Barbara Pompili, la ministre de la Transition écologique, était venue en personne à Dunkerque au début du mois de mai défendre le projet de parc éolien marin à une dizaine de kilomètres au large. Elle avait notamment rejeté catégoriquement l’organisation d’un référendum local, réclamé par de nombreux partis politiques et organisations. «On ne va pas commencer à demander un référendum à chaque fois qu’on a un projet qui est en cours d’achèvement», avait affirmé l’ancienne députée de la Somme.
La justice française et la Commission européennes saisies
Mais le projet se heurte maintenant à un adversaire de taille, le gouvernement belge. Il a annoncé à la fin de la semaine dernière son intention de saisir la justice française et la Commission européenne pour contester un projet accusé de nuire à des «intérêts essentiels» de la Belgique.
En juin 2019, le groupement EDF renouvelables, Innogy et Enbridge, a remporté l’appel d’offre pour la construction et l’exploitation d’un parc d’environ 50 km2 situé à une dizaine de kilomètres des côtes en bordure des eaux territoriales belges. Il devrait être constitué de 46 éoliennes, hautes de 225 à 300 mètres, pour 600 MW de capacité. Sa mise en service est prévue en 2027 et son exploitation doit durer 30 ans.
La Belgique accuse les autorités françaises d’avoir défini cette zone de construction en 2016 sans aucune concertation. «Une plainte sera déposée auprès de la Commission européenne car notre pays n’a pas été consulté au sujet de l’emplacement de la zone, alors que les directives européennes l’exigent», affirme le ministre belge de la Justice et de la mer du Nord Vincent Van Quickenborne. Il précise toutefois que la Belgique «continue de à travailler à une solution négociée favorable pour les deux pays».
Le ministre libéral flamand a également annoncé son intention de saisir «avant le 10 juillet» le tribunal administratif de Lille (France) contre une décision prise le 10 mai par le consortium de construction, la société Eoliennes en Mer de Dunkerque (EMD). EMD qui regroupe notamment EDF et RTE «a décidé de poursuivre le projet selon les plans originaux», ignorant totalement la proposition belge d’un emplacement alternatif. Il s’agirait de déplacer le parc un peu plus au nord de quelques kilomètres avec des éoliennes moins hautes.
Les objections et les propositions jamais entendues
Le port d’Ostende et les bourgmestres de La Panne, Nieuport et Coxyde, de même que les gouvernements flamand et fédéraux belges s’opposent en fait depuis des années au projet. Mais leurs objections comme leurs propositions n’ont jamais été entendues ni même considérées avec sérieux.
Le gouvernement belge assure pourtant avoir encore fait part de ses objections lors de la consultation publique française menée à l’automne 2020. «Déplacer le parc de 5 km plus (au large) en mer pourrait résoudre presque toutes les objections formulées par la Belgique», affirme M. Van Quickenborne.
En l’état, le projet mettrait les éoliennes «dans l’espace aérien contrôlé par la Belgique», ce qui est «préoccupant» pour la sécurité du trafic au départ et à destination de la base militaire de Coxyde. Cela risque aussi de compliquer d’éventuelles opérations de sauvetage dans cette zone, fait-on valoir côté belge.
La Belgique met aussi en avant «le blocage des routes maritimes historiques entre le Royaume-Uni et le port d’Ostende» où se trouve une flotte de pêche habituée à travailler dans les eaux britanniques. Enfin, la vue sur mer depuis les constructions à la côte belge serait affectée par des éoliennes de 300 mètres de haut ce qui pourrait aussi porter préjudice au tourisme côtier important dans la zone de La Panne.