L’Union européenne (UE) ne cesse de perdre du terrain en termes de compétitivité, de technologie, de potentiel industriel et même de richesse par habitant face aux Etats-Unis et de plus en plus à la Chine. Et bientôt, ce sera au tour de l’Inde de devenir un sérieux concurrent. Le rapport Draghi, que la Commission européenne s’est empressée d’oublier, souligne le fait que le principal handicap de l’Europe est le coût de l’énergie.
Et compte tenu d’une stratégie de transition énergétique construite à partir des renouvelables éolien et solaire et des véhicules électriques et d’une guerre froide de fait avec la Russie, fournisseur naturel d’énergie à l’Union Européenne, il ne peut que continuer à augmenter et à appauvrir l’UE. Comment alors régler le problème de souveraineté et d’approvisionnement en énergie et en matières premières de l’Europe ? Le magazine The Economist a la réponse. Il faut que le Canada devienne membre de l’Union Européenne… « L’Europe a besoin d’espace et de ressources. Le Canada a besoin de population. Négocions».
La grande peur de Donald Trump
Evidemment, les obstacles de tous ordres ne manquent pas. Mais l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump dans deux semaines est le meilleur des arguments. Car comme l’explique The Economist, pour faire face à la déferlante qui s’annonce, commerciale, économique et politique, l’Europe et le Canada ont besoin d’alliés.
Illustration, les pays qui se trouvent aux marges de l’Union européenne, et en dépit de ses errements économiques et politiques, veulent resserrer leurs liens avec le club, faute d’autres solutions. La Suisse a accepté une alliance plus étroite et l’Islande organisera un référendum en 2027 sur son adhésion. Le Groenland, qui a quitté l’UE en 1985 après avoir obtenu l’autonomie du Danemark, pourrait envisager de la rejoindre à nouveau, compte tenu de l’obsession de Donald Trump à son égard. Et le Canada est encore plus inquiet. Le futur Président des Etats-Unis en a fait une cible de choix lui promettant une augmentation massive des droits de douane, annonçant qu’il est sur le point de devenir le 51ème État américain et qualifiant son Premier ministre de « gouverneur Justin Trudeau ». Donald Trump a même été encore plus loin le 6 janvier après l’annonce par Justin Trudeau de sa décision de démissionner en répétant que les Etats-Unis et le Canada devaient « fusionner ».
Le Canada fonctionne de fait comme un pays européen et a beaucoup de pétrole, de gaz et d’énergie hydraulique
Tout cela pourrait prêter à sourire. Mais la thèse de The Economist est loin d’être absurde. Le Canada est vaste et doté de considérables ressources naturelles tout en étant relativement peu peuplé, tandis que l’Union européenne est petite, exiguë et pauvre en ressources minérales.
Les règles de l’UE réservent l’adhésion aux « États européens ». Mais pour The Economist, « les Canadiens peuvent être considérés comme des Européens honoraires. Le pays a connu trois vagues de colonisation en provenance du vieux continent, à commencer par une brève incursion des Vikings. Comme les Européens, les Canadiens pensent que les marchés fonctionnent, mais qu’ils doivent être tempérés par des États-providence. Leurs gouvernements proposent des solutions similaires à leurs citoyens : des impôts élevés, une politique parlementaire désordonnée et un bon niveau de vie pour la quasi-totalité de la population. Les deux entités font ouvertement du commerce, s’inquiètent du réchauffement climatique et n’aiment pas les armes à feu, la peine de mort et l’agression russe »…
Et puis surtout le Canada possède beaucoup de pétrole, de gaz et d’énergie hydraulique. La France y verrait l’occasion d’accueillir un nouveau membre francophone avec le Québec. Et puis cela permettrait au roi Charles III, le chef d’État canadien, de redevenir membre de l’UE, ce qui consolerait un peu ceux qui pleurent encore le Brexit.
Commencer par importer du GNL canadien
Plus sérieusement et en matière d’énergie, il y a beaucoup à faire entre l’Europe et le Canada. Le gaz canadien ne peut pas atteindre les côtes européennes en raison d’un manque d’infrastructures de transport de GNL (Gaz naturel liquéfié). Pour les pays européens, dépendre un peu plus du gaz canadien présente beaucoup moins de risques politiques que de dépendre des fournisseurs américain et qatari. L’accord commercial entre le Canada et l’UE, promulgué en 2017, est en théorie le plus ambitieux de l’Union, mais il reste d’application « provisoire ». Et dix pays de l’Union doivent encore ratifier ses mesures les plus ambitieuses. À défaut de faire du Canada un pays européen, il faudrait peut-être commencer par entériner cet accord.