<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Le charbon est loin d’avoir dit son dernier mot

9 juillet 2021

Temps de lecture : 4 minutes
Photo : Train Charbon Wikimedia
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Le charbon est loin d’avoir dit son dernier mot

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L'augmentation rapide de la consommation d'électricité dans le monde et l'envolée des prix du gaz naturel ont redonné une nouvelle vie au charbon en dépit de ses émissions massives de gaz à effet de serre. Entre les coupures et le charbon, les gouvernements choisissent le charbon.

Il y a la transition énergétique vue d’Europe par les gouvernements, les parlements et les médias. De grands engagements, de grandes ambitions, de grandes annonces, de grands projets. Et il y a la réalité planétaire de la transition qui est la consommation d’énergie dans le monde. A l’heure des surenchères pour accélérer en Europe à la fois le calendrier de réduction des émissions de CO2 et la disparition des véhicules à moteur thermique, la consommation de charbon repart à la hausse dans le monde… Difficile de trouver un contraste plus saisissant.

La consommation de charbon a ainsi augmenté fortement depuis le début de l’année dans la plupart des grandes économies notamment en Chine, en Inde aux Etats-Unis et… en Europe. Et cela en dépit des pressions des gouvernements, des institutions internationales, des investisseurs et des écologistes pour réduire les émissions de CO2.

Dépendance aux fossiles et limites des renouvelables

La principale origine de ce retour du charbon, dont les cours ont été atteint des niveaux inconnus depuis plusieurs années, tient tout simplement à la forte augmentation de la demande d’électricité avec la reprise de la croissance économique après la récession mondiale de 2020 née de la pandémie. Même si de nombreux analystes estiment que le rebond du charbon n’est sans doute pas durable, il montre tout de même la grande dépendance du monde aux énergies fossiles et les limites actuelles de la production d’électricité par les renouvelables.

Comme l’écrit le Wall Street Journal, «les pays ont dépensé des milliards pour construire à des rythmes records des capacités de production d’électricité renouvelables, mais les projets solaires et éoliens ne fournissent de l’électricité que quand le soleil brille et le vent souffle et ne peuvent pas monter en puissance quand il y a une soudaine augmentation de la demande». «C’est difficile de se passer du charbon du fait de la sécurité en approvisionnement qu’il offre. A la fin de la journée, vous avez besoin d’allumer la lumière», explique toujours au Wall Street Journal Kathryn Porter, fondateur du consultant spécialisé dans l’énergie Watt-Logic. «Quand les gouvernements sont face au choix de ne pas fournir de l’électricité ou d’utiliser du charbon, ils utilisent le charbon», ajoute-t-elle.

La Chine, le premier pays consommateur d’énergie et de charbon au monde, et de loin, fait face depuis plusieurs mois à des pénuries massives d’électricité. Il s’agit des pires coupures de courant dans le pays depuis plus d’une décennie. Elles affectent une dizaine de provinces notamment du sud industriel du pays. Elles sont liées à la forte augmentation de la demande d’électricité (la consommation dans le sud du pays est nettement supérieure depuis le début de l’année à celle de 2019 à la même période), à des conditions climatiques extrêmes et à des pénuries de charbon… Il s’agit d’un problème qui pourrait se prolonger pendant des mois. Et pourtant la Chine est le premier producteur mondial de charbon (47,6% du total) et le premier consommateur. Il représente 58% de sa consommation d’énergie totale.

Plus de 4,2 milliards de tonnes de charbon consommées l’an dernier en Chine

La Chine a produit l’an dernier 3,84 milliards de tonnes de charbon, son niveau le plus important depuis 2015 en hausse de 90 millions de tonnes par rapport à 2019. Le pays a par ailleurs importé l’an dernier 304 millions de tonnes de charbon, une très légère progression de 4 millions de tonnes par rapport à 2019. Au total, la consommation de charbon a atteint l’an dernier en Chine 4,2 milliards de tonnes et retrouvé ainsi son niveau record de 2013. Et elle a augmenté depuis… Ainsi, selon la National Development and Reform Commission, l’agence de planification du gouvernement chinois, au cours des cinq premiers mois de l’année, les centrales à charbon du pays ont augmenté leur production de 16% par rapport à la même période de 2020.

Mais il n’y a pas que la Chine. Aux Etats-Unis, le charbon avait assuré à la mi-juin 23% de la production d’électricité du pays contre 17% pour la même période de 2020. Cela serait lié à la fois à la reprise économique, à l’augmentation du prix du gaz naturel et à un hiver rigoureux qui a par exemple provoqué un gigantesque black out au Texas en février.

L’Europe n’est pas épargnée. La consommation de charbon a augmenté en Allemagne, au Royaume-Uni et même en France selon le cabinet firm Energy Aspects. Au Royaume-Uni qui doit fermer d’ici 2024 toutes ces centrales au charbon, le gestionnaire du réseau électrique a lancé six alertes depuis novembre 2020 sur des risques de coupures. Il n’avait plus lancé une telle alerte depuis 2016.

Stabiliser des réseaux affaiblis par les renouvelables

Cela est notamment lié dans toute l’Europe à des difficultés d’approvisionnement en gaz naturel. L’ensemble du système électrique européen fait face aujourd’hui à des problèmes de capacités de production en période dite de pointe, c’est-à-dire l’hiver quand il fait froid. Selon une étude récente de France Stratégie, organisme de prévisions rattaché aux services du Premier ministre, les pénuries d’électricité seront fréquentes en Europe d’ici 2030.

Il est difficile aujourd’hui d’imaginer que la consommation de charbon va subitement baisser. Notamment parce que l’économie mondiale devrait connaître cette année sa plus forte croissance depuis 1980. Selon le Fonds Monétaire International (FMI), l’économie mondiale devrait croître de 6% cette année après avoir connu une récession l’an dernier.

Le retour du charbon illustre aussi les difficultés techniques et économiques liées au développement des renouvelables. Tant qu’ils représentent une part relativement limitée de la production d’électricité, les réseaux peuvent gérer le caractère intermittent et aléatoire de leur production (éolienne et solaire). Mais plus le pourcentage de production de renouvelable augmente, plus les problèmes augmentent et la nécessité d’avoir à disposition des capacités de production mobilisables à tout moment comme les centrales au gaz et… au charbon. Un problème qui ne peut que grandir avec l’augmentation des usages de l’électricité, dans les transports par exemple. Selon l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), les renouvelables vont dépasser le charbon dans le monde dans la production d’électricité en 2025, dans seulement quatre ans, et représenteront alors 33% de la production totale (hydroélectrique, géothermie et biomasse compris).

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