<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Vers un rationnement du diesel

22 mars 2022

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : Car diesel tank cap
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Vers un rationnement du diesel

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Après la Chine à la fin de l'année dernière, l'Angleterre envisage maintenant un rationnement dès le mois d'avril de la fourniture de diesel. Les stocks en Chine, aux Etats-Unis et en Europe sont au plus bas. Les raffineries sont incapables de fournir les quantités nécessaires pour répondre à la demande et l'Europe est particulièrement dépendante des importations russes de diesel déjà raffiné...

Le premier danger aujourd’hui pour l’économie française et même européenne, ce n’est pas l’envolée des prix des carburants, c’est le risque de pénurie et du plus important d’entre eux, le diesel. Les médias et les politiques sont préoccupés avant tout depuis le 24 février et l’invasion de l’Ukraine par la Russie des fluctuations des cours du baril de pétrole. Ils ont tort, le principal risque pour les économies est celui d’une pénuries de diesel pour les véhicules, de mazout pour les chaudières et même de kérosène pour les avions…

Rationnement en Chine, envisagé en Angleterre et pénuries ponctuelles dans de nombreux pays

Après la Chine à la fin de l’année dernière, l’Angleterre envisage aujourd’hui un rationnement du diesel et espère éviter les achats paniques dans les stations services. Des pénuries ponctuelles existent en France, dans l’ouest notamment, mais aussi en Allemagne, en Hongrie ou en Suède. les pétroliers Shell et BP ont décidé de suspendre leurs ventes de diesel en Allemagne pour éviter de futures pénuries. Ce n’est pas sans raison si le prix du litre de diesel a dépassé depuis plusieurs semaines celui de l’essence sans plomb 95.

Ce carburant est tout simplement indispensable aux transports de personnes et plus encore de marchandises et dans une moindre mesure pour le chauffage des bâtiments. S’il se vend aujourd’hui en France et dans toute l’Europe bien plus de véhicules neufs à moteur essence et hybrides que diesel, ce carburant représente encore un poids écrasant de la consommation. Compte tenu de son rôle exclusif dans le transport routier, l’agriculture et le BTP et du parc considérable de voitures à motorisation diesel, en février dernier ce carburant représentait 75,7% de la consommation française totale de carburants routiers. Le risque le plus important aujourd’hui est que le 1er avril prochain, date à laquelle s’appliquera la remise de 15 centimes par litre de carburant accordée par le gouvernement, les stations services se trouvent à sec.

Stocks au plus bas en Chine, aux Etats-Unis et en Europe

La crise du diesel remonte bien avant la guerre en Ukraine. Les stocks sont au plus bas en Chine, aux Etats-Unis et en Europe depuis des mois. A la fin de l’année dernière, Pékin a même instauré un rationnement pour les camions avec une limite de 100 litres par jour.

Aujourd’hui, les stocks américains n’ont jamais été aussi bas depuis 14 ans. Et les Etats-Unis ne sont pas en mesure de les reconstituer pour des raisons avant tout techniques. Si le très léger pétrole de schiste qu’ils produisent en grandes quantités convient à merveille pour fabriquer du plastique voire de l’essence, il n’est pas assez riche pour raffiner en quantité du diesel ou du kérosène.

Quant à l’Europe, avec la guerre en Ukraine, elle est maintenant privée du diesel Russe. Sur 1,4 million de barils par jour de diesel importés par l’Europe en 2019, la moitié, soit 685.000 barils, provenait de Russie et une grande partie du solde venait des raffineries d’Arabie Saoudite avec 285.000 barils. «En 2020, la France a importé 25 millions de tonnes de gazole dont un quart était du gazole russe, à peu près 6 millions de tonnes» expliquait récemment à l’AFP Olivier Gantois, le patron de l’Union Française des Industries Pétrolières (UFIP).

Non seulement, l’Europe importe beaucoup de diesel de Russie, mais également de ce pays des produits pétroliers transformés pour que ses raffineries puissent distiller le brut en diesel. Dernier point et non des moindres, les raffineries européennes peinent d’autant plus à distiller le diesel du fait de la très forte hausse des prix du gaz naturel. Le gaz est utilisé pour fabriquer de l’hydrogène qui permet de nettoyer le soufre, très polluant, du diesel. Dans les conditions actuelles, le processus n’est tout simplement plus rentable… Les raffineurs travaillent à perte.

Des solutions aujourd’hui très limitées

Une des possibilités serait d’importer du pétrole plus léger en soufre (doux) comme ceux produits par l’Angola et le Nigeria. Il y a deux grandes sortes de pétrole, le doux et l’acide. L’acide contient beaucoup plus de soufre. Mais ces deux pays semblent incapables d’augmenter leur production. L’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis tout comme le Venezuela et l’Iran (si l’embargo américain est levé à la suite d’un accord sur son programme nucléaire) pourraient produire plus. Mais leurs pétroles sont très chargés en soufre. Importer du diesel déjà raffiné semble aussi très compliqué. La Chine a les capacités de raffinage pour le faire, mais devant l’ampleur de la pénurie, Pékin a réduit ses exportations et garde le carburant pour son marché intérieur. L’Arabie Saoudite et l’Inde en font de même…

Shell et l’autrichien OMV AG ont commencé à restreindre leurs approvisionnements en gros. Dans les compagnies pétrolières, tout le monde est conscient du risque mais refuse de mettre en garde le grand public par crainte de provoquer une ruée panique sur les stations-service. L’Angleterre se prépare à un rationnement à partir du mois d’avril. On imagine pareille situation en France à quelques jours du premier tour de l’Election présidentielle.

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