Les pompes à chaleur sont une solution technique tout simplement incontournable. Parce qu’à niveau de confort équivalent, elles permettent en général de consommer entre trois et cinq fois moins d’électricité qu’un radiateur pour chauffer une habitation ; parce qu’il s’agit d’une véritable source d’énergie renouvelable. Elles fabriquent de l’énergie à partir des calories présentes de manière illimitée dans l’air, l’eau ou le sol. Et cette énergie peut être utilisée pour le chauffage, la climatisation et l’eau chaude sanitaire. Enfin, l’effort de sobriété a plus d’impact sur la consommation avec un tel équipement qu’un système de chauffage traditionnel.
Les pompes à chaleur permettent de réduire la consommation d’énergie, incitent de fait à la sobriété et s’inscrivent dans la logique de l’électrification et donc la décarbonation des usages.
Les pompes à chaleur offrent en fait quasiment la seule possibilité de diminuer sensiblement la consommation d’énergie à niveau de confort équivalent
Et cela, compte tenu du fait qu’entre 2000 et 2021, la consommation moyenne d’énergie finale dans le secteur résidentiel en France est restée constante, aux alentours de 500 TWh/an. Et compte tenu également du fait que le taux de renouvellement du parc immobilier est faible et lui aussi constant au cours des cinquante dernières années (environ 1,35 %/an). Nous construisons en moyenne 350 000 logements neufs par an. Cela est lié aux contraintes réglementaires et économiques pesant sur le marché immobilier et un relativement faible accroissement de la démographie sur notre territoire. Nous sommes passés de 53 millions d’habitants en 1975 à 65 millions en 2019, soit un taux d’accroissement moyen de 0,47 % par an.
Il faut ajouter à ce constat le renforcement drastique des réglementations thermiques dans la construction neuve comme en matière de rénovation énergétique du parc au cours des vingt dernières années. Un renforcement qui a eu en fait un impact faible sur nos consommations globales d’énergie finale dans le secteur résidentiel et les émissions de gaz à effet de serre. Nous continuons à dépenser à tour de bras de l’argent public, annonce après annonce, pour financer la rénovation énergétique de nos bâtiments sans mesurer et étudier l’impact de nos décisions.
Les pompes à chaleur sont une incitation à être sobres énergétiquement
Depuis l’an 2000, seule l’année 2022 a enregistré une baisse de 15 % de la consommation de l’énergie finale dans le secteur résidentiel. Ce sont donc les efforts de sobriété des Français pendant la crise énergétique, liée notamment à l’envolée des prix, et un hiver plutôt clément qui ont permis d’avoir le meilleur résultat sur la baisse des consommations au cours des vingt dernières années. Ce constat renforce les résultats de l’étude sur le fameux effet rebond menée par des chercheurs de l’université de Cambridge. À savoir que quand les performances énergétiques augmentent, la consommation finit aussi par augmenter…
Les chercheurs ont suivi la consommation d’énergie de 55 000 logements avant et après rénovation énergétique. Ils ont tous constaté une baisse de la consommation d’énergie juste après la fin des travaux de rénovation énergétique, mais un retour à une consommation identique avant les travaux entre deux et quatre ans… Ils en ont déduit que, après s’être privés de chauffage et avoir eu froid dans leur logement pour faire des économies, les habitants se rendent compte qu’ils peuvent augmenter le chauffage et leur confort en dépensant le même budget énergie qu’avant rénovation. Un problème qui n’existe pas ou peu avec une pompe à chaleur qui par construction réduit la consommation d’électricité.
La pompe à chaleur s’inscrit aussi parfaitement dans la logique de la transition qui consiste à électrifier les usages
Il s’agit en fait de la façon la plus efficace de réduire les émissions de gaz à effet de serre, car décarboner l’électricité est relativement facile, plus en tout cas dans un premier temps que remplacer les carburants fossiles par des carburants bas-carbone. La France en offre un bon exemple puisque plus de 90 % de l’électricité qu’elle produit est décarbonée, nucléaire, hydraulique et renouvelable.
Le principe de la pompe à chaleur
Ce principe consiste à extraire de l’énergie sous forme de calories à un milieu froid (source froide) pour les restituer à une température plus élevée à l’intérieur d’une habitation par exemple (source chaude).
Ce transfert d’énergie se fait par l’intermédiaire d’un fluide frigorigène circulant à l’intérieur d’un circuit fermé. Un compresseur et un détendeur vont modifier la pression du fluide tout au long de son parcours. Ce changement d’état du fluide frigorigène, entre basse et haute pression, permet alternativement de capter et de restituer les calories pour les besoins en chauffage.
Le coefficient de performance
La performance d’une installation est définie par le COP (coefficient de performance) qui est le rapport entre l’énergie totale obtenue sur l’énergie dépensée. Plus le COP est élevé, meilleure sera la performance de la pompe à chaleur. Pour exemple, un chauffage électrique possède un COP de 1 alors qu’une pompe à chaleur peut avoir un COP de 5. On dépensera donc cinq fois moins d’énergie pour obtenir une température de chauffage équivalente. Le COP est largement dépendant du type d’installation de pompe à chaleur et du climat local.
Où puiser les calories ?
- Dans l’air (aérothermie)
La mise en œuvre est simple et bon marché. Le système est peu encombrant et ne nécessite pas de gros travaux. Ce type de pompe à chaleur est particulièrement bien adaptée à la rénovation. La performance est correcte pour une zone climatique tempérée avec des températures extérieures allant jusqu’à -10 °C.
Mais cette installation a des inconvénients. Les performances sont insuffisantes dans les régions froides à partir de températures extérieures de -15 °C. La ventilation extérieure génère du bruit et peut occasionner des nuisances pour le voisinage. Dans les zones protégées par les architectes des bâtiments de France, il est souvent interdit de fixer une unité extérieure individuelle en façade.
- Dans l’eau (aquathermie)
Le principe est de récupérer des calories en pompant l’eau d’une nappe phréatique et le coefficient de performance COP est généralement excellent puisque les calories sont extraites de l’eau dont la température est constante dans la nappe phréatique (entre 11 et 13 °C). Ce dispositif fonctionne parfaitement indépendamment des conditions climatiques extérieures et quelle que soit la zone géographique.
Mais l’eau n’est pas disponible partout et en quantité suffisante. Les longues périodes de sécheresse, comme nous l’avons vécu ces deux dernières années, ont un impact sur le niveau des nappes phréatiques qui vont influencer la fiabilité du dispositif. Pour fonctionner correctement et éviter la casse du matériel, le débit de pompage doit être constant. Il est également indispensable de déclarer le puits aux autorités compétentes, car le pompage de la nappe est réglementé en France. Enfin, la consommation électrique et l’entretien de la pompe de relevage pour pomper l’eau de la nappe diminuent la performance globale du système.
- Dans la terre (géothermie)
Le potentiel de développement de cette énergie renouvelable est très important. Actuellement, en France métropolitaine, la géothermie de surface fournit seulement 3 % de la chaleur renouvelable, soit un peu plus de 1 % de la chaleur totale produite en France. En 2021, le secteur résidentiel a consommé 492 TWh d’énergie finale, dont 138 TWh de gaz naturel directement importé (1 TWh = 1 milliard de kWh). Le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) estime à 100 TWh annuels le potentiel d’économie de gaz possible d’ici quinze à vingt ans grâce à la géothermie de surface.
Le principe de fonctionnement est le suivant : il s’agit de réaliser un forage entre 5 et 200 mètres de profondeur pour récupérer les calories présentes dans la terre afin d’alimenter les besoins en chauffage et en refroidissement des habitations par l’intermédiaire d’une pompe à chaleur.
Plus on descend en profondeur et moins le sous-sol est influencé par les phénomènes climatiques comme le vent, la pluie, la température et le soleil. Par exemple, à partir de 1,50 mètre de profondeur, l’hiver ne provoque plus le gel de la terre. Il s’agit d’une énergie renouvelable inépuisable à disposition dans le sous-sol. Elle n’a aucun impact sur nos paysages et ne rejette pas de gaz à effet de serre. Elle est disponible en permanence, contrairement à d’autres énergies renouvelables intermittentes comme l’éolien et les panneaux solaires.
C’est une solution stable en hiver, car elle est indépendante de la température extérieure et des conditions climatiques. La pompe à chaleur par géothermie couvre la totalité des besoins calorifiques de l’habitation. Elle permet même de produire du froid de manière décarbonée en été pour climatiser. Elle s’adresse à tous les types de bâtiments : neuf, ancien, voire très ancien, résidentiel, tertiaire, industriel, de la maison individuelle jusqu’à des bâtiments de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés.
Le prix moyen d’une installation pour une maison individuelle est de 18 500 €. Pour des foyers modestes bénéficiant du dispositif MaPrimeRénov’ et des certificats d’économie d’énergie, le reste à charge est évalué à 4 500 €. En revanche, pour les foyers avec des revenus élevés, le reste à charge est de 16 000 €. Mais depuis le 1er mars 2023, tous les ménages qui souhaitent passer à la géothermie bénéficient d’une aide augmentée de 5 000 €, quelles que soient les conditions de revenus du foyer. Le reste à charge pour un foyer très modeste tombe donc à 3 500 € et à 13 500 € pour les foyers à revenus élevés.
L’autre avantage est que la durée de vie d’une installation géothermique est estimée à plus de cent ans. Un forage est réalisé pour une vie ! Seule la pompe à chaleur devra être changée tous les vingt à vingt-cinq ans.
Comparaison des coefficients de performance (COP) et des consommations
Le choix optimal du type de pompe à chaleur est déterminé par le climat, le type de bâtiment, les besoins en énergie, l’espace disponible et la présence ou non d’une nappe phréatique.
Comment rendre plus efficace l’installation d’une pompe à chaleur
Il est fondamental d’expérimenter à l’échelle du bâtiment ou du quartier, sur l’ensemble du territoire, les mesures d’amélioration des performances thermiques financées par des aides publiques. Nous devons comprendre précisément le comportement thermique des bâtiments avant et après travaux pour mesurer physiquement les économies d’énergie, améliorer les préconisations et industrialiser la pratique de la rénovation énergétique. Il y a beaucoup de progrès à faire. Par exemple, le modèle de calcul du DPE (diagnostic de performance énergétique) actuel ne tient pas compte du comportement thermique des bâtiments anciens construits avant 1948. Pourtant, ils représentent 30 % du parc immobilier existant ! Or, le DPE est la clé de voûte de la politique de l’État pour inciter les travaux de rénovation énergétique et interdire la location des logements considérés comme des passoires thermiques.
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte de 2015 fixe l’objectif d’atteindre un niveau de consommation de 80 kWh/m²/an en moyenne nationale pour le parc immobilier français en 2050. Pour y arriver, il faut systématiser les rénovations globales et performantes afin d’atteindre le niveau BBC (bâtiment basse consommation) en deux phases de travaux au maximum et en respectant quatre principes.
Phase 1 :
- Isoler les murs, les planchers bas sur vide sanitaire et les combles.
- Changer les fenêtres.
- Ventiler pour assurer une bonne qualité de l’air des occupants et éviter les pathologies liées à l’humidité comme les moisissures et les champignons.
Phase 2 :
- Changer le système de chauffage avec… une pompe à chaleur.
Avec une pompe à chaleur, il est très important de dimensionner l’installation après travaux d’isolation et de ventilation. Si vous démarrez par l’installation de la pompe à chaleur, elle fonctionnera à bas régime après les travaux d’isolation, car le besoin en énergie aura diminué. Ce fonctionnement en mode dégradé compromet la durabilité de l’installation. La durée de vie d’une pompe à chaleur est divisée par deux lorsqu’elle fonctionne à bas régime.
Pour optimiser, il est aussi recommandé de dimensionner la pompe à chaleur à 80 % du besoin maximum en énergie après travaux d’isolation et de compléter avec un chauffage d’appoint pour les périodes de grand froid ponctuelles.
L’effet rebond démontre que l’amélioration de l’efficacité énergétique et le progrès technologique ne sont pas les seuls leviers d’une stratégie de transition énergétique.
L’augmentation des performances est indissociable des concepts de sobriété, d’économie d’énergie et d’optimisation.