Les compagnies aériennes comme les constructeurs d’avions se sont engagés à diviser par deux en 2050 leurs émissions de gaz à effet de serre par rapport à 2005. Même si le transport aérien ne représente, d’après les statistiques de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qu’à peine 3% des émissions mondiales de CO2 et environ 12% de la pollution provenant des transports, il est devenu une cible privilégiée des écologistes. Greta Thunberg a montré la voie en étant à l’origine du mouvement du «flygskam», «la honte de voler» en suédois.
Cela dit les technologies permettant de limiter les émissions des avions sont difficiles à développer et loin d’être matures. Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a bien annoncé le 8 juin, en présentant le plan de soutien de 15 milliards d’euros au transport aérien, qu’il fallait «parvenir à un avion neutre en carbone en 2035». Mais c’est un engagement construit sur aucune certitude et aucun fondement.
Continuer à réduire la consommation des avions et passer ensuite à l’hydrogène
Les progrès les plus immédiats et les plus réalistes consistent à continuer à réduire la consommation des appareils, ce qui est déjà le cas depuis de nombreuses années. L’efficacité énergétique du transport aérien a progressé de 3,2% par an entre 2000 et 2014, toujours selon l’AIE.
Des progrès importants peuvent encore être réalisés avec des matériaux allégés, des biocarburants ou des carburants synthétiques. Les constructeurs travaillent aussi sur des modèles très différents de ceux existants. Airbus a dévoilé en février 2020 son projet Maveric, un modèle réduit d’aile volante qui a «le potentiel pour réduire jusqu’à 20% la consommation de carburant par rapport aux avions actuels».
Mais la vraie rupture proviendrait d’une technologie permettant de se passer totalement de carburants émettant du CO2. L’avion électrique à batteries a un avenir très limité compte tenu notamment du poids et du potentiel d’autonomie des batteries. En revanche, utiliser de l’hydrogène vert, c’est-à-dire fabriqué par électrolyse avec de l’électricité renouvelable, comme carburant, semble une bien meilleure solution. Au moins en théorie.
L’élément essentiel est la densité énergétique
Dans un article publié par Aeronautics Online, Valery Miftakhov de ZeroAvia, une société qui développe des motorisations à hydrogène pour les avions, souligne les avantages de cette forme d’énergie. Elle ne génère pas d’émissions et surtout a une bien plus grande densité énergétique que les batteries lithium-ion, ce qui est essentiel pour un appareil valant.
Ainsi, par exemple, les batteries d’une voiture Tesla Model 3, ont une densité énergétique de 160 Watts heure (Wh) par kilo, une des meilleures de l’industrie. En comparaison, une société californienne, HyPoint, fabrique une motorisation électrique alimentée à l’hydrogène via une pile à combustible ayant une densité de 530 Wh par kilo. HyPoint travaille sur une nouvelle version ayant une densité de 960 Wh par kilo. Et selon, Valery Miftakhov, un système à pile à combustibles doit pouvoir atteindre une densité de 3.000 Wh par kilo.
La densité énergétique est un élément essentiel pour faire voler un avion, car plus l’énergie stockée est importante par rapport au poids transporté plus longtemps l’avion peut voler et plus de passagers ou de marchandises il peut emporter.
«On peut très bien imaginer des taxis aériens avec des autonomies de plus de 1.000 kilomètres ce qui peut aussi personnaliser le transport aérien régional», explique sur le site Oilprice.com Berkant Göksel, co-fondateur de la société Electrofluidsystems. Et ces appareils pourraient être très rapides en utilisant notamment la technologie de réacteurs au plasma fonctionnant avec de l’hydrogène.
ZeroAvia cherche plutôt à utiliser des piles à combustible fonctionnant aussi à l’hydrogène mais pour alimenter des moteurs électriques afin de développer de petits aéronefs pour des vols de moins de 800 kilomètres. Elle doit réaliser des premiers essais cette année à partir d’un avion de tourisme classique de six places modifié.
A Singapour, la société HES Energy Systems est encore plus ambitieuse avec son projet Element One lui aussi à pile à combustible (voir l’image ci-dessus). Il pourrait transporter jusqu’à quatre passagers sur des distances allant de 500 à 5.000 kilomètres. Le premier prototype devrait voir le jour en 2025.