Contrairement aux idées reçues, la pollution atmosphérique, notamment par les particules fines et l’ozone, n’est pas seulement un problème local… loin de là. Les masses d’air polluées voyagent sur des centaines et parfois des milliers de kilomètres. Ainsi, par exemple, les concentrations de particules fines en région parisienne ne sont pas seulement liées à la circulation automobile, aux émissions industrielles proches, à l’agriculture et aux systèmes de chauffage, mais à des masses d’air provenant de l’est et du nord de l’Europe. A savoir notamment de l’Allemagne et de la Pologne et de leurs centrales électriques fonctionnant au charbon et au lignite.
Une recherche sur une année entière (de septembre 2009 à septembre 2010) menée par Airparif avait conclu que, dans les zones qui ne sont pas directement au contact de la circulation routière, 68% des particules proviennent d’émissions en-dehors de l’Ile-de-France! Cela explique, par exemple, que les mesures de circulation alternée prises lors des épisodes de pics de pollution n’ont quasiment aucun impact sur la pollution de l’air. En 2011, Airparif semblait même gêné par ces conclusions et mettait en avant les relevés effectués sur un seul point de mesures bien plus affecté par le trafic routier local. Depuis Airparif n’a plus mené une telle étude…
Il faut dire que la lutte contre la pollution atmosphérique est la principale justification des politiques de restriction de la circulation automobile menées en Île-de-France en général et à Paris en particulier. Au passage, Airparif avait aussi souligné … que les endroits dans la capitale où les concentrations de particules fines sont les plus élevées sont les stations de métro et de RER…
En tout cas, une étude réalisée par l’une des plus prestigieuses universités, le Massachussetts Institute of Technology (MIT), démontre comment les particules fines et l’ozone se déplacent bien sur des milliers de kilomètres. Elle mesure l’impact qu’aurait la réduction des émissions carbonées en Chine sur la santé des Américains, des Japonais et des Sud-Coréens. Et cet impact serait non négligeable… Cette étude a été publiée par la revue scientifique Environmental Research Letters.
Si la Chine commence à réduire ses émissions de CO2 et donc les pollutions atmosphériques à partir de 2030, cela se traduira dès 2030 par entre 1.400 et 2.500 morts prématurées en moins par an aux Etats-Unis, entre 2.800 et 4.300 morts prématurées en moins par an au Japon et entre 900 et 1.600 morts prématurées en moins en Corée du sud par an. «Cela nous rappelle que la pollution ne s’arrête pas aux frontières des Etats», explique dans Scientific American Valerie Karplus, une des responsables de l’étude, professeure assistant d’économie et de management au MIT.
L’étude a utilisé des modèles informatiques qui traquent les polluants et des données sur la santé des populations. Elle s’est notamment concentrée sur les pollutions qui partent de Chine et qui ensuite se déplacent vers l’océan pacifique et les Etats-Unis. L’étude a notamment montré que les particules fines qui sont à l’origine du plus important nombre de morts prématurées en Corée du sud et au Japon voyagent moins loin que l’ozone et tendent à se diluer dans l’atmosphère quand elles arrivent aux Etats-Unis. En revanche, l’ozone reste plus dangereux et est responsable de la plupart des morts prématurées causées aux Etats-Unis par la pollution chinoise. Juste pour donner un ordre d’idée des distances parcourues par les particules fines et l’ozone, le Japon se trouve à 3.000 kilomètres de la Chine et la côte ouest des Etats-Unis se trouve à plus de 10.000 kilomètres de la Chine.