Des géologues ont peut-être trouvé le moyen de se débarrasser du CO2. Des équipes de chercheurs de plusieurs universités prestigieuses ont expérimenté et validé une solution technologique prometteuse pour stocker sous terre le CO2 en le transformant en pierre. Cela fait maintenant plusieurs années que les chercheurs du projet CarbFix séquestrent et transforment en cailloux le carbone émis par une usine géothermique islandaise. Leur technologie est maintenant prête pour un déploiement à grande échelle.
Le projet CarbFix a vu le jour en 2006. Il a été lancé par Reykjavik Energy, l’Université d’Islande, le CNRS de Toulouse et le Earth Institute de l’Université de Columbia de New York. Plusieurs universités et instituts de recherche l’ont rejoint ensuite dont l’University College de Londres (UCL). CarbFix est également soutenu par l’Union Européenne.
95% du carbone transformé en minéraux
Tout le dioxyde de carbone (CO2) et le sulfure d’hydrogène (H2S) émis par l’usine géothermique de Reykjavik sont ainsi capturés et pompés dans des réservoirs situés à 500 mètres de profondeur. Ces deux gaz réagissent alors avec du basalte (roches volcaniques) et deviennent solides. «Très rapidement, nous nous sommes rendu compte que le processus était bien plus rapide que prévu, deux ans plutôt que dix ans», explique Eric Oelkers, Professeur en géologie à l’UCL et responsable du projet CarbFix, au quotidien québécois La Presse. Au bout de deux ans, 95% du carbone injecté est transformé en minéraux. Le rythme de séquestration du CO2 par Carbonfix atteint maintenant 15.000 tonnes par an. Cela signifie que cette technologie peut être déployée à une grande échelle.
«L’industrie pétrolière s’intéresse beaucoup à notre technologie, affirme Eric Oelkers. Nous sommes près d’un déploiement dans une zone du Moyen-Orient que je ne peux nommer pour le moment. Je pense qu’il y aura une annonce d’ici un an. Nous avons aussi rencontré des gens d’Airbus. Dans ces deux industries, les gens ont peur de ne plus pouvoir vendre de pétrole ou d’avions. Alors ils cherchent des solutions pour devenir neutres en matière d’émissions de carbone.»
Réussir à capturer le CO2 de l’atmosphère
CarbFix construit également des installations similaires à celle d’Islande dans quatre autres usines géothermiques de production d’électricité en Europe. Outre la géothermie, CarbFix vise également l’industrie du ciment, grande émettrice de CO2.
Mais la prochaine avancée majeure sera la captation directe du CO2 dans l’atmosphère avec un potentiel de séquestration et de transformation considérable. «Il y a assez de place en Islande pour réduire à néant les émissions humaines de CO2 prévues pour les 40 prochaines années avec notre technologie», affirme Eric Oelkers.
La technologie de CarbFix fonctionne aujourd’hui jusqu’à une concentration de CO2 de 10%. Elle est de 0,04% dans l’atmosphère… Deux jeunes sociétés, la suisse Climeworks associée à CarbFix, et la canadienne Carbon Engineering développent des technologies de capture du CO2 dans l’atmosphère et de concentration de ce même CO2. Elles progressent vite mais restent encore trop coûteuses, entre 600 et 125 dollars la tonne de CO2. Mais à CarbFix, on est convaincu que des progrès rapides sont imminents dans la capture atmosphérique du carbone et qu’alors leur technologie pourra sauver le monde…