Le stockage de l’électricité est un casse-tête qui pose de considérables problèmes à la transition énergétique en général et au développement des renouvelables intermittents en particulier (éolien et solaire). Ces derniers produisent toujours trop, quand il y a du vent et du soleil en abondance, ou trop peu quand il y a peu ou plus de soleil (la nuit) et quand il n’y a pas de vent. Voilà pourquoi plus la proportion de la production électrique qui provient des renouvelables intermittents augmente plus les réseaux électriques sont fragiles et ont besoin d’avoir en permanence des capacités de production de secours disponibles, thermiques (charbon ou gaz), nucléaire ou hydraulique.
L’électricité ne se stocke pas, elle se transforme chimiquement ou mécaniquement
En fait d’un point de vue purement physique, l’électricité ne se stocke pas. Elle se transforme chimiquement (les batteries, l’hydrogène…) et mécaniquement (en remplissant avec des pompes les barrages via les STEPs (Stations de transfert d’énergie par pompage)). Ce qui permet ensuite de reproduire de l’électricité. Ces technologies aussi utiles soient-elle ne permettent pas de « stocker » de l’électricité à l’échelle des besoins d’une région ou d’une métropole à l’exception des STEPs. Selon les statistiques du ministère américain de l’énergie, les STEPs représentent ainsi 96% des capacités de stockage à grande échelle d’électricité aux Etats-Unis. En France, les STEPs ont une capacité totale de 5 GW de puissance de turbinage. EDF exploite aujourd’hui six Stations de transfert d’énergie par pompage en France : Grand’Maison (1800 MW), Montézic (910 MW), Super-Bissorte (730 MW), Revin (800 MW), Cheylas (460 MW) et La Coche (380 MW).
STEP « terrestre »
Mais il existe aussi, en quelque sorte, des STEPs terrestre. C’est une autre façon de « stocker » mécaniquement de l’électricité en utilisant la gravité cette fois avec des gratte-ciels. Une société américaine assez méconnue, Energy Vault Holding, utilise de gigantesques blocs au lieu de l’eau. Elle vient de terminer la première installation de GESS (Gravity Energy Storage System) au monde en Chine près de Shanghai (voir la photographie ci-dessus).
Le dispositif de 150 mètres de haut est situé à côté d’un parc éolien et a une capacité de 25 MW/100 MWh, ce qui signifie qu’il est capable de fournir 25 MW d’électricité au réseau pendant 4 heures. Le système EVx d’Energy Vault utilise l’électricité renouvelable excédentaire produite par les éoliennes pour soulever d’énormes blocs composites puis il les redescend progressivement lorsque nécessaire pour faire tourner des générateurs et fournir de l’électricité au réseau.
Une efficacité énergétique de plus de 80%
Le plus intéressant est que la société affirme que son modèle peut atteindre une efficacité de plus de 80%. Cela signifie que la perte d’électricité est faible par rapport à la quasi-totalité des autres méthodes de stockage. En outre, le coût est minime. Selon Robert Piconi, le Pdg d’Energy Vault, sa technologie peut fournir de l’électricité pour un prix de revient de cinq à dix cents par kilowatt heure, bien moins cher que les batteries au lithium-ion qui coûtent environ 13,5 cents selon BloombergNEF. Robert Piconi ajoue que sa société a pour objectif d’atteindre un coût de l’électricité stocké inférieur à 5 cents par kWh.
Et l’expansion de cette technologie est déjà programmée. Energy Vault a vendu des licences pour six autres systèmes de stockage d’énergie par gravité en Chine. Il y a notamment une énorme installation de 2 GW en Mongolie intérieure et les cinq autres ont aussi des capacités très respectables allant de 100 MW à 660 MW dans les provinces de Hebei, Shanxi, Gansu, Jilin et Xinjiang.
Des hauts et des bas…
Maintenant l’aventure Energy Vault a été jusqu’à aujourd’hui mouvementée depuis sa création en 2017. Elle a été contrainte de redessiner totalement son système gravitationnel pour des raisons de sécurité et d’efficacité et de vendre des systèmes de stockage par batteries chimiques à ses clients pour survivre. Les actions d’Energy Vault ont perdu plus de 85% depuis leur introduction en Bourse en 2022.