Déployé à partir de 2015, le compteur électrique communicant Linky équipe désormais la grande majorité des foyers français, en dépit de résistances et de la multiplication de théories du complot sur les usages « cachés» de l’appareil et les « dangers » qu’il représente pour la santé. Il a été soupçonné, entre autres, de produire des ondes électromagnétiques nocives ou de collecter des données personnelles utilisées par l’Etat…
Une étude réalisée par l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) démontre que les micro-ondes, bornes Wi-Fi et téléphones portables émettent plus d’ondes que le compteur Linky… De plus, Linky ne transmet les informations que quelques secondes par jour, à des niveaux d’électromagnétisme qui se situent en dessous de la limite réglementaire prévue par l’Agence Nationale des Fréquences.
Une opération bien menée, des gains très limités
Aujourd’hui, près de 10 ans après le lancement de la campagne obligatoire d’installation du compteur la quasi-totalité des foyers français en sont équipés et la Cour des comptes, dans un rapport publié il y a quelques jours, dresse un bilan contrasté de ce déploiement. Plus de 35 millions de compteurs Linky ont été posés. Enedis affiche un taux de déploiement proche de 95% et appliquera à partir du 1er août 2025 des frais liés au relèvement des compteurs aux clients qui ont refusé l’installation de Linky.
En fait, le caractère obligatoire de l’installation de Linky est seulement théorique. Car Enedis n’étant pas autorisé à pénétrer sur une propriété privée, l’entreprise publique ne peut pas y installer de force un dispositif qui par ailleurs ne lui appartient pas. Les compteurs électriques ne sont pas la propriété des clients ou d’Enedis mais des collectivités locales qui les concèdent à Enedis pour le décompte de l’énergie consommée.
Jusqu’à présent, les propriétaires d’anciens compteurs d’électricité devaient déjà payer des « frais de relevé relatifs à la gestion spécifique des compteurs ancienne générations » qui s’élevaient à 54,24 euros par an. Ils pouvaient toutefois économiser les frais de la relève en l’effectuant par eux-mêmes. Mais à partir du 1er août 2025, cela ne sera plus possible. Il y aura tout de même une exception pour les foyers pour lesquels l’installation du compteur Linky est techniquement impossible.
Un coût de déploiement inférieur aux prévisions
Le déploiement des Linky s’est fait dans le calendrier prévu et même à un coût inférieur aux prévisions initiales. Cela est suffisamment rare pour être souligné. La facture s’élève à 4,6 milliards d’euros, soit 880 millions d’euros de moins que prévus.
Mais pour autant, les nouveaux compteurs n’ont pas permis les progrès escomptés et annoncés. Rappelons que Linky devait permettre :
-de facilité la gestion des réseaux et d’abaisser les coûts de maintenance en facilitant notamment les interventions à distance.
-de faciliter l’ouverture du marché de l’électricité à la concurrence, dont on sait qu’elle n’a strictement rien apporté, au contraire, au consommateur.
-et enfin et surtout, permettre une meilleure maîtrise et gestion de la demande d’électricité.
Le rapport de la Cour des comptes montre qu’il y a bien eu quelques gains dans la gestion des réseaux mais aucun sur la régulation de la consommation et encore moins sur les offres et le marché.
Aucune valeur ajoutée des nouveaux fournisseurs d’électricité
Linky a permis à Enedis et EDF d’avoir des informations en temps réel sur la consommation mais pas au consommateur d’accéder facilement à des données lui permettant d’améliorer sa gestion des achats d’électricité et de mieux l’adapter aux différents tarifs. Les décalages espérés de consommation pour réduire la demande lors des fameux pics de fin de journée, notamment en hiver, sont une illusion.
Quant aux gains commerciaux, ils sont inexistants. Il faut dire que la valeur ajoutée des nouveaux fournisseurs d’électricité a été nulle. Ils se sont contentés, grâce au dispositif invraisemblable de l’Arenh (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique), d’acheter à prix cassé une partie de l’électricité nucléaire d’EDF et de la revendre en encaissant des marges…
Depuis 2011, EDF est contraint de vendre une partie de son électricité nucléaire (100 TWh/an environ un tiers de la production) au prix cassé de 42 euros le MWh à ses concurrents fournisseurs alternatifs. Ces derniers se sont contentés de profiter de cette aubaine et de cette concurrence totalement artificielle et n’ont pas cherché à utiliser les données des compteurs Linky pour proposer à leurs clients des offres tarifaires plus sophistiquées et attrayantes que les classiques heures pleines et heures creuses HP/HC et Tempo qui existent depuis des lustres dans les tarifs réglementés de l’électricité encadrés par les pouvoirs publics.