Pour ceux qui espèrent un reflux de l’inflation, notamment avec la baisse assez spectaculaire des prix du gaz et de l’électricité depuis plusieurs semaines, la nouvelle n’est pas très bonne. Le baril de pétrole est reparti à la hausse et cela pourrait même être une tendance durable. C’est en tout cas ce que pense l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Son directeur exécutif Fatih Birol a expliqué la semaine dernière que les marchés de l’énergie et surtout celui du pétrole pourraient être tendus cette année à la fois du fait du rebond de l’économie chinoise, premier importateur mondial d’or noir, et des difficultés de l’industrie pétrolière russe soumise aux sanctions occidentales. Le cartel de l’Opep (Organisation des pays exportateurs de pétrole) fait exactement la même analyse et se réjouit lui des perspectives économiques pour l’année 2023…
Le prix du baril de qualité Brent de la mer du Nord a ainsi dépassé le 23 janvier le seuil des 88 dollars, son plus haut niveau depuis novembre dernier. Quant au baril de qualité West Texas Intermediate (WTI), il suit la même tendance à près de 82 dollars, son plus haut niveau depuis le 17 novembre. Toutefois, le retour en forme de l’euro face au dollar devrait alléger la facture pétrolière européenne. Tandis que fin septembre dernier, le dollar valait plus d’un euro, la monnaie américaine est retombée actuellement autour de 0,92 contre la devise européenne.
Le redémarrage de l’économie chinoise
En fait, les cours du pétrole sont guidés par deux perspectives contradictoires, celle d’une possible récession aux Etats-Unis et celle d’un redémarrage rapide de l’activité économique chinoise. Et c’est la deuxième hypothèse qui semble prendre le dessus. Selon l’agence Reuters, la demande chinoise de pétrole a augmenté de près d’un million de barils par jour en novembre dernier. Une tendance qui devrait se poursuivre et s’amplifier. «Toutes les routes mènent à la même destination, une augmentation de la demande chinoise», affirme John Kilduff vice-président de Again Capital, investisseur spécialisé dans l’énergie et les matières premières.
Pour l’AIE, la réouverture de la Chine devrait même amener le marché pétrolier vers de nouveaux sommets historiques de consommation cette année à 101,7 millions de barils par jour en hausse de 1,9 million de barils par jour par rapport à 2022. Le problème est que toujours selon l’AIE la production mondiale de pétrole va seulement augmenter d’un million de barils par jour cette année après un rebond l’an dernier de 4,7 millions de barils par jour. «Une augmentation de production de 1,9 million de barils par jour des pays n’appartenant pas à l’Opep+ [alliance des 13 pays de l’Opep menés par l’Arabie Saoudite et de 10 pays producteurs alliés menés par la Russie] sera tempérée par une baisse de production de 870 millions de barils par jours liées aux prévisions de déclin de la production russe», écrit l’Agence internationale. Les pays dont la production devrait augmenter cette année devrait ainsi être les États-Unis, le Brésil, la Norvège, le Canada et la Guyane.
L’AIE précise que «la Chine va être à l’origine de près de la moitié de l’augmentation de la demande mondiale même si la forme et la vitesse de la réouverture de son économie reste incertaine». Et l’Opep ajoute dans son dernier rapport que «la Chine va augmenter ses dépenses publiques pour faciliter le redémarrage économique et que cela devrait se traduire par un soutien à la demande de pétrole de l’industrie, de la construction et des transports».
Profits records pour les compagnies pétrolières
Tout cela signifie que l’industrie pétrolière mondiale devrait continuer à connaître un contexte extrêmement favorable en 2023 après une année de tous les records en 2022. Ainsi, les cinq compagnies occidentales les plus profitable, ExxonMobil, Chevron, TotalEnergies, BP et Shell devraient collectivement avoir dégagé l’an dernier près de 200 milliards de dollars de bénéfices net. Cela revient à presque doubler la meilleure performance qu’elles avaient jamais réalisées. Cela leur permet de se désendetter rapidement. Les dettes cumulées de ces cinq majors sont à leur plus bas niveau depuis 15 ans à 100 milliards de dollars à comparer aux 270 milliards à la fin de l’année 2020 marquée par l’épidémie de Covid et l’effondrement des cours du baril. Selon les analystes, les profits des cinq mêmes compagnies devraient être encore cette année à des niveaux très élevés mais inférieurs à ceux de 2022 du fait des pressions inflationnistes, autour de 158 milliards de dollars.