<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Comment la Chine peut surmonter son addiction au charbon

30 avril 2021

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Comment la Chine peut surmonter son addiction au charbon

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La réussite ou l'échec de la transition énergétique dans le monde dépendront en grande partie de la capacité de la Chine à réduire sa dépendance aux énergies fossiles et avant tout au charbon. Il représente près de 58% de la consommation d'énergie du pays qui est le premier producteur et premier consommateur au monde d'énergie. Pour parvenir à se passer de charbon, la Chine devra investir au cours des prochaines décennies pas moins de 20.000 milliards de dollars dans les renouvelables, les véhicules électriques, le nucléaire, l'hydrogène, la capture et le stockage du CO₂ et la construction d'un gigantesque réseau électrique «intelligent». En comparaison, le «New Green Deal» européen et ses 1.000 milliards d'euros sur dix ans semble presque insignifiant.

La réussite de la transition énergétique se joue avant tout en Chine, aux Etats-Unis, en Inde et dans les prochaines décennies en Afrique. L’Europe en général et la France en particulier peuvent se donner l’illusion de peser sur le destin énergétique mondial. Mais la volonté de devenir un modèle et les ambitions proclamées ne changent pas la réalité. La Chine représentait en 2019, 28,8% des émissions mondiales de CO₂ devant les Etats-Unis (14,5%), l’Inde (7,3%), la Russie (4,5%), le Japon (3,3%), l’Allemagne (2,0%), l’Iran (2,0%), La Corée du sud (1,9%), l’Indonésie (1,8%) et l’Arabie Saoudite (1,7%). La France avec 0,9% des émissions n’était pas dans le top 10 et l’Union Européenne représentait moins de 10%.

Près de 58% de la consommation d’énergie du pays

L’une des explications majeures de cette situation a un nom: le charbon. La Chine est le premier producteur au monde d’hydroélectricité, d’électricité solaire, d’électricité éolienne et surtout de charbon. Elle compte pour presque la moitié de la production mondiale (47,6%). En comparaison, les Etats-Unis qui sont le plus important producteur de pétrole, de gaz naturel et d’électricité nucléaire ne comptaient que pour respectivement 17%, 23% et 30% de ses productions. Le contenu énergétique de la production de charbon chinoise est plus important que les productions américaines additionnées de pétrole, de gaz et de charbon… La production d’aucune autre forme d’énergie est dominée à ce point par un seul pays que le charbon par la Chine. En Chine, le charbon représente près de 58% de la consommation totale d’énergie et pour le reste du monde 17% en moyenne.

Les chiffres de 2020, en dépit de la pandémie, n’y ont rien changé. La Chine a produit l’an dernier 3,84 milliards de tonnes de charbon, son niveau le plus important depuis 2015 en hausse de 90 millions de tonnes par rapport à 2019. Le pays a par ailleurs importé l’an dernier 304 millions de tonnes de charbon, une très légère progression de 4 millions de tonnes par rapport à 2019. Au total, la consommation de charbon a atteint l’an dernier en Chine 4,2 milliards de tonnes et retrouvé ainsi son niveau record de 2013. Elle avait baissé entretemps et était descendue à 3,9 milliards de tonnes en 2016.

Les spécificités de l’économie chinoise: forte croissance, industrie lourde et BTP

Dans un article très récent, le cabinet international de recherche économique Gavekal souligne que cette situation est liée d’abord à la spécificité de l’économie chinoise. Elle a connu depuis plusieurs décennies une croissance bien plus rapide que toutes les autres grandes économies. Et comme cette croissance est liée à des activités utilisant intensivement l’énergie, notamment la sidérurgie, la production de ciment, le verre et d’autres industries liées aux BTP, la consommation d’énergie a plus que triplé au cours des deux dernières décennies. Par comparaison et au cours de la même période, la consommation d’énergie en Amérique du nord a augmenté de 4% et a baissé de 4% en Europe.

L’addiction chinoise au charbon s’explique aussi pour d’autres raisons. Il s’agit de la seule ressource fossile présente en abondance sur le territoire chinois et assurant à ce pays une souveraineté énergétique. Par ailleurs, l’augmentation rapide des capacités de production d’électricité provenant de sources renouvelables, notamment éoliennes et solaires, se heurte à un problème récurrent. A savoir, la réalité de la production électrique des renouvelables par rapport à leurs capacités théoriques. C’est un problème qui n’est pas spécifique à la Chine et qui montre les limites des renouvelables, même si elles sont niées par des parti-pris militants et des études un peu trop «idéologiques». De fait, l’éolien et le solaire ont des productions intermittentes et les capacités de production annoncées exagèrent toujours leur contribution réelle à l’alimentation des réseaux.

20.000 milliards de dollars d’investissements…

Une des solutions consiste, selon Gavekal, a augmenter les capacités de production dites «flexibles». Il s’agit de centrales -principalement au gaz naturel ou hydrauliques alimentées par pompage- qui peuvent être mises en service facilement à la demande et sans nécessiter des coûts très importants. Elles permettent ainsi de se substituer à l’éolien et au solaire quand il n’y a pas de vent et pas de soleil. Entre 2016 et 2020, l’installation en Chine de capacités de production électrique renouvelables a été très supérieuresaux objectifs, mais en revanche les nouvelles capacités «flexibles» ont été trop peu importantes. Elles représentent seulement 6% des capacités de production en Chine contre 18% en Allemagne, 34% en Espagne et 49% aux Etats-Unis.

La Chine s’est engagée à se passer d’énergies fossiles d’ici 2060. Le Président chinois Xi Jinping a d’ailleurs surpris tous les observateurs en septembre 2020 lors de la dernière Assemblée générale des Nations Unies en prenant cet engagement et en annonçant que son pays atteindrait le pic d’émissions de CO₂ avant 2030. Cela va nécessiter des investissements considérables dans les renouvelables, les voitures électriques, le nucléaire, l’hydrogène et des technologiques comme la capture et le stockage du CO₂, notamment par l’industrie. Selon Ding Zhimmin, l’ancien directeur adjoint du département politique et juridique de l’administration nationale de l’énergie, atteindre la neutralité carbone demandera près de 20.000 milliards de dollars d’investissements.

Pour atteindre l’objectif annoncé, il faudra réduire la part du charbon dans la consommation d’énergie en Chine à moins de 5% contre 57,7% en 2019 et faire passer celle des renouvelables à plus de 85%. L’ampleur de la tâche est illustrée par la succession de blackouts et de pénuries d’électricité dans plusieurs régions chinoises  à la fin de l’année 2020 liée à un manque de charbon. Elle était la conséquence d’un hiver plus rigoureux et  de l’embargo pour des raisons politiques sur le charbon australien.

Dans les prochaines années, les ambitieux programmes de construction de centrales nucléaires et de centrales à gaz devraient permettre à la Chine de se passer progressivement des importations de charbon. Mais compte tenu de l’échelle des transformations et des investissements à réaliser et de la difficulté technologique de remplacer le charbon dans l’industrie lourde, bon nombre d’experts estime que parvenir déjà à un plateau d’émissions de CO₂ en 2030 sera un exploit.

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