La Loi d’Orientation des Mobilités votée à l’Assemblée Nationale le 18 juin comporte notamment un article qui stipule la fin de la vente de «véhicules à énergies fossiles carbonées d’ici 2040». Les modèles neufs 100% thermiques seront interdits. Il devrait en être de même pour les hybrides.
Est-ce qu’un tel scénario est réaliste ou juste une posture politique? A en croire la lettre envoyée le 3 juin dernier au gouvernement anglais par le Professeur Richard Herrington, qui dirige le département des sciences de la terre au Natural History Museum de Londres, et sept de ses collègues, remplacer tous les véhicules thermiques par des électriques aurait des conséquences très lourdes sur les ressources de la planète en matière premières.
Ainsi avoir uniquement des véhicules électriques en 2050 au Royaume Uni… nécessiterait de doubler la production mondiale de cobalt, presque la totalité de la production mondiale actuelle de neodymium, les trois quart de la production mondiale de lithium et la moitié de la production de cuivre. Uniquement pour le Royaume-Uni!
«Le besoin urgent de réduire les émissions de CO2 pour assurer l’avenir de la planète est clair. Mais il y a des conséquences lourdes pour nos ressources naturelles, non seulement pour produire des technologies vertes comme les voitures électriques mais aussi pour les charger», explique le Professeur Richard Herrington.
«Au cours des prochaines décennies, l’offre mondiale de matières premières doit changer profondément pas seulement pour permettre la transformation du Royaume Uni vers une économie faiblement carbonée mais celle du monde entier. Notre mission de scientifiques est de fournir des éléments pour trouver le meilleur moyen d’avancer vers une économie décarbonée. La société doit comprendre qu’il y a un coût de matières premières pour devenir vert et que de nouveaux investissements et de nouvelles recherches sont urgents pour nous permettre d’évaluer de nouvelles façons de nous les procurer», ajoute-t-il
Si on extrapole les chiffres calculés pour le Royaume Uni a l’ensemble du monde, cela revient à dire qu’il faut au minimum que d’ici 2050 la production de néodyme et de dysprosium augmente de 70%, celle de cuivre double et celle de cobalt soit multipliée par trois et demi.
Et cela ne tient pas compte du coût énergétique d’extraction et de traitement de ces matières premières et du fait que les sources d’énergie renouvelables, éolien et solaire, utilisent également beaucoup de matières premières et de métaux et qu’elle seront d’autant plus nécessaire qu’il faudra recharger avec des énergies propres des centaines de millions de véhicules électriques…
D’ici 2050 et toujours selon les calculs du Professeur Herrington, la production massive d’éoliennes nécessiterait plusieurs années de production de cuivre et 10 années de néodyme et dysprosium. Les cellules photovoltaïques des panneaux solaires sont dépendantes de plusieurs matériaux dont les ressources sont considérées comme «critiques» par l’Union Européenne et le Département américain de l’énergie comme du silicium de grande pureté, de l’indium, du tellure, du gallium…