<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Ce que l’abandon du nucléaire a coûté à l’Allemagne

3 septembre 2024

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Ce que l’abandon du nucléaire a coûté à l’Allemagne

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La transition énergétique allemande, Energiewende, a coûté près de 700 milliards d’euros au pays en 20 ans pour des gains limités en matière d’émissions de CO2. L’Allemagne émet 417 grammes de CO2 par kWh d’électricité produit et la France 59 grammes.  Le choix du tout renouvelable et l’abandon du nucléaire ont rendu le pays dépendant des centrales à charbon et à gaz, quand il n’y a pas de vent et de soleil, et fait s’envoler les prix de l’électricité. Et si l’Allemagne avait consacré seulement une partie des 700 milliards à maintenir et développer son parc nucléaire ? C’est le thème d’une étude publiée par le International Journal of Sustainable Energy (Journal international de l’énergie durable). Résultat : beaucoup moins de gaz à effet de serre et beaucoup moins d’investissements…

La révolution énergétique allemande, Energiewende, restera une énigme historique. Comment peut-on se fourvoyer à ce point-là et persister aussi longtemps dans l’erreur ? Même la Cour des comptes allemandes a dénoncé en vain et à plusieurs reprises ses errements et son inefficacité.

Rappelons qu’elle a consisté jusqu’à aujourd’hui à engloutir près de 700 milliards d’euros en 20 ans dans la production d’électricité renouvelable et d’abandonner le nucléaire (voir ci-dessus la photographie d’un des trois derniers réacteurs définitivement arrêté en avril 2023). Résultat, du fait de la dépendance persistante aux centrales à charbon, il faut bien avoir de l’électricité quand il n’y a pas de vent et de soleil, la décarbonation de la production électrique allemande est très inférieure aux objectifs et très inférieure, par exemple, à celle de la France. Elle a bien baissé de 25% entre 2002 et 2022. Mais l’an dernier, l’Allemagne a encore émis 417 grammes de CO2 par kWh d’électricité produit, le même niveau qu’en 2019, quand la France n’émettait en moyenne que 59 grammes de CO2 par kWh…

Une impasse

En outre, l’Energiewende a renchéri considérablement le prix de l’électricité du pays et affaibli énormément son industrie. Une PME allemande paye aujourd’hui son électricité quatre fois plus cher que son équivalent français. Elle conduit tout simplement à une impasse puisque la seule solution trouvée par les brillants technocrates allemands à l’intermittence de l’éolien et du solaire consistait à remplacer les centrales à charbon par des centrales à gaz. Mais comme le gaz ne peut plus venir de Russie par gazoducs après l’invasion de l’Ukraine, ce sera donc du GNL (Gaz naturel liquéfié) acheté à prix d’or aux Etats-Unis et au Qatar…

Non seulement, cela ne l’empêche pas l’Energiewende d’être et de rester le modèle que la Commission européenne entend imposer à tous les pays de l’Union, mais le gouvernement allemand persiste face à l’échec en voulant encore augmenter les investissements dans les renouvelables intermittents. Ce qui n’est pas sans rappeler la définition de la folie d’Albert Einstein : « la folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent ».

« L’Allemagne aurait atteint ses objectifs climatiques avec une grande marge… »

Une étude récente publiée dans le International Journal of Sustainable Energy (Journal international de l’énergie durable), montre ce que la production d’électricité et les émissions de gaz à effet de serre seraient en Allemagne si le pays avait consacré une partie des 700 milliards d’euros de l’Energiewende à maintenir et développer son parc nucléaire. Selon les calculs de l’auteur, Jan Emblemsvåg, professeur d’ingénierie civile en Norvège à la Norwegian University of Science and Technology (NTNU), l’Allemagne aurait pu réduire ses émissions de carbone de 73% supplémentaires tout en faisant une économie de 330 milliards d’euros par rapport aux coûts massifs de l’Energiewende.

« Il n’y aurait eu aucun besoin de nouveaux renouvelables intermittents à aucun moment si les centrales nucléaires de 2002 étaient restées pleinement opérationnelles. C’est facile à comprendre puisque les centrales nucléaires existantes en 2002 produisaient 185,6 TWh/an tandis que les renouvelables intermittents ne produisaient que 181,8 TWh/an. En outre, nous constatons qu’à mesure que de nouvelles centrales nucléaires seraient entrées en service à partir des années 2010, le besoin de production par d’autres sources d’énergie aurait diminué. En 2022, le reste du besoin du mix électrique serait de 121 TWh/an, dont 58,9 TWh/an d’origine fossile, soit une réduction de 73% par rapport à la situation actuelle en 2022 (216,1 TWh/an). L’Allemagne aurait alors également atteint ses objectifs climatiques et avec une grande marge… ».

Au lieu de cela, pour compenser l’intermittence des renouvelables et la disparition du nucléaire, en vingt ans « le gaz naturel a connu une croissance significative de 71%, ce qui a fait augmenter la capacité fossile totale de 7% » établi Jan Emblemsvag. Par ailleurs, si les capacités de production électrique ont augmenté de 111% sur la même période, la production d’électricité elle-même a légèrement baissé. L’Allemagne aura dépensé 700 milliards d’euros pour produire au final la même quantité d’électricité et ne baisser que très modestement ses émissions de CO2. Cherchez l’erreur…

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