Sans surprise, l’Ukraine a décidé de ne pas renouveler le contrat qui permet le passage sur son territoire du gaz russe vers les pays européens. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s’est montré catégorique le 27 août : « personne ne va prolonger l’accord avec la Russie, c’est fini ». Le contrat expire le 31 décembre 2024. Le gaz est transféré via le dernier gazoduc d’importance encore en service, après le sabotage des Nord Stream 1 et 2, qui permet l’achat par les pays européens de gaz russe, en-dehors des cargaisons par bateaux qui sont liquéfiées (GNL).
C’était même devenu une incongruité de savoir que depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, les deux pays continuaient à faire comme si de rien n’était. L’an dernier, 14 milliards mètres cubes de gaz russe avaient transité via le territoire ukrainien. L’Autriche, la Hongrie, la Slovaquie et l’Italie en sont les principaux bénéficiaires. Une situation encore plus ubuesque depuis que les soupçons ne cessent de grandir sur l’origine ukrainienne du sabotage en septembre 2022 des gazoducs Nord Stream 1 et 2 entre la Russie et l’Allemagne.
Pour le Kremlin, le consommateur européen paiera
Pour le porte-parole du Kremlin, Dmitry Peskov, cela portera « gravement atteinte aux intérêts des consommateurs européens, qui sont toujours disposés à acheter davantage de volumes de gaz russe garanti et abordable, moins cher que le gaz provenant d’autres sources, en particulier des États-Unis. Les consommateurs européens devront payer le gaz beaucoup plus cher, ce qui rendra leurs industries moins compétitives ».
La Russie envisage de faire emprunter d’autres itinéraires pour ses livraisons de gaz à l’Europe, y compris avec un projet de création d’une plate-forme en Turquie, a ajouté Dmitry Peskov. Mais l’Union européenne a dit vouloir s’affranchir de toute importation de gaz naturel russe d’ici 2027.
Gazprom en grandes difficultés
Les exportations russes de gaz vers l’Europe se sont effondrées depuis l’invasion de l’Ukraine mettant le géant Gazprom en difficulté. Ces exportations de gaz vers l’Europe via des gazoducs ont diminué de 55,6% l’an dernier par rapport à 2022 à 77.6 millions de mètres cubes par jour en moyenne contre 174.8 millions de mètres cubes. Pour la première fois depuis 23 ans, Gazprom a enregistré des pertes en 2023 qui se montent à 6,9 milliards de dollars.
Par ailleurs, la perspective de voir la Russie exporter en Chine le gaz qui n’est plus vendu en Europe reste lointaine. Avant la guerre, la Russie fournissait environ 40% des besoins de gaz de l’Europe. Des livraisons qui ont été en partie compensées par une augmentation de la production de la Norvège et par un recours important au Gaz naturel liquéfié (GNL) américain et qatari.
Peu de risques de pénuries
Quant au risque de pénurie de gaz en Europe à l’hiver prochain, il est relativement limité. L’Union européenne a déjà atteint un niveau supérieur à 90% de remplissage de ses capacités de stockage de gaz, a indiqué le 21 août dernier la Commissaire européenne à l’Énergie Kadri Simson. Depuis l’invasion de l’Ukraine les pays européens sont désormais tenus d’atteindre un niveau de remplissage de leurs stocks de gaz naturel d’au moins 90% au plus tard le 1er novembre de chaque année.
Maintenant, les sites de stockage de gaz couvrent globalement 25 à 30% de la demande gazière de l’UE en hiver. Et si ce dernier est exceptionnellement froid et les approvisionnements compliqués, l’Europe n’est pas totalement à l’abri. Et cela même si sa consommation de gaz a beaucoup baissé depuis 2022.