<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> L’Europe n’est plus l’épicentre des investissements dans la transition énergétique

6 février 2023

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : La commission européenne à Bruxelles
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L’Europe n’est plus l’épicentre des investissements dans la transition énergétique

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L’année 2022 a battu des records d’investissements dans la transition énergétique à plus de 1.100 milliards de dollars, notamment dans les renouvelables et l’électrification des transports. Et la Chine est de loin le pays ou la région du monde qui a le plus investi dans les technologies et les équipements de la transition loin devant l’Europe et les Etats-Unis.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie il y a un an a provoqué une crise énergétique mondiale sans précédent depuis près d’un demi-siècle et est venu nous rappeler brutalement notre dépendance aux carburants fossiles. Conséquence, les prix du gaz, du pétrole et du charbon se sont envolés, notamment pour le premier. Au point que bon nombre d’engagements sur la décarbonation de pays se voulant «vertueux» et donneurs de leçons ont été soudain oubliés et le recours massif au charbon est venu compenser les pénuries de gaz. L’année 2022 a aussi marqué le retour en grâce du nucléaire notamment dans des pays inattendus comme le Japon et même l’Allemagne où l’opinion est maintenant favorable à l’atome !

Pour autant, le développement et l’investissement dans les technologies de la transition ne se sont pas arrêtés, au contraire. La fondation Bloomberg New Energy Finance (BNEF) souligne ainsi que les investissements dans la transition énergétique ont pour la première fois l’an dernier dépassé 1.000 milliards de dollars dans le monde pour atteindre 1.100 milliards de dollars et cela comprend à la fois les énergies renouvelables, le stockage de l’énergie, l’électrification des transports, l’électrification de la chaleur, la capture et le stockage du CO2, l’hydrogène et les matériaux durables. Seul l’investissement dans le nucléaire n’a pas atteint des niveaux records et est resté stable, mais pour cette énergie les projets mettent des années à prendre forme et les niveaux d’investissements unitaires sont considérables.

Renouvelables et électrification des transports

Les renouvelables, notamment intermittents éolien et solaire, ont bénéficié de 495 milliards de dollars, une progression de 17% en un an, et l’électrification des transports de 466 milliards, une envolée de 54% en un an conséquence notamment de l’accélération du passage aux véhicules électriques. En comparaison, l’hydrogène n’a bénéficié que de 1,1 milliard de dollars, mais il s’agit d’un triplement des investissements par rapport à 2021.

Mais l’évolution peut-être la plus notable est le fait que la Chine est devenue, devant l’Europe, le premier investisseur dans la transition. Elle a investi 546 milliards de dollars à comparer aux 180 milliards de l’Union Européenne et aux 141 milliards des Etats-Unis. Dans le classement des pays, l’Allemagne est en troisième position, la France en quatrième et le Royaume-Uni en cinquième.

Il y a plusieurs raisons à la croissance rapide des investissements dans la transition énergétique. Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’invasion de l’Ukraine par la Russie est même un accélérateur de la transition du fait des conséquences de la dépendance aux énergies fossiles. «Les marchés et les politiques énergétiques ont changé à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, et pas seulement pour le moment, mais pour les décennies à venir. Le monde de l’énergie change radicalement sous nos yeux. Les gouvernements du monde entier promettent d’en faire un tournant historique et définitif vers un système énergétique plus propre, plus abordable et plus sûr», a écrit avec un enthousiasme quelque peu irrationnel Fatih Birol, le directeur exécutif de l’AIE.  Selon l’Agence, les investissements dans le monde dans la transition devraient atteindre 2.000 milliards de dollars par an d’ici 2030.

Mais l’année 2022 a aussi été celle du charbon…

Mais il existe une raison encore plus forte derrière le boom des investissements dans la transition, le fait que ses technologies sont devenues souvent plus compétitives avec l’envolée des cours du gaz et dans une moindre mesure du pétrole et du charbon. Cela a rendu notamment plus compétitive la production d’électricité éolienne et solaire et cela même si l’intermittence contraint de doubler les équipements existants quand il n’y a pas de vent ou pas de soleil.

Cela dit, et pour modérer un peu l’enthousiasme, l’année 2022 a aussi été celle du charbon, indispensable quand les renouvelables intermittents produisent peu ou quand le gaz est trop cher… Cela a conduit dans de nombreuses régions du monde, y compris l’Europe et les Etats-Unis, pas seulement la Chine, à faire fonctionner à plein régime les centrales à charbon. L’Allemagne a relancé des centrales à charbon mises en sommeil depuis dix ans. Berlin a prolongé l’utilisation de ses centrales auparavant mises en veilleuse jusqu’en mars 2024. L’Allemagne a ainsi remis en marche suffisamment de capacités de production électrique alimentées au charbon pour répondre aux besoins de 5 millions de foyers. Et elle a relancé l’activité minière. Des affrontements se sont ainsi produits le mois dernier il y à Lützerath entre les forces de l’ordre et des militants écologistes opposés à l’extension de la mine de lignite à ciel ouvert de Garzweiler, l’une des plus grandes d’Europe. Les militants ont été chassés. Les excavatrices sont en activité à Garzweiler depuis 2006 sur une superficie de presque 50 km2. Et l’Allemagne n’est pas un cas isolé en Europe. La Pologne, l’Autriche, la Grèce, les Pays-Bas ont aussi augmenté la cadence de production de leurs centrales à charbon.

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