C’est l’une des plus importantes industries de la planète. Elle existe depuis 160 ans et emploie directement et indirectement des dizaines de millions de personnes. Mais entre les contraintes environnementales, réglementaires, technologiques, économiques, une conjoncture difficile et des surcapacités de production, elle cherche aujourd’hui fébrilement des stratégies de survie…
Cette industrie mature est confrontée en même temps à une baisse mondiale de la demande et de sa rentabilité et à la nécessité pour passer à l’électrique et éventuellement à l’hydrogène à investir massivement. Plus de 300 nouveaux modèles de voitures électriques doivent être lancés d’ici à 2021 sans aucune certitude sur leur potentiel de ventes. Une équation presque impossible.
Conséquence,pour la première fois de son histoire BMW a décidé de ne pas renouveler le mandat de son PdgHarald Krüger. Et ce n’est pas une question d’âge…, il n’a que 53 ans. Sa stratégie n’a pas rassuré les actionnaires du constructeur bavarois. Depuis plusieurs mois, les annonces d’alliances se multiplient y compris entre des marques et des entreprises qui sont des concurrentes acharnées depuis des décennies. Ainsi BMW et Daimler (Mercedes Benz) ont annoncé s’associer pour développer des voitures autonomes. Volkswagen a conclu une alliance du même type avec… Ford. General Motors s’est associé dans le même domaine à Honda et Toyota à Subaru. Quand au projet de rapprochement entre Renault et Fiat Chrysler, il n’a duré que quelques jours, mais les chances de survie de Fiat Chrysler, si le groupe reste seul, sont faibles selon les analystes. Tout comme celles d’ailleurs de Jaguar Land Rover voire de PSA.
Le cabinet spécialisé AlixPartners a rendu public à la fin du mois de juinune étude approfondie sur l’industrie automobile. Son pronostic est que d’ici 5 à 6 ans, entre 40 à 60 usines dans le monde sont menacées de fermeture. Des marques vont disparaître. Ford a annoncé il y a quelques jours la suppression de 12 000 emplois et la fermeture de six usines d’ici la fin de l’année 2020. Seize usines automobiles ont été fermées dans le monde au cours des trois dernières années et 120 000 emplois perdus. Et ce n’est qu’un début. Les surcapacités de production sont évaluées à 30%. Du côté de la conjoncture, le marché automobile mondial devrait baisser dans les deux prochaines années avec un creux en 2020 à 91 millions de voitures (moins 5 millions par rapport à 2018).
Dans le même temps, les constructeurs sont condamnés à investir massivement. AlixPartners évalue à 186 milliards de dollars les investissements annuels en recherche et développement des constructeurs automobiles, auquel il faut ajouter les 225 milliards programmés pour les véhicules électriques entre 2019 et 2023 et les 85 milliards pour la voiture autonome.. Comment investir de telles sommes sans pouvoir prévoir les retours sur investissements.
La conversion à marche forcée vers les motorisations électriques est un saut dans l’inconnu. Non seulement, il n’est pas sûr que les consommateurs achèteront massivement les nouveaux modèles, mais les constructeurs dépendent aujourd’hui pour les batteries, un composant essentiel du véhicule, de fabricants chinois et japonais. Par ailleurs, la technologie électrique réduit considérablement les marges et les besoins en pièces.
Mais les constructeurs européens n’ont pas vraiment le choix. Ils devront respecter dès 2020 un seuilmoyen de 95 grammes de dioxyde de carbone (CO2) par kilomètre pour leur gamme selon les normes fixées par l’Union Européenne. Beaucoup en seront incapables et paieront des centaines de millions d’euros d’amendes. L’industrie automobile européenne est menacée aujourd’hui de perdre ses avantages de compétitivité qui en ont fait la première au monde.