Les importations massives de gaz russe par les pays européens sont censées appartenir au passé, depuis l’invasion il y a trois ans de l’Ukraine et plus encore depuis le sabotage dans la mer Baltique des gazoducs NordStream 1 et NordStream 2 et la fermeture le 31 décembre dernier du dernier gazoduc important reliant la Russie à l’Europe via l’Ukraine. Pour autant, les besoins de gaz par les pays européens, même s’ils ont diminué, restent considérables.
Voilà pourquoi l’Europe est devenue depuis la crise énergétique de 2022 le principal moteur du commerce mondial de GNL (Gaz naturel liquéfié). Et si l’Europe a réduit de 19% ses importations de GNL l’an dernier par rapport à 2023, elle a augmenté celles provenant de Russie. De plus, à nouveau depuis la fin de l’année dernière, les pays de l’Union Européenne (UE) achètent un grand nombre de cargaisons pour garantir leur approvisionnement au cours d’un hiver plus rigoureux que les années précédentes. Au point d’ailleurs que les réserves de gaz ont diminué rapidement. Elles étaient remplies en moyenne dans les pays de l’UE à la date du 14 février, selon les données de la plateforme Aggregated Gas Storage Inventory, à 45%. Un niveau très inférieur aux 66% à la même date un an auparavant.
Le terminal de Dunkerque a réceptionné 27% des importations européennes de GNL russe
En tout cas, la France, un des pays européens les mieux équipés en terminaux de GNL, a vu ses importations de GNL russe augmenter de pas moins de 81% entre 2023 et 2024 qu’elle a payé 2,68 milliards d’euros à Moscou, selon les données publiées le 18 février par l’IEEFA (Institute for Energy Economics and Financial Analysis).
Les principaux pays importateurs de GNL en Europe en 2024 ont été la France (19% du total), les Pays-Bas (14%), l’Espagne (13%), l’Italie (11%), la Turquie (9%), le Royaume-Uni (8%), la Belgique (6%), l’Allemagne (5%) et la Pologne (5%). Toujours l’an dernier, 46% des importations européennes de GNL provenaient des États-Unis, 16% de Russie, 11% d’Algérie, 10% du Qatar, 5% de Norvège et 4% du Nigeria. Les importations de GNL russe ont augmenté de 12% l’an dernier.
Le seul terminal du port de Dunkerque a réceptionné l’an dernier 27% des importations européennes de GNL russe. Le GNL qui est liquéfié puis embarqué dans des méthaniers est à l’arrivée dans le port de destination regazéifié via des terminaux spécifiques et injecté dans le réseau européen de gaz.
Cinq terminaux pétroliers de GNL en France
Cette dépendance de fait au GNL russe tend très incertain l’objectif de la Commission européenne de se passer totalement du gaz russe d’ici 2027. D’autant plus que la baisse de consommation de gaz liée à l’amélioration de l’efficacité énergétique et aussi à la désindustrialisation a des limites. La France a ainsi réduit sa consommation de 20%, mais depuis 2024 la demande ne baisse plus.
La France possède en tout cinq terminaux pétroliers de regazéification et sert ainsi de portes d’entrée pour plusieurs pays européens, notamment l’Allemagne faiblement équipée en terminaux de GNL. Elle n’en avait même aucun avant 2022. Berlin dans sa stratégie de liens toujours plus étroits avec la Russie via les gazoducs NordStream avait renoncé à se doter de tout équipement permettant l’importations de GNL. Voilà pourquoi 85% des importations de GNL russe en Europe arrivent par la France, l’Espagne et la Belgique. Pour ce qui est de l’approvisionnement français direct en GNL : un tiers est russe, un tiers est américain et 17% vient d’Algérie.