La capture et le stockage du CO2 dans le sous-sol, notamment dans des mines et des gisements de gaz et de pétrole, peut permettre de réduire la quantité de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Mais il faut que cette technologie soit 100 fois plus utilisée qu’aujourd’hui dans les 30 prochaines années pour avoir un impact sur le climat. Cela ne peut se faire qu’avec un soutien des Etats et des grandes entreprises.Telles sont les trois conclusions principales de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) et du World Economic Forum sur la question de la séquestration du CO2.
Le constat est assez simple, selon l’AIE aucune des dix plus grandes économies n’a été capable de réduire ses émissions liées au transport depuis 1990. Et la décarbonisation des activités industrielles reste pour l’essentiel une vue de l’esprit. En conclusion, il ne reste pas beaucoup de solutions pour limiter les quantités de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Et pourtant la capture et le stockage du carbone ou CCS en anglais (Carbon Capture Storage) est souvent ignorée voire rejetée. Claude Mandil, ancien Directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie, expliquait il y a plusieurs mois dans une tribune à Connaissance des Energies le caractère absurde et dangereux de ce rejet irrationnel, notamment en France.
Passer de 19 à 2.000 installations dans le monde
Car la capture et le stockage du carbone est une technologie qui a tout son sens dans les grandes installations industrielles qui produisent de l’acier ou du ciment et dans les centrales qui fonctionnent avec des énergies fossiles. Il peut permettre, par exemple, de produire à une large échelle de l’hydrogène «propre», c’est-à-dire sans CO2 utilisable notamment dans les transports lourds (navires, trains, camions).
Les technologies et les savoirs faire existent, même s’ils doivent être approfondis et améliorés. Mais il y a aujourd’hui en fonctionnement dans le monde 19 systèmes importants de capture et de stockage du CO2. Et il en faut au moins 2.000 selon l’AIE pour que leur impact soit significatif. Pouvoir y parvenir ne demande pas des mesures extraordinaires. Cela nécessite des engagements fermes et constants des gouvernements comme des entreprises.
Taxe carbone et finance verte
Première chose à faire, cesser de construire de nouvelles sources d’émissions de gaz à effet de serre et dans le même temps moderniser les installations existantes pour capter le CO2 quand il est fabriqué. Cela nécessite de donner un sens économique à la capture du CO2 et donc de fixer une taxe carbone à un niveau suffisamment élevé qui reflète les conséquences des émissions sur le climat. La Commission de haut niveau sur les prix du carbone estime que la valeur de la taxe carbone doit être comprise entre 40 et 80 dollars la tonne. Le Fonds monétaire international (FMI) pense qu’elle doit atteindre 75 dollars d’ici 2030 contre 2 dollars aujourd’hui. Selon les calculs de l’AIE, une taxe carbone à 40 dollars la tonne conduirait déjà à la capture de 450 millions de tonnes de CO2 par an.
Deuxième chose à faire, mobiliser la finance verte pour rendre les infrastructures industrielles et de transport compatibles avec les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les obligations vertes représentent déjà des dizaines de milliards d’euros qu’il faut canaliser vers la construction d’équipements de capture et de stockage de CO2.
La dernière étape est psychologique. Il faut vaincre les réticences d’une opinion publique mal ou pas informée qui ne veut pas de stockage, surtout dans des zones proches, et convaincre les mouvements écologistes qui craignent que la séquestration du carbone serve de prétexte pour ne pas réduire la consommation d’énergies fossiles.