<i class='fa fa-lock' aria-hidden='true'></i> Les réseaux électriques à l’épreuve du solaire

3 juin 2023

Temps de lecture : 3 minutes
Photo : Ferme solaire en Australie
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Les réseaux électriques à l’épreuve du solaire

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La production croissante d’électricité solaire, photovoltaïque, présente des avantages certains, en termes de coûts et de rapidité d’installation des équipements. Mais elle crée aussi de sérieux problèmes sur les réseaux. Car l’électricité photovoltaïque est en quelque sorte du tout ou rien. Soit elle produit massivement profitant d’un ensoleillement important, soit elle ne produit rien. Dans les deux cas, les réseaux électriques doivent être capables de s’adapter presque instantanément.

C’est une information relativement méconnue, mais la surproduction est aussi problématique pour un réseau électrique que la sous-production. Le maintien de la fréquence (qui est censée en France être rigoureusement de 50 hertz), nécessite d’avoir en permanence un équilibre parfait entre offre et demande, mais aussi un équilibre géographique entre régions productrices et consommatrices.

Or l’énergie photovoltaïque a la fâcheuse tendance à produire… lorsque le soleil est présent. Quel que soit le jour. Avec de grands avantages (par exemple réduire les besoins de consommation du stock hydroélectrique durant la journée en hiver), mais aussi certains inconvénients.

Des prix négatifs, de -400 euros le MWh…

Le mois de mai est ainsi connu pour ses traditionnels ponts, moments ou une partie du pays tourne au ralenti et où les semaines complètes sont l’exception. Une activité économique réduite est alors la norme. C’est aussi un mois à la météorologie très favorable à la production électrique par le photovoltaïque du fait de journées ensoleillées et longues.

Les deux cumulés ont donné naissance à des situations relativement cocasses. Comme ces belles après-midi chômées et ensoleillées où la consommation électrique était au plus bas et la production solaire au plus haut. Cela a provoqué un déséquilibre majeur entre offre et demande d’électricité qui s’est retrouvé directement sur les prix des marchés de gros de l’électricité.

Le poncif « les prix de l’électricité sont indexés sur le gaz » que non nombre de médias répètent en boucle se heurte au principe même d’un marché. Un prix n’est jamais indexé, il prix dépend d’une confrontation entre une offre, et une demande. Et malgré une présence de gaz dans le mix, une offre bien plus importante que la demande entraîne une baisse des cours. Et cela n’a rien à voir avec le gaz…

Ainsi, le 28 mai dernier, les prix de l’électricité ont été négatifs… jusqu’à -400€ pour les offres en provenance des Pays-Bas. Les producteurs payaient alors pour se débarrasser de leur surplus de production et ainsi équilibrer leur réseau. Une situation ubuesque après les sommets atteints l’été dernier (plus de 1.000 euros le MWh) mais amenée à se reproduire de plus en plus souvent. Notamment parce les mécanismes d’incitation à l’installation de parcs photovoltaïques ont laissé un grand nombre d’angles morts.

Les CFD protègent de l’envolée des prix mais n’incitent pas à réduire la production quand elle est trop importante

La plupart des contrats signés par le passé sont des contrats de différence ou CFD, assurant un rachat à prix fixe, indépendamment des mécanismes de marché, de l’électricité produite et permettant ainsi aux investisseurs et producteurs de garantir la rentabilité de leurs équipements. Ces contrats ont ainsi en partie protégé les consommateurs au cours des derniers mois. Ils ont empêché les producteurs de bénéficier de l’effet d’aubaine que représentait la hausse des cours en leur imposant le même prix (fixe) de rachat.

Mais le revers de la médaille, c’est que cette garantie de prix de rachat supprime toute incitation financière à réduire sa production en cas de surproduction. Les centrales photovoltaïques ont ainsi pour la plupart produit à pleine puissance, couverte par leurs CFDs, même si cette production n’était pas utilisable et même posait un problème d’équilibre des réseaux.

Réduire la production nucléaire pour profiter des prix négatifs

Cette erreur commence à être partiellement corrigée dans les nouveaux contrats. Les parcs sortant de terre aujourd’hui ont, dans leurs contrats de différence une clause imposant d’effacer leur production (comprendre: la stopper) lorsque les prix instantanés deviennent négatifs. Mais il faudra du temps, et l’échéance des anciens contrats, pour que ce mécanisme incitatif devienne la norme.

En attendant, il faut s’attendre à voir de plus en plus souvent, les beaux dimanches d’été, ce genre de situation se reproduire. Et la France sait en tirer parti. Ainsi le 28 mai, EDF a réduit la production d’électricité de ses réacteurs nucléaires pour équilibrer l’ensemble du réseau d’Europe occidentale, en profitant pour importer de l’énergie de certains voisins (Allemagne, Belgique en particulier) à prix négatif et pour la réexporter immédiatement vers d’autres voisins (Grande Bretagne, Italie) à prix positif. Les affaires sont les affaires.

Philippe Thomazo

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