Réduire la pollution atmosphérique dans les grandes villes est une nécessité. L’automobile est en partie responsable des émissions nocives. Même s’il faut bien faire attention à ne pas réduire la pollution à la circulation. Le niveau inchangé de particules fines dans l’atmosphère de l’agglomération parisienne pendant les deux mois de confinement est venu rappeler et démontrer que les problèmes sont bien plus complexes que certains voudraient le faire croire. Se débarrasser soudain de l’essentiel de la circulation automobile ne les règle pas par un coup de baguette magique. Il y a même eu un pic de pollution aux particules fines dans la région parisienne le 28 mars!
La politique du pire
La croisade anti-voitures, quand elle est menée sans cohérence, sans stratégie et sans proposer d’alternatives crédibles et quand elle vise seulement à trouver un responsable facile à des questions complexes, n’apporte pas de solutions aux problèmes et peut même les aggraver.
Créer délibérément des embouteillages en espérant décourager ainsi les utilisateurs de voitures, la politique du pire, est une aberration. Voilà pourquoi Paris est devenu aujourd’hui la quatrième ville du monde la plus embouteillée derrière Bogota, Rio de Janeiro et quasiment à égalité avec Rome (voir le tableau ci-dessous). Selon le classement mondial Inrix, qui fait autorité, les automobilistes ont perdu en 2019, en moyenne dans les embouteillages, 191 heures à Bogota, 190 heures à Rio de Janiero, 166 heures à Rome et 165 heures à Paris. La ville de Paris a perdu trois places et se trouvait au septième rang du même classement en 2018.
Un signe fort d’inégalités sociales
Pour rappel, les embouteillages sont une nuisance considérable. Ils augmentent les niveaux de pollution, ils pèsent sur la santé des populations qui en sont victimes, ils ont un coût économique très élevé du fait du temps perdu et ils ont pour effet d’augmenter les accidents et les incidents sur les chaussées. Enfin, les embouteillages sont aussi un signe indirect et fort d’inégalités sociales. C’est ce que montre une étude publiée en 2019 par la société néerlandaise TomTom, spécialisée dans les outils de navigation automobile. Plus la vie coûte cher dans une ville, plus les populations les moins favorisées ont tendance à aller s’installer dans les banlieues et les zones périurbaines où le coût des logements et le coût de la vie sont plus faibles. Mais elles continuent souvent à venir au centre des villes pour travailler, pour rencontrer des clients, pour intervenir sur des chantiers…
Dissuader l’entrée dans l’agglomération et fluidifier le trafic
Le classement Inrix comprend plus de 975 villes dans 43 pays et sur 7 continents. Les données utilisées proviennent des systèmes GPS d’analyse du trafic installés dans les voitures dont celui de Google Waze.
La congestion automobile résulte dans les faits de nombreux facteurs, souvent locaux. Ainsi, les mauvais classements de Bogota et de Rio Janeiro, s’expliquent notamment, pour la première, par la faiblesse des transports publics et, pour la seconde, par une géographie faite d’une succession de collines traversées par un nombre limité de routes. Pour réduire la congestion, de nombreux experts expliquent qu’il faut réduire le nombre de véhicules entrant dans le centre des agglomérations et quand ils y sont entrés de fluidifier au maximum la vitesse de circulation pour qu’ils y restent le moins de temps possible. La stratégie inverse de celle qui est menée à Paris depuis des années, caractérisée par la multiplication des «pincements» de trafic…
L’exemple de Londres
Les données collectées et analysées par Inrix montrent pourtant qu’il est possible de réduire rapidement les embouteillages en rendant tout simplement coûteux l’utilisation des routes et l’entrée dans les villes et en développant les infrastructures de transport public. En doublant le péage urbain pour les véhicules anciens à haut niveau d’émissions qui souhaitent rouler dans le centre de Londres, la capitale anglaise à réduit de 13% entre 2017 et 2019 le nombre d’heures perdues en moyenne par les automobilistes. Une stratégie qui peut être contestée pour de nombreuses raisons, notamment sociales, mais qui a au moins le mérite d’être efficace sur la congestion des routes.
En France, Paris reste heureusement une exception et aucune autre agglomération n’approche son niveau d’embouteillages. La ville la plus congestionnée après la capitale, Bordeaux, compte 125 heures perdues en moyenne par an, puis on trouve Lyon avec 105 heures, Marseille 81 heures et Grenoble 76 heures.