<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Décarboner le ciment, une tâche herculéenne

8 janvier 2024

Temps de lecture : 2 minutes
Photo : Bétonnière Wikimedia Commons
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Décarboner le ciment, une tâche herculéenne

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Le ciment est le premier produit manufacturé sur terre, par sa masse. Mais sa fabrication produit 8% des émissions annuelles mondiales de CO2. La capture est le seul moyen de les réduire significativement. Par Léon Thau. Article paru dans le numéro 19 du magazine Transitions & Énergies.

Il est difficile spontanément de mesurer l’importance du ciment. Et pourtant, il s’agit de la deuxième matière la plus utilisée sur terre derrière… l’eau. Le ciment est un élément indispensable du monde moderne. Il est le liant qui permet de fabriquer le béton, matériau omniprésent et indispensable à la construction, au bâtiment comme aux travaux publics, dans les pays riches comme dans les pays en développement. Il se fabrique la quantité colossale de 5 milliards de tonnes de ciment et sa production seule représente 8% des émissions mondiales annuelles de CO2. La moitié de ces émissions provient de la réaction chimique inhérente au processus de fabrication.

Changer les processus de fabrication et capturer le CO2

Le ciment actuel dit Portland est fabriqué en portant un mélange de calcaire et d’autres minéraux à 1450°C. Un processus qui déclenche des réactions chimiques et émet beaucoup de CO2.Il faut donc à la fois utiliser des matériaux alternatifs qui permettent d’émettre moins de carbone (cendres de charbon, laitier de haut fourneau, argiles calcinées, pouzzolanes[roches volcaniques], cendres végétales, fumées de silice) et capturer le CO2toujours émis. Les nouveaux ciments bas-carbone permettent d’émettre moins de 400 kg de CO2par tonne contre 625 kg en moyenne pour le ciment classique dit Portland.

Les défis sont immenses. L’échelle des transformations à effectuer est colossale tout comme les niveaux d’investissement pour les cimentiers qui nécessitent des aides gouvernementales massives.Cela va conduire à des recompositions industrielles et financières et à un changement des méthodes de travail de toute la filière du bâtiment et des travaux publics. Certains bétons décarbonés sont plus fluides et requièrent des changements de comportement des ouvriers lors des coffrages ou du coulage du béton afin d’assurer aussi bien l’étanchéité du matériau que leur propre sécurité.

Et il faut faire cela sans déstabiliser l’écosystème de la construction. En France, il représente près d’un demi-million de personnes, de l’architecte au maçon, en passant par les cimentiers, ingénieurs de bureaux d’étude, industriels du préfabriqué et constructeurs.

Il est de toute façon impératif de capturer le carbone et de le stocker, soit dans le ciment directement lors de la fabrication de béton, soit sous terre. L’un des exemples à suivre vient du Canada. En avril, le cimentier Heidelberg Materials a signé un accord avec le gouvernement canadien pour la construction d’une unité d’un milliard de dollars destinée à capturer 1 million de tonnes de carbone par an dans son usine d’Edmonton, ce qui représente 95% des émissions totales. L’usine canadienne stockera ses émissions sous terre. En tout, Heidelberg a aujourd’hui neuf projets de capture et stockage du carbone dans le monde en Amérique duNord et en Europe. Les deux premiers à être opérationnels sont donc à Edmonton et à Brevik en Norvège. L’usine norvégienne devrait capter 400000 tonnes deCO2par an–50% des émissions–et les stocker en mer du Nord dans un ancien gisement de gaz.Heidelberg n’est évidemment pas le seul, Lafarge et Vicat, par exemple, ont aussi des projets pilotes. En France, la cimenterie de Montalieu-Vercieu de Vicat en Isère, la plus importante du pays et l’une des plus modernes, doit commencer à capturer et à stocker duCO2à partir de 2027.

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