<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Ce que l’élection de Joe Biden signifie pour l’énergie aux Etats-Unis

12 novembre 2020

Temps de lecture : 4 minutes
Photo : Joe Biden 2 Wikimedia Common
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Ce que l’élection de Joe Biden signifie pour l’énergie aux Etats-Unis

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L'administration Biden devrait avoir une politique énergétique très différente de celle de l'administration Trump. Elle devrait notamment être beaucoup moins favorable à l'industrie pétrolière et gazière et favoriser le solaire, l'éolien et les véhicules électriques. Mais tout va dépendre notamment de la capacité des démocrates à prendre le contrôle du Sénat.

L’élection de Joe Biden à la présidence des Etats-Unis aura des conséquences très importantes sur le secteur de l’énergie aux Etats-Unis et sur la façon dont la transition sera menée. Même si sa capacité à agir dépendra pour beaucoup du fait que les démocrates aient le contrôle ou non du Sénat américain.

Rappelons que les Etats-Unis sont le deuxième consommateur d’énergie au monde (16,2% en 2019), après la Chine (24,3%). Le mix énergétique américain est encore très fortement dépendant des énergies fossiles. Elles ont compté pour 91,5% de la consommation d’énergie primaire des États-Unis en 2019 selon le BP Statistical Review of World Energy (contre 84,3% en moyenne dans le monde).

Les émissions américaines de CO2 liées à l’énergie, étaient d’environ 5 milliards de tonnes en 2019 (soit 14,5% du total mondial, contre 28,8% pour la Chine). Le gaz naturel a dépassé au premier semestre 2020 le pétrole comme première source d’énergie dans le pays selon l’Energy Information Administration. Par ailleurs, en 2019 les énergies renouvelables ont dépassé le charbon dans le mix de consommation d’énergie primaire des États-Unis pour la première fois depuis 1885.

Pendant sa campagne, Joe Biden s’est engagé à investir massivement, 1.700 milliards de dollars en quatre ans, pour accélérer le remplacement des énergies fossiles et réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il a aussi promis d’interdire la fracturation hydraulique sur les territoires fédéraux, ce qu’il peut faire par des décrets présidentiels (exécutive orders) sans recours au Congrès. Une telle décision limitera les possibilités de nombreuses compagnies d’exploiter le pétrole et le gaz de schistes dans plusieurs Etats dont le Nouveau Mexique.

La fin du nouvel âge d’or pour le pétrole et le gaz naturel

Les Etats-Unis sont un Etat pétrolier. A la surprise générale et grâce à la rupture technologique qui depuis 2014 a permis l’exploitation massive du pétrole du schiste, ils sont même redevenus, 50 ans plus tard, le premier pays producteur de pétrole au monde. En 2019, les États-Unis ont compté pour 17,9% de la production mondiale de pétrole et pour 23,1% de la production mondiale de gaz naturel. Les États-Unis ont aussi exporté plus d’énergie qu’ils n’en ont importé en 2019, pour la première fois depuis 1952. Le pays est notamment exportateur net de gaz naturel liquéfié (GNL).

Mais le nouvel âge d’or de l’industrie pétrolière et gazière américaine n’aura pas duré bien longtemps. L’effondrement de la demande depuis le début de la pandémie et la baisse des cours du baril ont détruit le modèle économique d’une exploitation coûteuse par nature.

Et Joe Biden ne devrait plus apporter le soutien inconditionnel qui était celui de Trump aux compagnies pétrolières. Il devrait bloquer tous les permis permettant de forer sur les territoires fédéraux et renforcer la législation sur les normes environnementales et les émissions que l’administration Trump avait allégé. Cela devrait augmenter le coût de la production, de la transformation et du transport des hydrocarbures.

Dans le même temps, l’administration Biden va favoriser les véhicules électriques au détriment des motorisations thermiques ce qui devrait avoir un impact sur la demande d’essence et de diesel. L’administration Biden devrait aussi s’en prendre au développement du gaz de schiste avec son intention de rendre «propre» l’ensemble de la production d’électricité d’ici 2035.

Il reste néanmoins que le plan de relance massif de l’économie américaine promis par Joe Biden pour sortir de la récession créée par l’épidémie de Covid-19 devrait se traduire par une demande plus forte de produits pétroliers et gaziers.

L’avenir des exportations de gaz naturel liquéfié

Le programme du nouveau président ne mentionne pas directement le gaz naturel liquéfié (GNL). Mais son administration devra approuver ou non la construction programmée de nouveaux gazoducs et de nouveaux terminaux permettant d’augmenter les exportations de gaz. L’industrie du gaz américaine pourrait même profiter à cour terme de l’amélioration des relations entre les Etats-Unis et la Chine et les Etats-Unis et l’Europe qui permettraient d’augmenter les exportations de gaz de schistes vers des pays qui entendent diversifier leurs sources d’approvisionnement. D’autant plus, qu’un peu partout dans le monde les centrales à gaz remplacent celles fonctionnant au charbon.

Doper les renouvelables

L’un des changements majeurs en terme d’énergie de Joe Biden par rapport à Donald Trump est la volonté annoncée de promouvoir le développement de la production d’électricité à partir de renouvelables. Il a promis durant la campagne d’éliminer les émissions de CO2 liées à la production d’électricité d’ici 2035. Cela s’est déjà traduit notamment par l’appétit des investisseurs à Wall Street pour les actions de sociétés impliquées dans l’énergie solaire et éolienne.

Accélérer le déclin du charbon

L’administration Biden devrait accélérer le déclin du charbon, qui est déjà commencé aux Etats-Unis depuis plusieurs années, et a permis d’ailleurs au pays d’enregistrer une baisse des émissions de gaz à effet de serre y compris sous l’administration Trump.

La production d’électricité devrait continuer à basculer du charbon vers le gaz naturel et les renouvelables. Le charbon devrait avoir représenté en 2020 environ 19%  de la production électrique américaine contre plus de 50% en 2006.

Accords commerciaux avec le Mexique

L’élection de Joe Biden pourrait aussi changer la donne pour le président du Mexique Andrés Manuel López Obrador qui a pris des positions très nationalistes dans le domaine de l’énergie. Il a mis fin à de nombreux projets menés par des entreprises étrangères dans le pétrole et l’électricité et a annoncé son intention de faire réviser la constitution pour revenir sur les privatisations de ses prédécesseurs. Mais le président mexicain ne peut plus compter sur la bienveillance de son allié politique Donald Trump. Ce qu’il fait est en violation du traité commercial USMCA signé entre les Etats-Unis, le Mexique et le Canada.

Ethanol et agriculture

Joe Biden pourrait aussi revenir sur les dérogations données par l’Agence américaine de protection de l’environnement (EPA) aux raffineries sur la norme américaine concernant les carburants renouvelables. Cela devrait favoriser les biocarburants et notamment l’éthanol et soutenir les cours du maïs et du soja. La norme pour l’utilisation des biocarburants sera par ailleurs révisée en 2023. L’EPA devra décider de la quantité d’éthanol et de biodiesel mélangée aux carburants à base de pétrole, ce qui aura évidemment des conséquences sur l’agriculture américaine et les usines produisant l’éthanol. Pendant sa campagne, Joe Biden a promis de soutenir les agriculteurs en les faisant profiter de la transition énergétique.

 

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