<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Les limites du développement de l’éolien en Europe

22 janvier 2025

Temps de lecture : 4 minutes
Photo : Eolienne marine groupe MingYang DR
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Les limites du développement de l’éolien en Europe

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L’installation de nouvelles capacités de production électrique éolienne a ralenti l’an dernier en Europe. A ce rythme, les objectifs fixés par les institutions européennes et les gouvernements ne seront pas atteints prévient le lobby WindEurope. Le succès rapide de l’éolien, qui a assuré l’an dernier 20% de l’électricité produite en Europe, se heurte aujourd’hui à des obstacles à la fois météorologiques, économiques et politiques.

L’an dernier, l’énergie éolienne a fourni un cinquième de l’électricité consommée par l’Union Européenne (UE), selon des données récemment publiées par le lobby WindEurope. Un niveau sans précédent, ce qui n’empêche pas le groupe de pression de mettre en garde les gouvernements et les institutions européennes. Les nouvelles éoliennes construites en 2024 étaient loin d’être en nombre suffisant pour que l’UE ait la moindre chance d’atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée en matière d’énergie éolienne d’ici à 2030. Les capacités nouvellement ajoutées en 2024 ont été de 15 GW pour un total de 287 GW. Mais il faudrait qu’elles soient de plus du double, de 30 GW, pour atteindre les objectifs de transition énergétique.

Pour autant, selon l’agence Reuters, la production d’électricité au charbon en Europe a baissé l’année dernière l’année de 7% à 641 TWh et celle d’électricité éolienne a augmenté de 3% à 616 TWh. Si les évolutions sont les mêmes en 2025, pour la première fois une source d’énergie non fossile supplantera le charbon comme première source de production d’électricité, une étape importante de la transition. Le problème est que les objectifs fixés par la Commission européenne sont comme toujours inatteignables et irréalistes et que l’éolien n’est pas une solution miracle. Tout en offrant des avantages certains, notamment le fait d’être décarboné, cette source d’énergie présente de multiples inconvénients.

Calme plat en Allemagne pendant deux mois

L’Union européenne a fait depuis une décennie de l’énergie éolienne une priorité absolue de sa politique énergétique. Depuis la construction de parcs éoliens a été soutenue et en croissance rapide notamment dans le nord de l’Europe où la plupart des pays bénéficient à la fois de vents réguliers et pour l’éolien marin de côtes étendues et peu profondes. Mais le rythme de construction de nouvelles capacités de production ralentit.

Une situation qui illustre les limites météorologiques, économiques et politiques de l’énergie éolienne. D’abord, il s’agit d’une énergie renouvelable intermittente. Elle dépend des conditions météorologiques, c’est-à-dire du vent. C’est ce que démontre depuis deux mois l’épisode de faiblesse de la production éolienne dans le nord de l’Europe du fait d’un manque de vent et en conséquence le recours important aux centrales thermiques au gaz et au charbon. Illustration: la production éolienne a baissé l’an dernier de 8,7% en France.

Et depuis l’automne dernier, l’Allemagne connait un épisode climatique dit de « Dunkeflaute » (calme plat) ce qui se traduit par une envolée des prix de l’électricité en Allemagne et en Europe en raison de la chute brutale de production des éoliennes. En novembre, le prix horaire de l’électricité en Allemagne a atteint lors des heures de pointe plus de 800 euros par mégawattheure (MWh). Le prix horaire le plus élevé depuis la crise énergétique de 2022. Encore le 15 janvier, comme l’explique l’agence Bloomberg, la production des éoliennes allemandes était à peine de 20% de la normale et le pays a été contraint de massivement importer de l’électricité nucléaire française.

Les importateurs allemands de charbon en ont aussi profité pour faire savoir que le charbon restait vital pour l’approvisionnement énergétique du pays…

L’échec de l’appel d’offres du plus grand projet éolien marin du Danemark

Tout cela explique aussi pourquoi le modèle économique de l’éolien est de plus en plus difficile à mettre en place et les investisseurs hésitent à s’engager dans des projets d’envergure. Des pays comme le Danemark et la Suède, autrefois leaders dans l’expansion des capacités éoliennes en mer, se heurtent aujourd’hui à de multiples obstacles pour continuer à développer leurs parcs, les prix de l’électricité comme les mesures d’incitation n’étant plus à même de soutenir les nouveaux projets.

Cela tient à l’inflation des coûts de construction et au fait que que la production éolienne est souvent trop abondante ou trop faible, ce qui fait que les prix de marché sont faibles quand la production est importante. Cela contraint les gouvernements à financer les producteurs éoliens qui ont la plupart du temps des prix garantis et également à les rémunérer pour ne pas produire. Le problème est devenu celui des rendements décroissants. L’équation économique est encore plus difficile à résoudre avec 1.000 éoliennes peu rentables qu’avec 100 éoliennes. Voilà pourquoi le mois dernier, le plus grand projet éolien marin du Danemark, North Sea I, qui devait avoir une capacité de production de 6 gigawatts (GW), presque quatre fois celle de l’EPR de Flamanville, n’a reçu aucune offre lors des appels d’offre.

Le Danemark, qui bénéficie de conditions géographiques très favorables en matière de vent et de faible profondeur des mers le long de ses côtes, s’est fixé des objectifs ambitieux qu’il aura le plus grand mal à atteindre. Sa capacité éolienne marine est aujourd’hui de 2,7 GW et le gouvernement veut atteindre 14 GW d’ici 2030 pour respecter ses engagements climatiques. North Sea I devait jouer un rôle clé dans cette stratégie. Trois autres grands projets – Hesselø, Kattegat et Kriegers Flak II – seront soumis cette année à des appels d’offres…

WindEurope accuse les gouvernements d’un manque de soutien

Autre exemple frappant, celui du Royaume-Uni, qui ne fait plus partie de l’Union Européenne mais est un pays phare en matière d’énergie éolienne. Et année après année, les exploitants d’éoliennes sont de plus en plus rémunérés par le contribuable britannique notamment pour éteindre leurs turbines afin de réguler le marché de l’électricité. Et quand le pays fait face à une demande importante liée à une vague de froid, les parcs éoliens sont alors incapables de produire faute de vent.

Enfin, sur le plan politique les oppositions à l’installation de parcs éoliens ne faiblissent pas, au contraire. Et cela dans toute l’Europe, portées notamment par les partis populistes. Ainsi, le parti d’extrême-droite allemand AfD clame que s’il arrive au pouvoir il démantèlera les parcs éoliens dans tout le pays.

WindEurope a évidemment une lecture un peu différente de la situation de l’énergie qu’il défend et considère que les difficultés qu’elle rencontre sont avant tout le fait des gouvernements. Son directeur général, Giles Dickson, explique que « l’Europe ne construit pas suffisamment de nouveaux parcs éoliens pour trois raisons principales.

-La plupart des gouvernements n’appliquent pas les bonnes règles européennes en matière d’autorisation – ils doivent suivre l’exemple de l’Allemagne.

-Les nouveaux raccordements au réseau sont retardés.

-L’Europe n’électrifie pas son économie assez rapidement.

L’UE doit s’attaquer d’urgence à ces trois problèmes. Plus d’énergie éolienne signifie une énergie moins chère et donc une compétitivité accrue ».

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