<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> La demande mondiale de charbon n’est pas près de fléchir

1 août 2023

Temps de lecture : 4 minutes
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La demande mondiale de charbon n’est pas près de fléchir

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En matière de transition énergétique, politiques, médias, groupes de pression et institutions internationales ont souvent le plus grand mal à appréhender la réalité et les priorités. Il est plus facile de lancer de grandes croisades et de grands combats à l’efficacité douteuse et incertaine. L’anathème, le dérisoire et l’anecdotique sont devenus la règle. La meilleure démonstration de cela est fournie par le charbon. Il s’agit de l’énergie fossile qui émet le plus de gaz à effet de serre loin devant le pétrole et le gaz. Elle est aujourd’hui la principale source d’émissions de CO2 dans le monde provenant de l’énergie... En dépit de prévisions faites depuis des années par de nombreuses institutions annonçant le déclin inéluctable du charbon grâce aux renouvelables, sa consommation dans le monde ne fléchit pas... au contraire. Elle a battu des records l’an dernier et pourrait bien encore le faire cette année et en 2024. Et tout cela dans l’indifférence quasi-générale. Car avant d’atteindre le pic de consommation du pétrole, il faudrait peut-être atteindre celui du charbon.

La transition énergétique est un concept simple, du moins dans son principe. Il s’agit de remplacer les carburants fossiles par des sources d’énergies bas carbone. La première énergie fossile à disparaître, celle qui émet le plus de gaz à effet de serre, devrait être le charbon. Son déclin a d’ailleurs été annoncé régulièrement et depuis des années par une multitude d’institutions internationales. Les renouvelables et le gaz naturel devaient se substituer au charbon pour produire de l’électricité. Et c’est effectivement ce qu’il se passe… Sauf que la progression de la demande d’énergie dans le monde, et plus particulièrement en Asie, est bien plus rapide que la substitution du charbon par d’autres sources d’énergie.

Résultat, les faits ne correspondent pas aux modèles construits avec des hypothèses qui confondent les désirs et la réalité. La consommation de charbon dans le monde a augmenté de 3,3% à 8,3 milliards de tonnes l’an dernier, un nouveau record, et il sera vraisemblablement égalé et même battu cette année et en 2024. La consommation de charbon dans le monde ne baisse pas comme le reconnait le dernier rapport sur le charbon publié la semaine dernière par l’Agence internationale de l’énergie (AIE). L’investissement dans le charbon dans le monde devrait également augmenter de 10% cette année par rapport à 2022 à 150 milliards de dollars…

Consommation mondiale de charbon 2021-2023. En millions de tonnes. Chine, Inde, Etats-Unis, Union Européenne, reste du monde. Source Agence internationale de l’énergie.

L’AIE souligne que « la forte croissance en Asie [de l’utilisation du charbon] à la fois pour la production d’électricité et les applications industrielles surpasse le déclin en Europe et aux Etats-Unis ». L’Agence n’avait pourtant pas été la dernière à nous annoncer pendant des années le reflux de cette énergie… Elle ajoute « qu’en 2023 et 2024  les petits reculs de la production électrique avec du charbon ont de grandes chances d’être effacés par l’augmentation de l’utilisation industrielles du charbon, même s’il y a des variations géographiques importantes selon les régions… ».

La Chine et l’Inde consommeront cette année 70% du charbon utilisé dans le monde

« Le charbon est la principale source d’émissions de carbone du secteur de l’énergie, et en Europe et aux États-Unis, la croissance des énergies propres a entraîné un déclin structurel de son utilisation », explique Keisuke Sadamori, directeur des marchés de l’énergie et de la sécurité à l’AIE. « Mais la demande reste obstinément élevée en Asie, même si nombre de ces économies ont considérablement augmenté leurs sources d’énergie renouvelables. Nous avons besoin d’efforts politiques et d’investissements plus importants – soutenus par une coopération internationale plus forte – pour stimuler une augmentation massive des énergies propres et de l’efficacité énergétique afin de réduire la demande de charbon dans les économies où les besoins en énergie augmentent rapidement. »

L’AIE estime que la Chine et l’Inde, les deux pays de loin les plus peuplés, consommeront cette année 70% du charbon utilisé dans le monde. Leur demande a augmenté de plus de 5% au cours du premier semestre de 2023. Les États-Unis et l’Union européenne, qui représentaient ensemble environ 40% de cette consommation il y a trente ans, en assurent moins de 10% aujourd’hui.

En dépit d’investissements massifs dans les renouvelables, la Chine, qui consomme 55% du charbon dans le monde, en utilise toujours plus notamment pour compenser la faiblesse de sa production hydroélectrique du fait des sécheresses. Les vagues de chaleur qui sévissent cet été en Chine ont fait s’envoler la demande d’électricité, entraînant une consommation de charbon sans précédent dans le millier de centrales au charbon du pays. Voilà pourquoi la Chine devrait battre un nouveau record de consommation de charbon en 2023. Cela fait maintenant six années consécutives qu’elle augmente dans le pays.

Et il est difficile de la voir refluer à court et même moyen terme. L’an dernier, le gouvernement chinois a approuvé un record de 86 gigawatts de nouvelles capacités de production d’électricité à partir du charbon. Et il aura de quoi les alimenter. La production chinoise de charbon a augmenté de 4,4% au premier semestre 2023 par rapport à la même période en 2022 et les importations de charbon en Chine ont bondi depuis le début de l’année, ce qui a entraîné des niveaux records de stocks de charbon dans les centrales électriques.

Prédire la fin du charbon, la méthode Coué

Il y a une faille permanente dans les modèles et les raisonnements des institutions qui prédisent la fin du charbon. Elles négligent le lien étroit entre consommation d’énergie et niveau de vie et l’aspiration des deux-tiers de la planète à rattraper les standards de vie des pays développés. Elles oublient également comment se comportent les gouvernements quand des pénuries d’énergie se profilent. Qu’ils soient chinois, indien ou européens, ils font tout ce qui est en leur pouvoir pour les éviter, y compris dans les pays cités en exemple pour leur volonté de décarbonation. Voilà pourquoi l’an dernier le gouvernement allemand, qui comprend des écologistes dans sa coalition et qui donne des leçons à l’Europe entière, notamment la France, sur la transition énergétique, a décidé quand la menace de pénurie de gaz grandissait avec la guerre en Ukraine de réactiver des centrales à charbon mises en sommeil…  Enfin, le charbon a pour lui plusieurs immenses avantages, il est relativement peu coûteux, facile à utiliser et abondant notamment dans le sous-sol chinois et indien. Et peu importe son impact sur les émissions de CO2…

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