<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Ce que contient la nouvelle loi sur les renouvelables

11 janvier 2023

Temps de lecture : 4 minutes
Photo :
Abonnement Conflits
Abonnement Conflits

Ce que contient la nouvelle loi sur les renouvelables

par

La loi adoptée mardi 10 janvier à l’Assemblée en première lecture, visant à accélérer le déploiement des énergies renouvelables éolienne et solaire en France, peut se résumer à deux types de mesures. Une série visant à limiter les possibilités de recours locaux contre l’installation de parcs éoliens terrestres et marins et une autre permettant de récupérer plus facilement des terrains et des surfaces pour installer des panneaux photovoltaïques. Reste que la production d’électricité en France est déjà décarbonée à plus de 90% et que la transition énergétique pour être réellement efficace devrait avoir d’autres priorités.

En dépit de leurs limites, l’intermittence, que l’on mesure particulièrement en hiver et lors des périodes de grand froid et de canicule (peu de vent), la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables (éolien et solaire) est une priorité en France comme en Europe. Mais elle se heurte à des obstacles physiques, les éoliennes et les panneaux solaires demandent une importante emprise au sol, et sociétaux, les oppositions locales farouches notamment aux éoliennes terrestres et marines.

Selon des calculs effectués par les experts du World Economic Forum, l’emprise au sol des panneaux photovoltaïques est de 22 mètres carrés par MWh (Mégawatt heure) produit. Elle est comprise entre 8,4 et 247 mètres carrés par MWh pour les éoliennes terrestres. Et par comparaison, elle est de 0,7 mètre carré par MWh pour le nucléaire. Ajoutons qu’il est d’autant plus nécessaire d’installer de très grandes quantités d’équipements en mobilisant toujours plus de surfaces que la production réelle des éoliennes terrestres correspond en moyenne dans l’année à seulement 23% de leur capacité nominale et celle des panneaux photovoltaïques a à peine 14% de cette même capacité nominale.

Circonvenir les oppositions locales

Pour accélérer le déploiement des renouvelables en France, le gouvernement a donc décidé de contourner les oppositions locales via une nouvelle loi. Elle a été adoptée mardi 10 janvier à l’Assemblée en première lecture. Une commission mixte réunira des députés et sénateurs, a priori le 24 janvier, pour tenter d’établir un texte de compromis, en vue d’une adoption définitive en février. La loi consiste en résumé à alléger les procédures administratives, installer des panneaux solaires en bord d’autoroute et sur les parkings où les surfaces sont disponibles et à développer massivement l’éolien en mer.

Le projet de loi d’accélération des énergies renouvelables doit ainsi permettre à la France de rattraper ce que certains, notamment les lobbys éolien et solaire, présentent comme un retard… Ce qui est absurde. L’objectif poursuivi par la transition consiste à décarboner la production d’électricité. Ce qui est déjà le cas en France à 90% avec le nucléaire, l’hydroélectrique et ce qui existe d’éolien et de solaire. Vouloir rattraper les pays qui ont une part bien plus importante d’éolien et de solaire dans leur production d’électricité, comme l’Allemagne, mais sont obligés de recourir massivement aux centrales au charbon et à gazquand il n’y a pas de vent ou de soleil n’a aucun sens.

En tout cas, Emmanuel Macron a fixé comme objectifs à ses successeurs d’ici 2050 de multiplier par dix la capacité de production d’électricité solaire pour dépasser les 100 GW, de multiplier par deux les capacités éoliennes terrestre pour atteindre 37 GW et de déployer 50 parcs éoliens en mer représentant 40 GW. Pour y parvenir, il faut réduire les délais entre le lancement d’un projet et son achèvement. Il faut en moyenne en France 5 ans de procédures pour construire un parc solaire, 7 ans pour un parc éolien terrestre et 10 ans pour un parc éolien en mer. Et il faut savoir que 80% des projets renouvelables font l’objet de recours, surtout pour l’éolien.

Donc il s’agit avant tout de limiter les recours, de ne surtout pas accorder de droit de veto aux maires et de ne pas imposer une distance minimale des côtes pour l’éolien en mer. Le texte prévoit ainsi des adaptations dites «temporaires» des procédures administratives. Pour cela, les projets d’énergies renouvelables seront considérés juridiquement comme répondant à une «raison impérative d’intérêt public majeur».

Pas de veto des maires

Dans cette logique, il n’est évidemment pas question d’un veto des maires que réclamaient des députés LR. Après un compromis trouvé au Sénat, les communes pourront toutefois faire remonter – dans un dispositif baptisé magnifiquement de «planification ascendante» – les zones d’accélération prioritaires où déployer des projets d’énergies renouvelables. Heureusement que la simplification est en marche. On devrait tout de même échapper au pire, puisqu’à l’exception des productions sur les toitures, ces zones ne pourront être incluses dans les parcs nationaux et les réserves naturelles.

Le reste, c’est de la communication, des bonnes intentions et de l’habillage. L’Assemblée a adopté des amendements écologistes pour instaurer un observatoire et un médiateur des énergies renouvelables. Pour une meilleure «acceptabilité», les députés ont ajouté un vague objectif paysager au texte incitant les collectivités à «veiller à limiter les effets de saturation visuelle»… des éoliennes. Et puis pour calmer la colère des régions, les Hauts de France notamment, l’Est et la Bourgogne d’ores et déjà saturés d’éoliennes, et éventuellement mieux les répartir sur le territoire, le texte rend possible une modulation tarifaire qui inciterait les développeurs de projets à s’installer dans des zones aux conditions naturelles moins favorables, c’est-à-dire le sud du pays. Cette modulation n’est sans doute pas prête de voir le jour… L’Assemblée a par ailleurs renoncé à un principe de ristourne sur la facture d’électricité des riverains d’énergies renouvelables.

Des panneaux solaires au bord des autoroutes et sur les toits des parkings

Le projet de loi facilite l’installation de panneaux photovoltaïques aux abords des autoroutes et grands axes. Il permet de déroger à la loi Littoral pour l’implantation de panneaux dans des «friches» et facilite leur implantation dans les communes de montagne. Il impose aussi l’équipement progressif des parkings extérieurs de plus de 1.500 m2 avec des ombrières photovoltaïques.

L’accélération la plus spectaculaire devrait concerner l’éolien en mer avec la mutualisation des débats publics sur la localisation des projets. En clair, l’objectif est de limiter par tous les moyens les oppositions locales. L’Assemblée a rejeté des amendements LR réclamant que les zones d’implantation soient situées à une distance minimale de 40 km du rivage. Seront toutefois «ciblées en priorité des zones propices situées dans la zone économique exclusive» (un peu plus de 22 km des côtes), ce qui ne garantit rien. Le texte s’est aussi et enfin mêlé -pourquoi ?- de définir «l’agrivoltaïsme» qui consiste à combiner exploitation agricole et production d’électricité. La production agricole devrait rester «l’activité principale» ou les installations être «réversibles».

Un autre texte sur l’énergie, dédié au nucléaire cette fois, sera en débat au Sénat, à partir du 17 janvier. Il y a urgence. La loi en vigueur suppose toujours qu’à l’horizon 2035, aucun nouveau réacteur ne soit construit tandis que 14 existants doivent être arrêtés après les deux de Fessenheim en 2020.

À propos de l’auteur

La rédaction

La rédaction

Newsletter

Voir aussi

Share This