<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> La construction du gazoduc Siberia-2 reliant la Russie à la Chine s’éloigne

27 août 2024

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : L'usine de liquefaction de gaz de Yamal
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La construction du gazoduc Siberia-2 reliant la Russie à la Chine s’éloigne

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Après les déclarations sur l’amitié éternelle entre la Russie et la Chine, les négociations concrètes, notamment sur l’énergie, reviennent à la dure réalité. Profitant d’un rapport de force qui lui est aujourd’hui très favorable, la Chine exige des prix et des quantités de livraisons de gaz naturel via le gazoduc Power of Siberia-2 qui doit être construit dans les prochaines années que Moscou juge déraisonnable. Le projet pourrait être gelé. D'autant plus que Pékin dispose de solutions alternatives.

C’est une décision qui pourrait avoir un impact considérable sur la géopolitique de l’énergie dans les années et les décennies à venir et est pourtant passée relativement inaperçue. Elle insinue le doute sur la capacité de la Russie à faire de l’Asie et surtout de la Chine le principal débouché de sa production de gaz naturel.

Le nouveau gouvernement de coalition de la Mongolie a adopté le 16 août son programme d’investissement pour son mandat de quatre ans. Il n’y a pas inclus le gazoduc Power of Siberia-2 de 2.594 kilomètres qui devrait relier la Russie à la Chine en passant par son territoire. Si l’essentiel du projet repose évidemment sur un accord entre Pékin et Moscou, la Mongolie est impliquée dans la construction et les négociations sur les coûts et les redevances de transport.

Remplacer les clients européens par la Chine

Power of Siberia-2 et un projet mené par Gazprom et la China National Petroleum Corporation. Sa construction devrait prendre au moins cinq ans et vise à pouvoir acheminer vers la Chine le gaz naturel provenant des immenses réserves de la péninsule de Yamal en Sibérie occidentale. A l’origine, une bonne partie de ces réserves devait être vendue aux pays de l’Union européenne, mais l’invasion de l’Ukraine par la Russie et le sabotage des deux gazoducs Nord Stream ont totalement changé la donne. Moscou cherche à remplacer ses clients européens par la Chine, le plus grand consommateur de gaz naturel au monde.

Mais les négociations sont devenues difficiles et achoppent sur les prix et les quantités livrées au point que selon le Financial Times, elles seraient même gelées.  Pékin est aujourd’hui en position de force et peut s’en passer, contrairement à Moscou. C’est même une nécessité pour éviter que le géant du gaz russe, Gazprom, s’enfonce dans les difficultés.

De nombreuses solutions alternatives pour Pékin

Mais la Chine investit massivement dans les énergies renouvelables pour réduire justement ses importations de combustibles fossiles. La stratégie du pays consiste à éviter de devenir trop dépendant d’un seul fournisseur. Voilà pourquoi Pékin a signé dernièrement plusieurs contrats à très long terme (27 ans) d’importation de GNL (Gaz naturel liquéfié) avec le Qatar. Compte tenu des investissements en cours un peut partout dans le monde, la production de GNL devrait être suffisante et sans doute même excédentaire au cours des prochaines années. La Chine peut aussi extraire des volumes supplémentaires de sa propre production nationale et augmenter les importations via les gazoducs existants entre l’Asie centrale et la Chine.

Pékin a offert son soutien à la construction du gazoduc dit de la ligne D qui serait le quatrième à acheminer le gaz turkmène vers son territoire. Il présente plusieurs avantages pour la Chine sur Power of Siberia-2. Il serait nettement plus court et sa construction entièrement aux mains des entreprises chinoises, des investissements jusqu’à l’exploitation. Il est aussi bien plus facile de négocier avec les dirigeants du Turkménistan qu’avec Vladimir Poutine. Maintenant, Power of Siberia-2 et Line-D alimenteraient différentes régions de la Chine et ne s’annuleraient pas nécessairement l’une l’autre.

Capacités techniques et financières de Gazprom

Mais le fond de l’affaire est que la capacité de négociation de Moscou avec son voisin bien plus puissant économiquement ne cesse de se réduire au fur et à mesure de l’enlisement de la guerre en Ukraine. Il y a aussi de sérieuses questions sur la capacité de Gazprom à mener, techniquement et financièrement, un projet d’une telle ampleur.

Il est sans doute prématuré d’enterrer aujourd’hui le Power of Siberia-2, mais la décision du gouvernement mongol de faire comme si le projet n’existait pas n’est pas un signal favorable.

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