Les ventes de voitures électriques ont doublé en France l’an dernier. Le véhicule électrique est considéré par une part grandissante de l’opinion comme un élément important de la transition énergétique. Il contribue à réduire les émissions polluantes de dioxyde d’azote, d’ozone et dans une moindre mesure de particules fines, du fait de l’absence de gaz d’échappements.
Il contribue aussi à réduire les émissions de gaz à effet de serre même si sa construction a une empreinte carbone bien supérieure à celle d’une voiture à moteur thermique, notamment à cause des centaines de kilos de batteries qu’il emporte. Mais sur sa durée de vie, il émet moins de CO2 qu’un véhicule thermique. Cela est particulièrement vrai en France où la production électrique est très fortement décarbonée du fait de l’importance de l’énergie nucléaire.
Des subventions et des campagnes de promotion incessantes
La voiture électrique bénéficie aujourd’hui d’un environnement extrêmement favorable. Les aides financières et autres subventions à l’achat sont importantes. Les campagnes publicitaires des constructeurs en faisant la promotion sont incessantes. Elle est sans cesse mise en avant de façon directe et indirecte par le gouvernement, les écologistes, les maires des grandes villes et la plupart des médias. Ainsi, par exemple, la circulation des véhicules à moteur diesel sera interdite à Paris à partir de 2024 et celle des véhicules à moteur essence à partir de 2030.
Mais la question du succès de la voiture électrique se mesure aussi à sa capacité à se substituer réellement au véhicule thermique et à toucher une part grandissante de la population. Si elle contribue à entretenir voire à élargir la fracture territoriale et sociale, son succès actuel pourrait être en trompe l’œil et son avenir compliqué. Savoir qui sont aujourd’hui les utilisateurs et les acheteurs de voitures électriques est donc une information importante.
Des habitants aisés des périphéries des métropoles
Enedis, la filiale d’EDF qui gère le réseau électrique en France et est donc directement impliquée dans l’adaptation de celui-ci aux besoins des véhicules électriques, a réalisé une grande étude sur leurs usages. Elle vient juste d’être rendue publique.
Premier enseignement, les propriétaires vivent à 88% dans une maison individuelle et 12% dans un immeuble. Logique. Il est bien plus facile de recharger sa voiture depuis son propre garage qu’en ville où la plupart des habitants n’ont pas accès à une solution de charge la nuit. La recharge à domicile semble presque indispensable puisque 88% des personnes interrogées déclarent ne jamais utiliser ou très rarement une borne publique. Sachant qu’en plus, il y en a trop peu et elles sont assez souvent en panne.
Surtout le trajet domicile-travail
Autre information à mettre en avant dans le sondage d’Enedis, les véhicules électriques servent avant tout à effectuer les trajets domicile-travail et la plupart de leurs utilisateurs ont une autre voiture pour leurs déplacements sur longue distance. Ainsi, si l’autonomie théorique moyenne des véhicules des personnes interrogées est de 275 kilomètres, ils ne parcourent à leur volant que 44 kilomètres par jour en moyenne. Et 48% des sondés n’utilisent leur voiture électrique que pour les trajets domicile-travail et 79% d’entre eux disposent d’une autre voiture non électrique.
Ce sondage, comme les précédents, montre que la voiture électrique reste encore aujourd’hui un luxe réservé aux habitants aisés de la périphérie des métropoles. En dépit des baisses de prix et de l’augmentation des subventions, leur coût à l’achat reste élevé. Par ailleurs, la nécessité de les recharger fréquemment et une autonomie encore relativement limitée les réservent à des acheteurs disposant d’un garage et souvent d’un autre véhicule à moteur thermique.
Les possibilités d’usages plus limitées des voitures électriques par rapport à celles des voitures thermiques sont évidemment toujours le principal frein à l’achat. Les voitures électriques ne prennent des parts de marché significatives que dans les pays où elles sont fortement subventionnées. Cela est vrai de la France comme de l’Allemagne de la Norvège ou de la Chine. Et cela devrait encore durer. Comme le montre une étude menée récemment par l’équipementier Continental dans cinq pays, la France, l’Allemagne, les Etats-Unis, le Japon et la Chine, il y a encore beaucoup à faire pour séduire et convaincre une grande partie des conducteurs. Une majorité de Français, d’Allemands, d’Américains et de Japonais n’a pas l’intention de passer à l’électrique.