Il s’agit d’une forme assez inédite d’énergie hydraulique. Elle tient au fait que dans les deltas et les estuaires, l’eau douce des fleuves et des rivières rencontre l’eau salée de la mer. Cela crée un phénomène particulier : l’osmose. L’eau tend à migrer de la zone de moindre concentration vers celle de plus grande concentration. La mise en contact de ces deux flux ayant des niveaux de salinité différents produit une énergie électrique qualifiée d’osmotique.
Découverte dans les années 1950, cette forme d’énergie renouvelable et bas carbone est restée inexploitée du fait de l’absence de moyens consacrés à son développement et du coût de la fabrication de membranes dites semi perméables permettant d’utiliser l’osmose pour produire de l’électricité. En outre, le rendement est faible, environ 0,5 watt par mètre carré.
Coûts élevés mais pas d’intermittence et peu d’impact sur l’environnement
Mais cela n’enlève rien aux avantages de cette source d’énergie. D’abord, à la différence de bon nombre d’autres renouvelables, elle n’est pas intermittente. Ensuite, elle a un impact assez limité sur le paysage et l’environnement qui se limite à des rejets d’eaux saumâtres. Des arguments suffisants pour motiver son développement, notamment aux Etats-Unis et en France.
En France, l’énergie osmotique est portée par la société Sweetch Energy. A son origine, la publication en 2013 des travaux en nano-fluidique de Lydéric Bocquet, Directeur de Recherche au CNRS. L’entrepreneur Nicolas Heuzé voit dans cette étude « une vraie rupture scientifique capable de rendre cette énergie déployable à grande échelle ». En 2015, avec ses associés Bruno Mottet et Pascal Le Melinaire, il crée la seule entreprise spécialisée dans le déploiement de l’osmotique en France. Sweetch Energy a notamment développé et breveté un type particulier de membranes performantes fabriquées à l’échelle nanométrique.
Sweetch Energy, le pionnier français
Sweetch Energy devrait mettre en service avant la fin de l’année la première centrale osmotique expérimentale au monde, en Camargue, à Port-Saint-Louis-du-Rhône. Il aura fallu dix ans et un investissement de 3 millions d’euros pour Sweetch Energy, en collaboration avec la Compagnie nationale du Rhône (CNR) et EDF Hydro pour la construire.
Ce n’est pas un barrage mais un ensemble de caissons reliés par des v-canalisations contenant des membranes. Il produira au début seulement quelques dizaines de KW. L’ambition à terme est de réussir à produire jusqu’à 500 MW, ce qui reste très modeste. Le coût sera élevé, mais l’objet aujourd’hui à l’issue d’une expérimentation de deux ans est de valider la technologie, apporter une preuve tangible du concept et éventuellement passer ensuite à une échelle industrielle pour réduire les coûts. La France a des atouts géographiques pour cela avec de grands estuaires, comme par exemple celui de la Gironde.