<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Charbon: nous ne voulons pas voir le monde tel qu’il est

28 octobre 2024

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Charbon: nous ne voulons pas voir le monde tel qu’il est

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Le charbon est la principale source d’émissions de CO2 dans le monde provenant de l’énergie. En dépit de prévisions répétées depuis des années par une multitude d’institutions annonçant le déclin inéluctable du charbon grâce aux renouvelables, sa consommation dans le monde ne fléchit pas... au contraire. Elle a battu des records l’an dernier et le fera encore cette année. Il y a deux raisons à cela. Les deux pays les plus peuplés au monde, l’Inde et la Chine, n’ont pas la moindre intention aujourd’hui d’abandonner le charbon et continuent à tour de bras à construire de nouvelles centrales. Et en fait, la transition n’a pas vraiment commencé. A l’échelle mondiale, nous continuons à additionner les sources d’énergie et pas à substituer celles qui sont considérées comme « propres » aux carburants fossiles.

A en croire la quasi-totalité des institutions internationales, ONG, mouvements politiques… qui dictent les stratégies de transition énergétique, le charbon est le combustible fossile et même la matière première dont l’avenir est le plus compromis. Cela devrait même être une priorité absolue compte tenu du fait qu’il s’agit de l’énergie fossile qui émet de loin le plus de CO2 dans l’atmosphère. L’Agence internationale de l’énergie (AIE), la Statistical Review of Energy, le BP Energy Outlook, le World Economic Forum… sont unanimes. Le reflux de sa consommation dans le monde est annoncé comme imminent depuis des années. Et quels que soient les scenarios envisagés, poursuite de l’évolution actuelle ou le fameux Net zéro émissions d’ici 2050. Des prévisions qui ne se réalisent jamais…

Voir le monde à travers le prisme occidental

L’année 2014 devait ainsi marquer le pic de la demande mondiale de charbon (peak coal). Nous sommes en 2024 et la consommation de charbon va encore augmenter d’environ 1% par rapport à celle, record, de 2023.

Cette incapacité à voir la réalité en face s’explique avant tout par le fait que nous comprenons le monde à travers notre prisme occidental. L’OCDE, qui représente environ 1,2 milliard de personnes, soit 15% de la population mondiale, aura un impact assez limité sur l’évolution à venir de la population et de la consommation d’énergie dans le monde. Et pour la plupart des pays du « sud global » limiter sa consommation d’énergie et plus encore adopter le scénario de Net zéro émissions d’ici 2050 sont tout sauf des priorités. Leur principale hantise est de manquer d’énergie et d’électricité.

La Chine et l’Inde ont une énergie en abondance : le charbon

Ainsi, la région Asie-Pacifique consomme près de la moitié de l’énergie mondiale et environ la moitié de celle-ci provient du charbon. Tout simplement, parce que la Chine et l’Inde en ont en abondance. Et parce que jusqu’à aujourd’hui le monde a additionné les sources d’énergie et n’a pas vraiment commencé à substituer celles qui sont considérées comme « propres » aux carburants fossiles. Illustration, nous brûlons aujourd’hui deux fois plus de biomasse traditionnelle (bois et fumier) que nous le faisions en 1900…

La consommation d’énergie par la région Asie-Pacifique représente presque la moitié de celle du monde et près de la moitié de cette consommation provient du charbon.

On mesure le fait que la transition n’a pas vraiment commencé quand on regarde en détail l’évolution de la consommation d’énergie primaire en Chine entre 2010 et 2023. Elle a augmenté de 17% et durant cette période les renouvelables ont pris véritablement leur essor. La production d’électricité solaire a été multipliée par 48 et d’électricité éolienne par près de 7 (voir l’infographie ci-dessous). Ces chiffres sont spectaculaires, mais le charbon a ajouté dans le même temps à peu près le même nombre de TWh que l’éolien et le solaire combinés, tandis que le gaz a ajouté plus du double de cette quantité !

Source : Gouvernement chinois.

L’inde construit pour 88 GW de nouvelles centrales à charbon d’ici 2032. Le pays a aujourd’hui 28,5 gigawatts de capacités de production d’électricité au charbon en cours de construction et de plus de 50 gigawatts dont la construction doit être attribuée au cours des trois prochaines années.

Et ce n’est rien à côté de la Chine qui construit elle 243 GW de nouvelles centrales au charbon et prévoit de porter ce chiffre à 392 GW. Cela signifie que la capacité de production d’électricité en Chine à partir du charbon pourrait augmenter de 23 à 33% par rapport à son niveau de 2022.

.Et si on met ces chiffres dans leur contexte, la Chine et l’Inde ajouteront, d’ici à 2032, la totalité de la consommation de charbon de l’Europe, de l’Amérique du Nord, de l’Amérique latine, de la CEI, de l’Afrique et du Moyen-Orient.

Entre les capacités de production théorique et leur utilisation réelle: un fossé

C’est pour cela qu’il faut prendre avec beaucoup de précaution les informations abondamment et triomphalement relayées par les médias qui annoncent que l’énergie éolienne et solaire en Chine a maintenant éclipsé le charbon pour la première fois dans l’histoire. C’est vrai, mais le plus important ce ne sont pas les capacités de production théoriques mais leur taux d’utilisation réel.

Les centrales thermiques (essentiellement alimentées par le charbon) représentaient 2.853 gigawatts (GW) de capacité de production, soit 48% du total à la fin du mois de novembre 2023, selon le Conseil de l’électricité chinois. Le reste des capacités provenait de sources à faibles émission, notamment solaire (558 GW, 20%), hydraulique (421 GW, 15%), éolien (413 GW, 15%) et nucléaire (57 GW, 2%).

Mais les centrales thermiques représentent une part nettement plus importante de la production réelle (70% en 2023) tout comme le nucléaire (5%) puisque les unes et les autres ne sont pas intermittentes. En revanche, l’hydraulique (13%), l’éolien (9%) et le solaire (3%) représentent une part bien plus faible de la production réelle en regard de leur potentiel théorique.

Tandis que la part du charbon dans le total de la production électrique du pays a bien diminué de 75% à 70% au cours de ces neuf années, sa production totale a augmenté de 48%…

Quand les médias font état d’une croissance de la production d’énergie solaire de 28% d’une année sur l’autre, cela est bien plus spectaculaire que d’annoncer que la part du solaire dans la production totale d’électricité en Chine est passée de 2 à 3% au cours des quatre dernières années.

Une demande d’électricité qui augmente rapidement

Il faut enfin prendre en compte la croissance rapide de la demande d’électricité dans le pays. Elle a augmenté en moyenne de 5,5% au cours des cinq dernières années. Cela veut dire qu’il faut ajouter près du double de la totalité de la production solaire sur une année moyenne !

Le phénomène est encore plus marqué en Inde. La demande d’électricité a augmenté de 7% en 2023 et devrait connaître une croissance moyenne de 6% par an jusqu’en 2026 en raison du développement économique et démographique du pays devenu le plus peuplé au monde.

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