Au cours des dernières semaines, le prix du litre de carburant diesel ou gazole est passé largement devant celui du litre d’essence sans plomb 95. La raison en était simple, le monde était tout simplement menacé de pénurie de diesel, faute notamment de production suffisante par les raffineries, que ce soit en Asie, aux Etats-Unis et en Europe. A tel point d’ailleurs que la Chine a instauré depuis la fin de l’année dernière un rationnement avec une limite de 100 litres par jour pour les camions. De plus, l’invasion de l’Ukraine par la Russie signifiait une sérieuse menace sur les importations par les Européens mais aussi les Américains de diesel déjà raffiné provenant de Russie. Sur 1,4 million de barils par jour de diesel importés par l’Europe en 2019, la moitié, soit 685.000 barils, provenait de Russie
Et puis voilà que depuis quelques jours, le prix du litre d’essence est repassé au-dessus de celui du litre de carburant diesel. A ne plus rien y comprendre. Le prix du sans-plomb 95 atteint désormais 1,9386 euro le litre et se rapproche de nouveau de la barre symbolique des deux euros, avec une hausse de 8,8 centimes par rapport à la semaine dernière. Cela fait désormais cinq semaines consécutives que le prix de l’essence est en hausse. Après avoir atteint des sommets début mars, avec le litre à 2,0286 euros, son prix avait diminué pour tomber à 1,7343 euro le litre, mi-avril. Depuis, il ne cesse de remonter.
Quant au prix du gazole, celui-ci diminue progressivement depuis deux semaines. En moyenne, le litre s’affiche actuellement à 1,852 euro, soit 2,6 centimes de moins que la semaine dernière. Le record avait été établi début mars avec un litre au prix de 2,1407.
Tensions sur l’approvisionnement faute de capacités de raffinage
L’explication étonnante de l’envolée des prix de l’essence illustre à merveille ce qu’est la mondialisation de l’énergie fossile. L’essence coûte plus cher car la demande a beaucoup augmenté aux Etats-Unis du fait de l’arrivée de la saison des longs week-ends et des vacances, ce qui se va traduire par une augmentation sensible de la consommation d’essence… Et les raffineries dans le monde, victimes depuis des années de sous-investissements faute de rentabilité, n’arrivent pas à suivre
Le dernier lundi de chaque mois de mai donne en quelque sorte le départ outre Atlantique de la saison des vacances et des transhumances. Ils ‘agit de «Memorial Day», jour férié d’hommage aux membres des forces armées américaines morts au combat. Ce jour approche et avec lui, «la saison annuelle de conduite aux Etats-Unis», explique Francis Pousse, président des distributeurs de carburant chez Mobilians.
Très peu de voitures diesel aux Etats-Unis
«Les familles prennent le volant pour rendre visite à leurs parents, leurs amis, partir en vacances.» La conséquence est que les stocks d’essence augmentent sensiblement en prévision d’un pic de consommation d’essence dans le pays. Ce qui se traduit par des tensions sur l’approvisionnement et des prix qui s’envolent.
Ainsi, outre Atlantique, le prix moyen du gallon (3,78 litres) d’essence sans plomb a atteint un record cette semaine à près de 4,60 dollars. Et en Californie, où les taxes sur les carburants sont plus élevées que dans les autres Etats, le gallon a dépassé les 6,06 dollars.
Cette tension sur les prix de l’essence tient notamment au fait que les voitures particulières fonctionnant aux Etats-Unis au carburant diesel sont presque inexistantes. Elles représentent moins de 5% du parc. Ce carburant est utilisé exclusivement par les véhicules professionnels.
Un dispositif à l’étude en France pour «les gros rouleurs»
Pour en revenir à la France, et face à la hausse importante des prix des carburants, de surcroit en période électorale, le gouvernement a décidé de mettre en place une aide en faveur des automobilistes: une ristourne de 15 centimes d’euro hors taxe par litre qui doit prendre fin le 31 juillet.
Un autre dispositif devrait alors être mis en place «pour accompagner tous ceux qu’on appelle les gros rouleurs, tous ceux qui ont besoin de carburant pour travailler et qui ont une consommation obligée», a indiqué la nouvelle ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher.