Baisse sensible des prix des biens anciens, des mises en chantiers, des permis de construire, des offres sur le marché de la location, des travaux de rénovation énergétique… Rien ne va plus dans l’immobilier en général et le logement en particulier. D’ici 2030, la France manquera d’au moins 4 millions de logements sans parler de ceux qui sont des passoires énergétiques et qu’il faudrait remplacer. On peut parler aujourd’hui d’un effondrement de l’offre, victime à la fois d’une conjoncture défavorable avec l’augmentation des taux d’intérêts et des restrictions de crédit et d’un carcan de taxes et de réglementations inefficaces et tentaculaires dont les pouvoirs publics se refusent à admettre les effets pervers.
La crise française de l’immobilier est profonde. Elle est un élément aujourd’hui du mal français. Elle a et aura de lourdes conséquences sociales, politiques et sur la transition énergétique. Mais qui le reconnait et s’en préoccupe vraiment ? Le logement est un facteur majeur du niveau de vie des ménages. Ils y consacrent en moyenne un tiers de leur budget. L’immobilier génère directement et indirectement pas moins de 10% du PIB (Produit intérieur brut) et 9% des emplois. En matière de transition énergétique, le secteur du bâtiment représente 44% de la consommation finale d’énergie et 27% des émissions de gaz à effet de serre du pays.
Choc réglementaire et fiscal
Le krach de l’immobilier se traduit par une baisse rapide et de grande ampleur des constructions de logements neufs, par une baisse des prix de l’ancien qui freine considérablement les transactions, par un recul soudain des travaux de rénovation énergétique avec une dégringolade de 40% des demandes d’aides MaPrimRénov‘ et par un affaiblissement du tissu économique des artisans et petites entreprises du secteur de la construction et de la rénovation. Il faut y ajouter l’envolée des taux d’intérêt et la chute de la distribution de crédits et un choc réglementaire et fiscal qui frappe tout particulièrement le logement. La suppression de la taxe d’habitation s’est traduite dans bon nombre de villes par une véritable explosion de la taxe foncière. Et puis les errements et la confusion autour des aides à la rénovation énergétique associé à la volonté dans le même temps de limiter l’artificialisation des sols qui pèse sur la construction ont amplifié les craintes des acheteurs comme des investisseurs. Le marasme risque de perdurer. D’autant plus, que par nature la transition ne peut que renchérir les prix du foncier et le coût de la construction. Ce n’est pas pour rien si le premier promoteur français, Nexity, vient d’annoncer un plan de sauvegarde de l’emploi.
Cette crise a en tout cas d’ores et déjà un impact sur le marché locatif. Dans l’incapacité de réaliser leurs projets d’acquisition, les ménages ont tendance à rester locataires. Conséquence : selon une étude du site Seloger, le nombre de locations offertes a baissé de 36% en deux ans tandis que la demande est toujours plus forte. Cinq données illustrent l’ampleur de la crise.
Prix de l’ancien
Le dernier indice Notaires- Insee, publié il y a deux semaines, montre que la baisse des prix de l’ancien prend de l’ampleur. Selon cet indicateur, ils ont reculé de 4 % durant l’année 2023. Toutes les catégories de biens sont affectées, les appartements (4,1 %) comme les maisons (3,8 %). La baisse touche aussi désormais l’ensemble du territoire même si elle est plus sensible en Île-de- France (-6,9 %) par rapport à la moyenne des autres régions (-2,9%).
Demande de neuf
Selon une étude publiée le 29 février par Particulier à Particulier l’immobilier neuf, la demande est en chute libre. « La demande sur le marché de l’immobilier neuf connaît une forte contraction cette année, avec une baisse notable de 32,6 % de la demande globale ». Du côté de l’acquisition d’une résidence principale, le recul est de 29,1% et il atteint 44,1% pour les investisseurs touchés de plein fouet en 2023 par la suppression progressive du dispositif Pinel offrant un gros coup de pouce fiscal pour l’achat d’un logement neuf destiné à la location.
Nombre de permis de construire
Sur l’ensemble de l’année 2023, 373.100 logements ont été autorisés à la construction, une baisse de près de 25%, soit 115.900 permis de construire de moins que lors de l’année 2022. Les autorisations pour les logements individuels ont baissé de près de 30%, soit une perte de 56.700 logements. Du côté des logements collectifs, le recul atteint 20%, ce qui représente une baisse de près de 60.000 logements.
Nombre de chantiers
Le nombre de chantiers commencé a fortement reculé l’an dernier, de 22%, au point d’atteindre, pour le logement individuel, le plus bas niveau depuis l’année 2000. La pose de la première pierre a ainsi concerné 287.100 logements en 2023. C’est 80.800 de moins qu’en 2022. Les besoins s’élèvent pourtant à au moins 450.000 logements neufs par an, en raison de l’évolution de la démographie et des modes de vie, de la recomposition des familles, des exigences de rénovation.
Pertes d’emplois
Selon la Fédération française du bâtiment et la Fédération des promoteurs immobiliers, la crise pourrait faire perdre jusqu’à 300.000 emplois dans la construction d’ici à 2025…