Cela fait de nombreuses années que le terme d’investissement durable et responsable sature les campagnes de communication des établissements financiers et les articles de la presse financière. Les fonds d’investissement, offrant la possibilité aux investisseurs et aux épargnants de sélectionner des entreprises «vertes» et «vertueuses», se sont multipliés. L’investissement durable et/ou responsable s’est ainsi imposé dans le débat public et les médias au même titre que la responsabilité environnementale et sociale des entreprises.
Pour autant, derrière les slogans la réalité est moins reluisante comme le montre un article récent du magazine Forbes et plusieurs études. Celle réalisée par le gestionnaire de fortune britannique Canaccord Genuity Wealth Management montre que si 76% des personnes disposant d’une fortune supérieure à 1 million de livres (1,1 million d’euros) croient au développement durable, elles sont seulement 12% à investir dans des sociétés ou des fonds qui ont une réputation «respectable» en matière environnementale et sociale… Une autre étude réalisée par OppenheimerFunds permet d’ajouter que ce n’est pas une question de génération. Seuls 14% des investisseurs de la génération «millennials» (nés entre 1980 et 2000) sont intéressés par un placement dans le développement durable.
Les investisseurs institutionnels ne font pas beaucoup mieux. Une étude de l’UBS réalisée l’an dernier montre que si 65% des grands investisseurs se disent concernés par les questions de durabilité, seulement 39% ont dans leurs portefeuilles des lignes s’inscrivant dans cette logique. Et ce n’est pas un problème de performance des investissements. De nombreuses études, dont celle de l’UBS, prouvent que le retour sur investissement dans le développement durable est au moins aussi performant que les investissements dits normaux.
Gadget de communication
Le problème essentiel, selon Forbes, tient à la qualité et la fiabilité de l’information disponible. D’abord, de nombreux investisseurs ne sont pas bien informés des performances de l’investissement dans le développement durable. Mais plus encore, la plupart ne croient pas et se méfient des discours et des campagnes des grandes entreprises qui mettent en avant leur souci de la durabilité et de l’environnement. Le «greenwashing» (habillage en vert) des communications et des slogans publicitaires a des effets pervers.
La confusion est d’autant plus grande que tous les établissements financiers ou presque, les agences de ratings, les gestionnaires de fonds et de fortune veulent que leur marque soit étroitement associée à ses valeurs à la mode. Il faut y ajouter le nombre incalculable d’indices, de notations, de labels, de catégories… qui permettraient de distinguer les entreprises qui sont réellement dans le développement durable, dans le socialement responsable, dans les énergies propres…
Pour résumer, l’investissement dans le développement durable et responsable a aujourd’hui un sérieux problème de crédibilité. Il est souvent perçu comme un gadget de communication. Et pourtant, la transition énergétique ne se fera pas sans des investissements massifs et sans la mobilisation de l’épargne privée.