Pour relancer l’automobile française, le gouvernement a fait le choix de fortement inciter à l’achat de véhicules électriques à batteries. Les constructeurs automobiles français, Renault et PSA, jouent en grande partie leur avenir sur le succès de cette motorisation électrique à batteries. Mais tous les groupes automobiles n’ont pas fait ce choix stratégique qu’ils jugent trop risqué. Toyota le pionnier de l’hybride, qui a fait de la Prius un succès planétaire, reste sceptique devant les limites industrielles, économiques et d’usage du véhicule électrique à batteries. Il offre trop peu de marges aux constructeurs dépendants des fournisseurs de batteries. Ces dernières sont lourdes et trop polluantes, offrent trop peu d’autonomie réelle et ne sont pas adaptées à une utilisation intensive et au transport sur longue distance. Enfin, les véhicules électriques à batteries nécessitent, pour limiter les contraintes de leur utilisation, une forte densité de bornes de recharge installées sur le territoire et offrant une grande puissance électrique.
Renault, qui avait fait un choix inverse de Toyota et s’était très tôt lancé dans l’électrique à batteries, n’en a tiré jusqu’à aujourd’hui aucun avantage. Il se trouve dans une situation très difficile, contraint de demander à l’Etat une garantie à un prêt d’urgence de 5 milliards d’euros. En 2006, Carlos Ghosn, alors patron de l’alliance Renault-Nissan, annonçait de façon péremptoire que les ventes de voitures électriques représenteraient 10% du marché mondial en 2020… Elles seront à moins de 2%.
Le pari de l’hydrogène
Les Japonais Toyota et Honda, le sud-coréen Hyundai et l’Allemand BMW parient à moyen terme sur le véhicule électrique à hydrogène et pile à combustible. Et leurs stratégies technologiques sont à prendre au sérieux. Depuis la première Prius de 1997, Toyota a vendu plus de 13 millions de véhicules hybrides, une technologie à laquelle personne ne croyait il y a deux décennies.
Toyota a l’intention de rééditer sa performance en imposant dans les prochaines années la voiture à hydrogène. «La voiture à hydrogène va se développer en 2020-2025, avec un vrai décollage après 2025», affirmait l’an dernier Didier Leroy, vice-président exécutif de Toyota.
Toyota fabrique depuis 2014 sa berline Mirai équipée d’une pile à combustible. Elle sera renouvelée à la fin de l’année par la version II dont on peut voir un prototype sur la photographie ci-dessus. Malgré un prix avoisinant les 80.000 euros, la marque japonaise arrive à en vendre 3.000 par an et annonce passer à 30.000 d’ici 2021 avec le modèle II. Honda offre son modèle Clarity et Hyundai son tout nouveau Nexo dont l’autonomie dépasse les 600 kilomètres et qui se recharge, comme tous les véhicules à hydrogène, en trois minutes. La firme de Séoul fut la première à sortir un modèle à hydrogène de série en 2013, le crossover ix35 Fuel Cell. Hyundai a fait de l’hydrogène une de ses priorités. D’ici 2025, lil entend commercialiser 110.000 véhicules avec ce type de motorisation par an.
BMW a une analyse assez proche. Même si le constructeur bavarois produit des véhicules électriques à batteries comme l’i3 et l’i8 et va lancer de nouveaux modèles, Klaus Frölich, son Directeur de la recherche et du développement, a souligné à plusieurs reprises les limitations techniques et économiques des véhicules électriques à batteries. Ils coûtent plus cher à fabriquer que leurs équivalents à moteur thermique à cause des prix des matières premières nécessaires à leurs batteries. Et Klaus Frölich pense que cela ne changera pas, bien au contraire. Il explique que les prix de ces matières premières pourraient même augmenter au fur et à mesure de la progression de la demande.
«Une vraie alternative à partir de 2025»
L’autre problème majeur pour lui vient du temps de recharge des véhicules électriques à batterie et de leur autonomie dans la vie réelle. Il explique que les constructeurs ne sont pas prêts de proposer des voitures avec des temps de recharge approchant ceux des voitures thermiques, pour la bonne et simple raison qu’une recharge trop rapide peut user la batterie en seulement quelques années (deux ou trois ans selon lui). Il ajoute que BMW, qui a 500.000 véhicules électriques sur la route, constate que la recharge se fait au domicile où au travail, rarement ailleurs.
Ces limitations du véhicule électrique à batterie sont la raison pour laquelle, l’avenir du véhicule électrique se trouve, pour le Directeur de la recherche et du développement de BMW, à court terme, du côté des hybrides rechargeables et plus encore, à moyen terme, du côté de l’hydrogène et de la pile à combustible.
Pour Klaus Frölich, l’hydrogène deviendra une vraie alternative à partir de 2025, notamment pour les gros véhicules et plus particulièrement les camions et les utilitaires. Il souligne que cela n’a aucun sens d’électrifier un gros camion en réduisant, du fait du poids des batteries, sa charge utile de 6 à 7 tonnes. Il ajoute qu’avec 200 stations d’hydrogène sur les autoroutes vous pouvez alimenter des flottes de milliers de véhicules à hydrogène. Réponse dans cinq ans sur l’émergence ou non de la voiture à hydrogène et sur la pertinence de la stratégie de Renault et PSA.