Le soleil et le vent sont des énergies renouvelables et propres. Mais fabriquer de l’électricité en les utilisant n’est pas bon pour l’environnement. Il s’agit d’une contradiction difficile à surmonter. La croissance «verte» est très souvent présentée comme le moyen de concilier la transition énergétique et le renoncement aux énergies fossiles avec le progrès économique et social. Le problème, souligne un article de Foreign Policy, est que les énergies propres ne le sont pas et font de sérieux dommages à l’environnement.
«Tandis que le soleil et le vent sont évidemment propres, l’infrastructure dont nous avons besoin pour les capturer ne l’est pas. On en est même très loin. La transition vers les renouvelables va nécessiter un accroissement dramatique de l’extraction de métaux et de terres rares avec de réels coûts écologiques et sociaux… Aucune énergie n’est innocente. La seule et vraie énergie propre est moins d’énergie», écrit Foreign Policy.
En 2017, la Banque Mondiale a rendu public un petit rapport, qui avait alors peu attiré l’attention, sur les conséquences de la construction d’infrastructures permettant la production de 7 terawatts (10 puissance 12 watts) d’électricité dans le monde d’ici 2050. Cela permettrait, en gros, de fournir la moitié de l’électricité nécessaire à la planète.
Cuivre, plomb, zinc, aluminium, fer, Néodyme, Indium, argent, lithium, Dysprosium…
Foreign Policy considère que pour parvenir à zéro émissions de gaz à effet de serre avec la production d’électricité, il faut environ doubler les chiffres calculés par la Banque Mondiale et cela donne des ordres de grandeur pharamineux. Il faudrait 34 millions de tonnes de cuivre, 40 millions de tonnes de plomb, 50 millions de tonnes de zinc, 162 millions de tonnes d’aluminium et pas moins de 4,8 milliards de tonnes de fer.
Dans certains cas, la transition vers les renouvelables demandera une augmentation massive de l’extraction de matériaux «exotiques» comme par exemple le Néodyme, une terre rare, un élément essentiel des turbines des éoliennes. Cela sera le cas aussi, autre exemple, pour l’Indium, indispensable aux panneaux solaires, et même pour l’argent.
Et tout cela sans tenir compte des batteries lithium-ion qui stockeront l’électricité «propre» quand le soleil ne brille pas et quand il n’y a pas de vent. Cela représente 40 millions de tonnes de lithium. Et cela ne concerne que la production d’électricité. Car il faut prendre en compte également la production et le fonctionnement des véhicules électriques.
Dans une lettre ouverte rendue publique en juin, un groupe de scientifiques britanniques de grande réputation a alerté la Commission britannique sur le changement climatique de l’impact écologique des voitures électriques. Ils ne remettent pas en cause la nécessité de se passer des engins à moteurs thermiques, mais ils affirment que remplacer les 2 milliards de véhicules existant sur terre va nécessiter une explosion des activités minières. Ils estiment que l’extraction de Néodyme et de Dysprosium devra augmenter de 70% d’ici 2050 pour la seule voiture électrique tout comme les besoins en cuivre qui vont doubler et ceux en cobalt qui vont quadrupler.
Le problème n’est pas le manque potentiel de minéraux et de métaux, il y en a suffisamment, mais les conséquences sur les écosystèmes et sur la déforestation du développement intensif des exploitations minières. La plupart des ressources se trouvent en Amérique latine, en Afrique et en Asie.
Foreign Policy considère que l’électricité nucléaire peut permettre de réduire un certain nombre de ses problèmes et doit être un élément de l’équation. Mais cette source d’énergie a ses propres contraintes. Notamment l’importance des investissements et des délais pour construire des centrales et le problème ensuite du retraitement des déchets. Tout cela contribue au fait que l’électricité d’origine nucléaire ne pourra sans doute pas représenter plus de 1 terawatt à l’horizon 2050 selon le Bulletin of the Atomic Scientists.
La conclusion de Foreign Policy est simple. Pour réussir, la transition énergétique nécessite en parallèle une baisse sensible de la consommation d’énergie, surtout dans les pays développés et riches. Un changement de comportement et de logique difficile à gérer socialement et politiquement.