rebutés par cette motorisation. Car leurs stations sont souvent assez peu fréquentées en-dehors des périodes estivales et de vacances.

Un autre automobiliste interrogé dans la même station services de l’A13, toujours par Le Parisien, est bien plus vindicatif que le premier cité. Pour recharger sa Tesla Model X, les 60 centimes par KWh lui semblent particulièrement excessifs d’autant plus que les bornes Tesla affichent selon des tarifs compris entre 21 et 40 centimes le KWh. « Ils se gavent », fustige-t-il et de s’emporter contre le discours qui encourage les automobilistes à passer à l’électrique et à « rouler plus vert » quand « les professionnels font leur beurre sur notre dos ».

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