Dans un rapport rendu public il y a quelques jours, le Fonds monétaire international (FMI) dénonce le fait que les subventions mondiales au pétrole et au gaz ont atteint l’an dernier le niveau record de 7.000 milliards de dollars. Un chiffre hallucinant – le Pib mondial était l’an dernier de 101.002 milliards de dollars et celui de la France de 2.950 milliards de dollars – mais qu’il convient pourtant de prendre avec certain recul. Car le FMI précise qu’en fait 18% du montant de 7.000 milliards de dollars correspond à des subventions directes qui ont tout de même été multipliées par deux depuis 2012. En tout cas, le reste des 7.000 milliards de dollars, soit 5.740 milliards de dollars, est en fait le calcul par le FMI de la «sous-facturation pour le réchauffement climatique et la pollution atmosphérique locale» et non un soutien gouvernemental réel au pétrole et au gaz. C’est-à-dire le calcul par le FMI de l’impact environnemental lié à la consommation annuelle des hydrocarbures.
L’impact de la crise énergétique
Le rapport du FMI est paru juste quelques jours seulement après qu’une autre organisation, le International Institute for Sustainable Development (l’Institut international du développement durable), un think tank sur le climat, ait vertement critiqué le G20 pour ne pas avoir mis fin aux subventions au pétrole et au gaz en dépit des engagements pris lors de la COP26 il y a maintenant deux ans.
L’Institut a calculé que les 20 plus grandes économies du monde ont dépensé un montant record de 1,4 milliard de dollars pour soutenir les industries du charbon, du pétrole et du gaz en 2022. Pour l’auteur des calculs, Tara Laan,: «ces chiffres nous rappellent brutalement que les gouvernements du G20 continuent d’investir massivement dans les combustibles fossiles, malgré les effets de plus en plus dévastateurs du changement climatique.»
Il faut toutefois reconnaître que l’augmentation sensible des subventions directes au pétrole et au gaz l’année dernière est directement liée à la crise énergétique née en Europe à la fin de l’année 2021 et qui s’est considérablement amplifiée après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022 et les sanctions qui en ont découlé. Tous les gouvernements européens, presque sans exception, ont subventionné les carburants pour limiter la baisse de niveau de vie des populations et éviter une profonde récession.
Pour le FMI, toutes les formes de subventions doivent être supprimées
Mais l’élément sans doute le plus intéressant du rapport du FMI est son calcul estimant à 5.740 milliards de dollars les subventions mondiales aux hydrocarbures qui sont en fait les dommages causés à l’environnement par l’utilisation de ses hydrocarbures. Pour le FMI, la seule façon pour l’Humanité de mener la transition énergétique et de se passer des carburants fossiles est de les rendre trop coûteux, inabordables. Il faut donc selon le FMI considérablement augmenter leurs prix. Un raisonnement logique mais qui semble irréaliste politiquement et socialement. Quel gouvernement prendra le risque politique et économique de décider de multiplier par deux ou trois les prix des carburants fossiles? Rappelons qu’en 2022, les carburants fossiles représentaient 82% de l’énergie primaire consommée dans le monde…
«Une réforme totale des prix des combustibles fossiles permettrait de réduire les émissions mondiales de dioxyde de carbone d’environ 43% par rapport aux niveaux de référence en 2030 (ce qui permettrait de limiter le réchauffement de la planète à 1,5-2,0 degrés Celsius), tout en générant des recettes représentant 3,6% du Pib mondial et en évitant 1,6 million de décès dus à la pollution de l’air au niveau local par an», écrit le FMI.
Il considère que toutes les formes de subventions à l’industrie doivent être supprimées. «Nous estimons que la suppression des subventions explicites et implicites aux combustibles fossiles permettrait d’éviter 1,6 million de décès prématurés par an, d’augmenter les recettes publiques de 4,4 milliards de dollars et de mettre les émissions sur la bonne voie pour atteindre les objectifs de lutte contre le réchauffement de la planète».