Annoncées par Emmanuel Macron le 26 mai et mises en place depuis le 1er juin, les aides de l’Etat pour l’achat d’une voiture sont suspendues… temporairement. Il est impossible depuis le début du mois de juillet de déposer un dossier pour profiter du super-bonus écologique et de la prime à la conversion. Le site officiel invite les automobilistes à se reconnecter à partir du 17 juillet pour une demande de bonus ou du 31 juillet pour la prime à la conversion. Que va-t-il se passer pour les voitures achetées entretemps? Nulle ne le sait. Il est aujourd’hui impossible de savoir quelle date sera prise en compte pour l’attribution de la prime à la casse. S’agira-t-il de celle du bon de commande ou du dépôt de dossier sur le site du gouvernement?
Un cafouillage technique…
Et cela peut avoir des conséquences financières importantes pour les acheteurs.
Le gouvernement a prévu d’accorder les primes aux 200.000 premiers acheteurs. Que se passerait-il si le seuil des 200.000 ventes était atteint avant la réouverture des dossiers le 31 juillet? Car personne ne semble connaître exactement la situation. Selon les chiffres publiés par le Conseil national des professions de l’automobile (CNPA), qui s’appuie sur un sondage hebdomadaire anonyme auprès de concessionnaires, 25% du quota avait été atteint au 29 juin 2020. Le lendemain, le 30 juin, les mêmes chiffres passaient à 30%, soit environ 65.000 véhicules. Mais le ministère de la Transition écologique et solidaire avançait un tout autre chiffre: 100.000 demandes. Et puis le CNPA faisait état le 8 juillet de plus de 125.000 véhicules vendus. Un véritable imbroglio.
Le ministère de la Transition écologique et solidaire évoque «une mise à jour de la plateforme». Un cafouillage, le mot est faible, contre lequel s’insurge l’association 40 Millions d’automobilistes. Pour elle, cela traduit l’impréparation et le manque de sérieux de l’Etat. «Les constructeurs, le Comité des Constructeurs Français d’Automobiles (CCFA), tout le monde disait que cette super prime allait rencontrer un vif succès, mais le gouvernement semble complètement dépassé par les événements, déplore Pierre Chasseray, le délégué général de l’association.
En fait, c’est le système de comptage des dossiers qui dysfonctionne. La plateforme devenue «hors de contrôle» a donc été brutalement débranchée, le temps de la faire fonctionner correctement. Pour Pierre Chasseray, le danger maintenant est de décourager les acheteurs et d’aller à l’encontre des objectifs des aides, à savoir soutenir et relancer l’automobile. «Mettez-vous dans la peau de quelqu’un qui vient d’acheter une voiture et qui ne sait même pas s’il va bénéficier de la prime. Certains ont fait un crédit pour acheter leur voiture, certaines primes ont été avancées par les concessionnaires, et le seul message qu’on leur donne, c’est de revenir à la fin du mois pour savoir s’ils seront éligibles ou pas».
Un marché porté à bout de bras par les aides
«Cette mesure avait pour but d’inciter les gens à rouler dans des voitures plus propres et ça marchait, alors pourquoi l’arrêter», ajoute Pierre Chasseray. «On va nous répondre que cela coûte cher mais c’est le marché de la voiture électrique qui doit être mis sous perfusion pour se développer. On l’a bien vu avec d’autres pays, les ventes se sont effondrées dès que les aides ont été retirées».
Cette dernière remarque est juste. Les pays qui ont le plus apporté d’aides à l’achat d’un véhicule électrique comme la Norvège, la Chine et le Danemark ont connu un envol des ventes important. En revanche, quand les aides ont été réduites ou arrêtées, comme en Chine ou au Danemark il y a quelques années, les ventes de voitures électriques se sont effondrées.
Le risque est d’arrêter brutalement la reprise (+205% de ventes automobiles en juin 2020) car aucun concessionnaire ne peut prendre aujourd’hui le risque de promettre le bonus ou la prime à la conversion à ses clients. Comment transformer en cauchemar un système d’aides qui devait soutenir l’industrie automobile touchée de plein fouet par les conséquences de la pandémie? Il suffit de demander à l’administration française de gérer la plateforme…