Comment le Venezuela, le pays qui possède les plus grandes réserves au monde de pétrole avec plus de 300 milliards de barils, a pu se retrouver victime de l’une des plus grandes dépression, hyperinflation et crise humanitaire de l’histoire de l’Amérique latine?
Le magazine Forbes répond à cette question. C’est avant tout la conséquence de la destruction de l’industrie pétrolière vénézuélienne qui tenait le pays à bout de bras. Le pétrole représente 90% des exportations du Venezuela. Il lui a permis dans les années 1960 et 1970 d’avoir le revenu par habitant le plus élevé de toute l’Amérique latine.
Le Venezuela pourrait produire actuellement 6 millions de barils par jour, plus de sept fois ce qu’il extrait aujourd’hui s’il avait profité de la période de prix élevés du baril entre 2003 et 2014 et effectué alors les investissements programmés. Au lieu de cela, le Venezuela a été l’un des rares pays exportateurs de pétrole dont la production n’a cessé de décliner pendant la hausse des prix et le seul dont la production s’est effondrée quand les prix du pétrole ont ensuite baissé.
Hugo Chavez a pris le pouvoir au Venezuela au début de l’année 1999. Les prix du pétrole étaient alors très faibles. Mais à partir de 2003, il a commencé à bénéficier de l’envolée des cours du baril. Sous son gouvernement, le Venezuela a reçu en revenus pétroliers l’équivalent de plus de 1 000 milliards de dollars. Comme l’explique l’expert Philippe Chalmin dans Capital, «Hugo Chavez a cru qu’il pouvait devenir le roi du monde quand le baril a atteint 100 dollars…». Hugo Chavez a à la fois bénéficié de la hausse des cours mais aussi de l’entrée en service de nouvelles capacités de production pour un million de barils par jour provenant d’investissements privés effectués sous le gouvernement précédent.
Il est encore plus incroyable qu’à la fin de l’année 2018, avant les sanctions imposées par les Etats-Unis, le Venezuela ne produisait plus que 1,2 million de barils par jour, le tiers de sa production de 1998 et l’équivalent de ce que le pays était capable de faire dans les années 1940… Comment expliquer un tel effondrement?
L’histoire se résume au naufrage de PDVSA (Petroleos De Venezuela SA), la compagnie pétrolière nationale vénézuélienne. En 2003, après une grève du personnel, Hugo Chavez a décidé de licencier près de 20 000 personnes dont la grande majorité des cadres, des ingénieurs, des géologues. La société a perdu alors l’essentiel de son savoir-faire et de ses compétences. PDVSA est devenue une société sous contrôle politique, le bras armé du gouvernement pour distribuer des subsides et conclure des alliances internationales révolutionnaires.
Rapidement PDVSA a commencé à rencontrer des difficultés financières, bien avant l’effondrement des prix du pétrole en 2014. La corruption, les cadeaux, l’augmentation des coûts de fonctionnement et la perte d’efficacité de la production ont mis la compagnie en danger. Le gouvernement vénézuélien, au lieu de remettre de l’ordre dans la gestion de PDVSA, a alors obtenu des prêts importants de la Russie et de la Chine pour la renflouer. Ces crédits étaient remboursés en pétrole, réduisant d’autant les capacités d’exportation. Comme en plus à partir de 2005, le gouvernement de Chavez a exproprié les pétroliers privés étrangers, plus aucun investissement n’a été fait dans les infrastructures du pays pour les développer ou même les entretenir.
L’effondrement des prix du baril en 2014 a porté le coup fatal. Les défauts de paiement et les sanctions financières ont interdit à PDVSA l’accès aux marchés de capitaux. Au cours des deux dernières années, le vol généralisé de matériel, le contrôle étroit par l’armée des lieux de production et la désertion des employés ont fini d’achever la compagnie nationale.