<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Capture et stockage de CO2, l’heure de vérité en Norvège

1 octobre 2024

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Capture et stockage de CO2, l’heure de vérité en Norvège

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Le premier test, technique et commercial, de capture et stockage de CO2 à grande échelle pour l’industrie lourde va commencer dans les prochains mois en Norvège. Le projet baptisé Northern Lights (Aurores Boréales) porté par les géants pétroliers Equinor, Shell et TotalEnergies et surtout financièrement par l’Etat norvégien est crucial. Cette technologie est jugée indispensable à la transition par le GIEC et l’Agence internationale de l’énergie mais est rejetée par la plupart des organisations écologistes qui y voient un écran de fumée de l’industrie pétrolière.

Le premier projet de stockage commercial de CO2 dans le sous-sol à grande échelle baptisé Northern Lights (Aurores boréales) est devenu réalité, en partie, il y a quelques jours en Norvège. Sur les rives de la mer du Nord à Oygarden, à 45 minutes à l’ouest de Bergen, la deuxième ville du pays, un terminal terrestre vient d’être construit (voir la photographie ci-dessus). C’est ici que le CO2, préalablement liquéfié, sera acheminé par bateau, puis injecté, via un pipeline dans un aquifère salin à 110 kilomètres de la côte, à 2.800 mètres sous la mer.

Le premier client, le cimentier Heidelberg, doit commencer à expédier le carbone capté sur sa cimenterie de Brevik, au sud d’Oslo, dans le courant de l’année prochaine. Il sera expédié par quatre navires opérés par Northern Lights qui assureront les liaisons entre les sites industriels et Oygarden. Le deuxième client doit être le fabricant d’ammoniac et d’engrais norvégien Yara pour le transport et la séquestration du CO2 capté sur son site de Yara Sluiskil aux Pays-Bas.

Coûteux, difficile techniquement mais sans risques

Pour réduire les émissions de gaz à effet de serre liées à l’énergie, il n’existe fondamentalement que deux moyens. Le premier consiste à en émettre moins, en en consommant moins et en utilisant des énergies dites décarbonées pour les substituer aux énergies fossiles. Ce processus est en cours depuis deux décennies, mais comme toutes les transitions énergétiques de l’histoire, il est lent et difficile. Cela signifie qu’il faudra impérativement utiliser le second moyen pour réduire les émissions, empêcher qu’elles se répandent dans l’atmosphère en les capturant et en les stockant ensuite, notamment dans le sous-sol.

La technologie de capture et de stockage du CO2 (CCS) est un processus coûteux et difficile techniquement mais sans risques. Il n’y a tout simplement aucune raison d’avoir peur du CO2. Il ne s’agit pas d’un polluant dangereux au sens premier du terme. Il a un impact dans l’atmosphère sur le réchauffement climatique, mais il est indispensable à la vie sur terre, et il en sort en permanence de nos appareils respiratoires.

Le GIEC et l’AIE jugent indispensables la capture et le stockage de CO2

C’est pour cela que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), l’Agence internationale de l’énergie (AIE) et le World Economic Forum sont très favorables au CCS. Ils ont calculé qu’il faut que cette technologie soit cent fois plus utilisée qu’aujourd’hui dans les trente prochaines années pour réussir la transition. Et que cela ne peut se faire qu’avec un soutien d’ampleur des États et des grandes entreprises.

Cette technologie est indispensable pour les industries lourdes grandes consommatrices de combustibles fossiles et qui ne pourront pas utiliser des substituts bas carbone en grande quantité avant des décennies. C’est notamment le cas de la sidérurgie, des cimenteries, des verreries ou de la production d’ammoniac indispensable pour obtenir des engrais azotés et nourrir la planète.

Pour contenir le réchauffement planétaire à 1,5°C par rapport à l’ère pré- industrielle, le CCS devrait empêcher au moins 1 milliard de tonnes d’émissions de CO2 par an d’ici 2030, estime l’AIE.

Des coûts prohibitifs de 150 à 200 euros la tonne de CO2

Voilà pourquoi le test grandeur nature de Northern Lights est important. Porté par les géants pétroliers Equinor, Shell et TotalEnergies, il devrait enfouir ses premières tonnes de CO2 en 2025. Sa capacité de stockage annuelle sera initialement de 1,5 million de tonnes, avant d’être portée à 5 millions de tonnes… si la demande suit.

Car pour le moment, les tarifs restent en fait prohibitifs. L’ensemble des coûts (capture, liquéfaction, transport et stockage) est compris entre 150 et 200 euros la tonne de carbone. Le coût de la tonne de CO2 est aujourd’hui autour de 70 euros sur le marché européen. Il devrait augmenter dans les prochaines années, mais l’opération ne peut pas être rentable pour les industriels avant de nombreuses années. A moins de recevoir des subventions publiques. Ce n’est pas pour rien si l’État norvégien prend à sa charge 80% des coûts du projet dont le montant reste confidentiel mais est estimé à plus de 500 millions d’euros.

« C’est un jour crucial pour notre avenir. Et ce n’est pas un hasard si cela se passe en Norvège, qui a trente ans d’expérience dans le stockage de carbone », s’est félicité le ministre norvégien de l’Energie, Terje Aasland. « Notre principal objectif est de démontrer que la chaîne de capture et de stockage du carbone (CCS) est faisable », a ajouté le directeur de Northern Lights, Tim Heijn.

Rejeté par les écologistes

Cette technologie est pourtant rejetée par bon nombre d’organisations écologistes. D’une part, parce qu’elle pourrait ne pas nous contraindre à faire suffisamment d’efforts et ensuite parce qu’elle prolongerait l’utilisation des énergies fossiles. Il s’agit à leurs yeux d’un stratagème. On peut considérer qu’il s’agit d’un pis-aller et d’une technologie à usage limité pendant quelques décennies. Mais avons-nous le choix ?

Plusieurs autres projets de stockage sous-marin existent en Europe. Greensand développé par Ineos et 23 partenaires au large du Danemark a reçu en septembre l’autorisation de l’organisme de certification DNV et prévoit de démarrer fin 2025 ou début 2026. En Italie, le groupe pétrolier Eni, allié au groupe de transport de gaz Snam, a démarré début septembre un projet au large de Ravenne qui doit atteindre le stade industriel en 2027.

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