<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’embargo chinois sur les terres rares « lourdes », une arme fatale contre les Etats-Unis

28 avril 2025

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L’embargo chinois sur les terres rares « lourdes », une arme fatale contre les Etats-Unis

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La dépendance américaine, et mondiale, aux terres rares « lourdes » chinoises, mises de fait sous embargo depuis le début du mois, est totale. Les industries automobile, de défense et d'équipements électriques ne peuvent pas s’en passer et ont des stocks de seulement quelques mois.

Au début du mois, pour répliquer à la guerre des droits de douane lancée par l’administration Trump, la Chine a commencé à utiliser l’arme des terres rares. Elle a décidé de limiter les exportations de 7 types de terres rares (il en existe 17 dans le tableau périodique des éléments). Les terres rares sont indispensables au fonctionnement d’une économie moderne et la Chine s’est assurée d’un contrôle presque totale de leur approvisionnement. Non seulement la Chine contrôle près de 70% de la production mondiale de terres rares, selon l’institut géologique américain (US Geological Survey), mais elle possède un monopole sur le raffinage d’une bonne partie d’entre elles.

Depuis le 4 avril, les exportateurs chinois de samarium, gadolinium, terbium, dysprosium, lutécium, scandium et yttrium doivent demander des licences d’exportation et la réexportation vers les États-Unis est interdite. La Chine a placé 16 entités américaines – principalement dans les secteurs de la défense et de l’aérospatiale – sur une liste de contrôle des exportations, les empêchant de recevoir des produits dits à double usage.

Des stocks de 2 à 3 mois dans l’automobile

Pékin n’a pas choisi les 7 terres rares victimes de cet embargo par hasard. Il s’agit de terres rares dites « lourdes » qui sont les plus difficiles à remplacer. Le dysprosium et le terbium, par exemple, régulent la température dans les aimants indispensables au fonctionnement des éoliennes terrestres et marines, des véhicules électriques, des avions à réaction, des missiles, des drones et des engins spatiaux. « Lorsque mes clients nous demandent quand leurs cargaisons pourront quitter la Chine, nous leur donnons une estimation de 60 jours, mais il se peut que cela prenne plus de temps que cela », a expliqué sous le sceau de l’anonymat à l’agence Reuters un négociant de terres rares chinois .

L’attente potentielle de plus de deux mois pour que les cargaisons quittent la Chine et soient ensuite livrées pourrait être bien trop longue pour de nombreux clients de ces matériaux, pas seulement aux Etats-Unis, sans que cela ne perturbe leurs chaînes de production. La plupart des constructeurs automobiles et des équipementiers ne disposent que de deux à trois mois d’approvisionnement en aimants, qui sont utilisés dans les transmissions et les rotors de moteurs électriques selon le Financial Times. Et il n’existe presque aucune alternative à court et moyen terme aux importations chinoises. La seule perspective de desserrer un peu l’emprise de la Chine sur l’approvisionnement mondial en terres rares « lourdes » repose sur la société australienne Lynas. Elle devrait agrandir son site de traitement de minéraux en Malaisie pour produire de petites quantités de dysprosium et de terbium d’ici la fin de l’année.

Pékin contrôle totalement le raffinage des terres rares « lourdes »

Car les terres rares « lourdes » n’existent pas à l’état pur dans la croûte terrestre. Contrairement au gallium ou au germanium, elles ne sont pas non plus des sous-produits issus de la fusion de métaux produits en masse tels que l’aluminium ou le zinc. Pour les séparer des composés chimiques dont elles font partie, il faut des compétences et des équipements spécifiques que la Chine est aujourd’hui presque seule à avoir.

Jusqu’en 2023, la Chine assurait 99% du traitement mondial des terres rares « lourdes » avec la seule concurrence d’une production minime provenant d’une raffinerie au Viêt Nam. Mais cette cette installation a été fermée l’année dernière en raison d’un différend fiscal, ce qui donne à la Chine le monopole total de l’approvisionnement, explique le CSIS (Center for Strategic and International Studies), le Centre d’études stratégiques internationales.

L’industrie de défense directement touchée

Outre l’industrie automobile mondiale, les restrictions chinoises à l’exportation ont un impact direct sur les industries de défense américaines. Les avions de chasse F-35, les sous-marins de classe Virginia et Columbia, les missiles Tomahawk, les systèmes radar, les drones Predator ou les  bombes dites intelligentes Joint Direct Attack Munition (JADM) ne peuvent être fabriqués sans avoir recours à des dizaines et parfois des centaines de kilos (pour les navires) de terres rares « lourdes ».

Le problème stratégique auquel font face les Etats-Unis n’est pas facile à résoudre. Car la Chine domine l’extraction et le traitement des terres rares et continuera de le faire dans les prochaines années. Même si de nombreux pays, à commencer par les Etats-Unis, mettent beaucoup de moyens pour réduire leur dépendance. Selon les estimations de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la Chine devrait être toujours le premier producteur mondial de terres rares en 2030, avec une part de 54% du marché mondial, suivie de loin par l’Australie (18%). Et en ce qui concerne le raffinage, la Chine devrait avoir une emprise encore plus forte sur le marché mondial, avec une part de 77% en 2030.

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