La chronique publiée mercredi 5 juin par l’Eurasia Review ne peut laisser indifférent. Elle est signée Todd Royal, un expert en énergies de Ascendance Strategies, une firme spécialisée dans l’évaluation des risques géopolitiques. Sa thèse est la suivante, sans énergie bon marché, les économies et les civilisations s’effondrent, la Chine et l’Inde comprennent cela aujourd’hui bien mieux que les pays occidentaux.
Ces derniers se sont lancés pour la plupart dans une course aux énergies renouvelables coûteuse économiquement, politiquement et socialement et qui aura en plus un impact très limité sur le réchauffement climatique, notamment parce que les deux pays les plus peuplés au monde, la Chine et l’Inde, ne sont pas prêts d’accepter de jouer le même jeu.
D’après Todd Royal, la Chine et l’Inde ont pour principale priorité de permettre à leurs deux milliards et demi d’habitants d’approcher des standards de vie occidentaux. La volonté de lutter contre le réchauffement climatique vient très loin derrière et seule la pollution atmosphérique dans les grandes villes les fait agir. «Ces deux pays vont continuer à importer, exporter et décharger des navires plein de charbon, de pétrole, de gaz naturels de pays autoritaires et qui n’ont rien à faire des droits de l’homme comme l’Arabie Saoudite, la Russie, l’Iran, le Venezuela, l’Irak, le Nigeria, l’Angola et l’Algérie… Il est naïf de croire que la Chine et l’Inde vont cesser d’utiliser des énergies fossiles à commencer par le charbon dont les réserves prouvées sont de 1,1 mille milliards de tonnes et qui au rythme actuel de consommation vont durer 150 ans…»
Il ajoute que la Chine construit en ce moment des centaines de centrales électriques au charbon et que l’Inde qui a 589 centrales au charbon a répliqué en programmant d’en mettre en service 446 supplémentaires. «Ces chiffres proviennent de deux gouvernements qui ont signé l’Accord de Paris sur le climat et ont ainsi obtenu leurs lettres de créances écologiques…». La rivalité entre l’Inde et la Chine n’en est qu’à ses débuts. Et celui qui utilisera le plus d’énergie sera le plus puissant et dominera le siècle de l’Asie.
Todd Royal souligne que l’Europe a oublié que l’énergie est une arme géopolitique de domination et aussi d’indépendance. Que le programme nucléaire civil français a été construit avant tout pour limiter la dépendance française envers le pétrole importé. Les Etats-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde ont les plus grandes réserves de charbon et vont continuer pendant très longtemps à les utiliser.
«C’est horrible pour les émissions, la pollution de l’air, la santé dans le monde, mais comment les occidentaux, les Nations Unies et les organisations de défense de l’environnement vont pouvoir dire à la Chine et à l’Inde qu’ils ne peuvent pas avoir accès aux même opportunités de croissance économiques et de consommation d’énergie que l’ouest depuis 70 ans?».