Le très attendu BP Energy outlook 2023 (Prévision énergétique 2023 de British Petroleum) a été rendu public le 30 janvier et dresse comme tous les ans un tableau précis de la situation énergétique mondiale. BP souligne notamment que «la guerre a des effets durables sur le système énergétique mondial». Ainsi, la perturbation de l’approvisionnement énergétique mondial et les pénuries résultant de l’invasion de l’Ukraine par la Russie augmentent l’importance de trois éléments clés de l’équation énergétique: la sécurité d’approvisionnement, des prix abordables pour les consommateurs et la durabilité. Mais BP se veut également optimiste sur la transition et souligne que «l’accent accru mis sur la sécurité énergétique accroît la demande d’énergies renouvelables produites dans les pays et d’autres combustibles non fossiles, contribuant ainsi à accélérer la transition énergétique».
En tout cas, BP s’en tient toujours à 3 scénarios pour «explorer l’éventail des évolutions possibles du système énergétique mondial au cours des 30 prochaines années.» La compagnie pétrolière précise bien «que ce ne sont pas des prédictions de ce qui est susceptible de se produire ou de ce que BP aimerait qu’il se produise. Ils explorent les implications possibles de différents jugements et hypothèses concernant la nature de la transition énergétique et les incertitudes entourant ces jugements. Les scénarios sont basés sur des technologies existantes et ne tiennent pas compte de l’impact possible de technologies entièrement nouvelles ou inconnues.»
Des scénarios actualisés pour tenir compte de la guerre et du changement de politique énergétique aux Etats-Unis
Les trois scénarios ont été actualisés «pour tenir compte de deux développements majeurs au cours de l’année écoulée: la guerre Russie-Ukraine et l’adoption de l’Inflation Reduction Act aux États-Unis». Sinon, il y a toujours un scénario de poursuite de la tendance actuelle dit New Momentum et deux autres plus ambitieux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre baptisés Accelerated et Net Zero.
-Le scénario tendanciel New Momentum prolonge l’évolution actuelle du système énergétique mondial. Les émissions mondiales de gaz à effet de serre atteindraient ainsi un pic au cours des années 2020 et seraient, en 2050, inférieures d’environ 20% à leur niveau de 2019. La consommation mondiale d’énergie finale augmente jusqu’en 2040 et se stabilise ensuite avec une demande mondiale en 2050 supérieure de 10% au niveau de 2019.
-Dans les deux autres scénarios Accelerated et Net Zero, la réduction des émissions est de près de 75% et 95% respectivement d’ici la moitié du XXIe siècle, par rapport à 2019. Ces deux scénarios sont censés être compatibles avec l’objectif de limiter la hausse de la température mondiale moyenne entre 1,5°C et 2°C (d’ici à 2100 par rapport aux niveaux de l’ère préindustrielle). Dans ces deux scénatios, la consommation mondiale d’énergie finale en 2050 est inférieure de 15 et 30% au niveau de 2019.
L’évolution de la consommation des énergies fossiles fait toute la différence
Evidemment, ce qui distingue avant tout les trois scénarios est l’évolution de la consommation des énergies fossiles. Dans New Momentum, BP estime que ces énergies seront encore majoritaires dans le paysage énergétique de 2050, avoisinant alors 55% de la consommation mondiale d’énergie primaire contre plus de 80% en 2019 et en 2022. Dans le scénario Net Zero, la part des énergies fossiles dans le mix mondial s’effondre à 20%. Et en contrepartie, la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique mondial (en pourcentage d’énergie primaire) se situe entre 35% et 65% à l’horizon 2050 selon les scénarios (contre 10% en 2019).
BP mentionne toutefois «quelques traits communs» au cours des prochaines décennies dans les 3 scénarios, en particulier un développement rapide de l’éolien et du solaire liés à l’électrification du système énergétique. La part de l’électricité dans la consommation finale d’énergie passe de près de 20% en 2020 à 30% en 2050 dans le scénario New Momentum et à près de 50% dans le scénario Net Zero.
L’hydrogène devient indispensable
Pour que les scénarios Accelerated et Net Zero fonctionnent BP estime que l’éolien et le solaire doivent compter pour près de 70% de la production mondiale d’électricité à l’horizon 2050. Mais pour que des productions intermittentes ne fassent pas s’effondrer les systèmes électriques mondiaux, le recours à l’hydrogène est considéré comme indispensable pour apporter de la flexibilité tout comme la production d’électricité nucléaire. Cette dernière augmente de 80% dans Accelerated et fait plus que doubler dans Net Zero comptant alors toujours pour près de 10% de la production mondiale d’électricité.
Enfin, ajoutons que BP intègre aussi dans ses scénarios Accelerated et Net Zero une très forte croissance de la consommation mondiale d’hydrogène à la fois dans les transports et dans l’industrie entre 2030 et 2050 comme seul véritable substitut dans ces domaines d’activité aux carburants fossiles. Cet hydrogène serait produit à partir de sources renouvelables mais également à partir d’énergies fossiles avec des dispositifs de capture et de stockage de CO2.